Renégocier un accord de télétravail : comment procéder ? 

De nombreux RH souhaitent faire revenir leurs salariés au bureau, et peuvent donc être amenés à vouloir renégocier un accord de télétravail conclu il y a 2 ou 3 ans. Comment s’y prendre ? Y a-t-il une consultation obligatoire du CSE ? La Direction peut-elle revenir sur l’accord de télétravail de façon unilatérale ? Tour d’horizon des points de vigilance à avoir avant de renégocier un accord sur le télétravail.

Renégocier un accord de télétravail : comment procéder ?
Renégocier le télétravail : impliquer le CSE et respecter le cadre légal pour un accord équilibré.

Quand renégocier un accord sur le télétravail ?

La négociation annuelle sur les conditions de travail, prévue par l’article L.2242-17 du Code du travail, offre une opportunité juridique appropriée pour traiter ce sujet. Ce cadre juridique flexible devrait encourager les entreprises à ne pas rendre le télétravail contractuel, sauf à risquer de le rendre contraignant. Il serait plus approprié de l’inclure dans le contrat par des informations non contraignantes ou pour une durée limitée, de manière à éviter d’avoir à obtenir par la suite l’accord individuel de chaque salarié pour toute évolution du cadre du télétravail. 

Un accord collectif sur le télétravail est donc le bon outil pour renégocier les modalités de télétravail dans l’entreprise.

Y a-t-il une consultation obligatoire du CSE ?

Dans les entreprises de plus de 50 salariés, la consultation du CSE, lorsqu’il existe, est obligatoire avant la mise en place du télétravail.

Si l’accord est négocié avec un ou plusieurs délégués syndicaux, il doit être majoritaire, c’est-à-dire par au moins 50 % des suffrages exprimés. À défaut de majorité, il n’est valable que s’il est signé par les organisations syndicales ayant au moins 30 % des suffrages aux élections et approuvé par les salariés à la majorité simple.

  • Dans le cas où l’entreprise a moins de 11 salariés ou de 11 à 20 salariés sans CSE, l’accord est valable s’il est approuvé par 2/3 du personnel lors d’un référendum.
  • Si l’entreprise possède 11 à 49 employés, la validité de l’accord de télétravail est subordonnée par l’approbation de la majorité des salariés qui ont voté par référendum. Mais si les membres élus du CSE sont mandatés ou non, la validité de l’accord dépendra du vote des membres qui représentent la majorité des suffrages exprimés.
  • Pour les entreprises de plus de 50 salariés sans délégué syndical, l’accord est approuvé par la majorité des collaborateurs, par référendum dans le cas où il existe des membres élus du CSE mandatés. Pour les salariés mandatés non élus, la mise en place du télétravail doit être approuvée par la majorité des employés.

Un employeur peut-il mettre fin au télétravail de façon unilatérale ?

Dans une affaire jugée par la cour d’appel d’Orléans le 7 décembre 2021, la question se posait de savoir si un employeur pouvait mettre fin au télétravail, sans l’accord du salarié en lui demandant de revenir travailler dans l’entreprise 5 jours par semaine. 

Le Code du travail prévoit que le télétravail peut être mis en place soit dans le cadre d’un accord collectif ou une charte de télétravail, soit d’un commun accord entre l’employeur et le salarié

Dans l’affaire jugée par la cour d’appel d’Orléans, il n’y avait aucune formalisation écrite de l’accord des parties, ni accord d’entreprise, ni charte de télétravail. Depuis plusieurs années, l’employeur tolérait que le salarié travaille en télétravail 2 jours par semaine. 

L’employeur a tenté unilatéralement d’obliger le salarié à retourner dans l’entreprise cinq jours par semaine. 

