[EN BREF] Enregistrements clandestins de conversations entre agents publics

Deux affaires récentes ont mis en lumière la problématique des enregistrements clandestins de conversations entre agents publics sur leur lieu de travail.

Première affaire : enregistrements à l’insu d’agents dans un CHU

Dans la première affaire, Mme B., titulaire du grade de directeur d’hôpital de classe normale (…) avait enregistré des conversations de plusieurs agents à leur insu.

Cour administrative d’appel de Douai, 14 mai 2024, n°23DA00249

Estimant que Mme B. avait commis des manquements graves à ses obligations professionnelles, le directeur du CHU a engagé une procédure disciplinaire et la directrice du CNG a suspendu l’intéressée de ses fonctions sur le fondement de l’article 30 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

L’agente a contesté la suspension de ses fonctions à titre conservatoire.

Pour la CAA de Douai  : « Il résulte de ces éléments que Mme B. se comportait de manière inappropriée et adoptait un comportement excédant l’exercice normal du pouvoir hiérarchique. Ainsi, l’appelante n’est pas fondée à soutenir que le CNG aurait commis une erreur d’appréciation en décidant de la suspendre de ses fonctions ».

Pour la Cour, ce comportement justifie « la suspension à titre conservatoire de l’agent dans l’intérêt du service ».

Seconde affaire : sanction d’un policier pour enregistrements clandestins de ses collègues

Dans la seconde affaire, la CAA de Nancy a justifié la sanction disciplinaire de mise à la retraite d’office d’un policier ayant enregistré ses collègues à leur insu.

Cour administrative d’appel de Nancy, 30 avril 2024, n°22NC1016

Pour la CAA de Nancy : « Les faits reprochés constituent de très graves manquements aux obligations statutaires et déontologiques, à savoir aux devoirs de loyauté et d’exemplarité qui s’imposent aux fonctionnaires ».

En outre, la Cour estime que « la circonstance qu’il a été relaxé des faits d’atteinte à l’intimité de la vie privée par captation, enregistrement ou transmission des paroles d’une personne, par un jugement du tribunal correctionnel ne fait pas obstacle à ce qu’il fasse l’objet d’une sanction disciplinaire au titre des faits reprochés ».

Cour administrative d’appel de Nancy, 30 avril 2024, n°22NC01016

Enregistrements à l’insu et vie privée : cadre légal actuel

En l’état du droit, les propos enregistrés à l’insu des agents publics « dans le cadre de la seule activité professionnelle » ne relèvent pas des dispositions de l’article 226-1 du Code pénal qui réprime « le fait de porter atteinte à l’intimité de la vie privée d’autrui au moyen d’un procédé quelconque, notamment en enregistrant sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ».

La Cour de cassation considère que l’enregistrement de propos à l’insu des intéressés ne peut être sanctionné pénalement lorsque « ces propos entrent dans le cadre de la seule activité professionnelle des intéressés et ne sont pas de nature à porter atteinte à l’intimité de leur vie privée ».

Cour de cassation chambre criminelle, 14 février 2006, 05-84.384

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