La Cour d’appel d’Orléans a jugé que ce comportement était fautif et a conclu que le salarié était en droit de demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail, c’est-à-dire une rupture imputable à l’employeur avec versement de dommages et intérêts. En dehors d’un accord d’entreprise ou d’une charte de télétravail, il est nécessaire que l’employeur et le salarié soient tous les deux d’accord, et que cet accord soit formalisé pour mettre fin au télétravail. Cependant, si le télétravail est établi dans le cadre d’un accord d’entreprise ou d’une charte, l’employeur peut y mettre fin dès lors que le salarié ne remplit plus les conditions requises, en respectant les modalités spécifiées. 

Concrètement, si le télétravail est mis en place par un accord collectif, les modifications doivent également être négociées avec les partenaires sociaux.

Si les modalités de télétravail sont définies par une charte unilatérale de l’employeur, celle-ci peut être modifiée par l’employeur, mais toujours après consultation du CSE.

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Quels sont les points de vigilance à avoir lors de la renégociation d’un accord de télétravail ?

Les entreprises doivent porter une attention particulière à la bonne rédaction des dispositions relatives (notamment) à la prise en charge des frais, au contrôle et au suivi de l’activité ou encore à la formalisation du télétravail avec chacun des salariés. Voici les principaux points de vigilance à intégrer lors de la rénégociation des accords de télétravail.

Consulter le CSE

Il convient d’abord de s’assurer que le Comité social et économique (CSE) est consulté pour recueillir son avis et ses recommandations. En parallèle, il est important d’impliquer les salariés, afin de recueillir les opinions et les besoins des salariés pour adapter les modalités de télétravail aux réalités du terrain.

Respecter le cadre légal

Vous devez bien sûr vérifier que l’accord respecte les lois et réglementations en vigueur concernant le télétravail. N’oubliez pas d’inclure une clause de réversibilité permettant de revenir aux conditions initiales sous certaines conditions, tout en respectant les procédures.

Être attentif aux conditions de travail

Cela concerne notamment :

  • L’équipement et la sécurité : Définir clairement les responsabilités de l’employeur et du salarié en matière d’équipement (ordinateur, connexion internet, mobilier ergonomique) et de sécurité informatique.
  • Les horaires de travail : Préciser les plages horaires pendant lesquelles le salarié doit être joignable et ses horaires de travail.
  • Le droit à la déconnexion : Garantir le respect du droit à la déconnexion pour éviter le surmenage.

Définir des modalités de suivi du travail à distance

Il est important de définir comment le travail à distance sera suivi et évalué (objectifs, résultats, réunions régulières). Idem, la renégociation de l’accord sur le télétravail est le moment opportun pour mettre en place des outils et des canaux de communication efficaces pour maintenir le lien entre les équipes.

Clarifier les aspects financiers du télétravail

Cela passe notamment par la clarification des éléments suivants : 

Prévoir les modalités de formation et d’accompagnement des salariés

La renégociation des accords de télétravail est  aussi et surtout le moment idéal pour former les managers à la gestion des équipes à distance pour qu’ils puissent adapter leur management aux nouvelles conditions. L’accord peut aussi prévoir des formations pour aider les salariés à bien gérer leur travail à distance.

S’assurer que l’accès au télétravail est proposé de manière équitable à tous les salariés, sans discrimination.

Ce qui implique de prendre en compte les situations particulières (santé, contraintes familiales) et d’adapter les modalités de télétravail en conséquence. En particulier, il est courant de réaliser une liste des activités télétravaillables ou non.

Prévoir des modalités de révisions et d’évaluation

N’oubliez pas d’inclure une clause de révision régulière de l’accord pour pouvoir l’adapter en fonction des retours et de l’évolution des besoins, et de mettre en place des indicateurs pour évaluer l’efficacité et l’impact du télétravail sur la productivité et le bien-être des salariés.

En prenant en compte ces points de vigilance, l’employeur et les représentants des salariés peuvent s’assurer que l’accord de télétravail est équilibré, clair, et adaptable aux besoins de l’entreprise et des employés.

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