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Qu’en est-il des clauses de mobilité géographique, de quota (ou clause d’objectif ou de résultat) ou de résidence ? Que peut prévoir le contrat de travail ? Quelles sont les conditions de validité de ces clauses ? Le point avec François Taquet, docteur en droit et avocat spécialisé en droit du travail.
La clause de mobilité géographique
Cette clause qui doit être expressément acceptée par le salarié, permet à l’employeur d’obtenir de ce salarié qu’il accepte par avance une modification de son lieu de travail, au-delà d’un même secteur géographique.
Les limites à la clause de mobilité géographique
On sait que la jurisprudence a déjà fixé trois limites à l’application de cette clause :
- Cette clause est inopérante entre sociétés d’un même groupe voire au sein d’une UES (Cass soc. 23 septembre 2009 – 16 février 2012- 13 mars 2013)
- Si l’affectation occasionnelle d’un salarié en dehors du secteur géographique où il travaille habituellement ou des limites prévues par une clause contractuelle de mobilité géographique peut ne pas constituer une modification de son contrat de travail, il n’en est ainsi que lorsque cette affectation est motivée par l’intérêt de l’entreprise, qu’elle est justifiée par des circonstances exceptionnelles, et que le salarié est informé préalablement dans un délai raisonnable du caractère temporaire de l’affectation et de sa durée prévisible (Cass soc. 3 février 2010)
- Enfin, elle doit définir de façon précise sa zone géographique d’application et ne peut conférer à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée (Cass soc. 5 avril 2018, 2 octobre 2019)
Validité de la clause de mobilité géographique
La validité de cette clause est soumise à des conditions précises :
- Elle doit être claire et précise
- Elle ne doit pas entraîner la modification d’autres éléments du contrat de travail (Cass soc. 3 mai 2006 : incidence sur la rémunération, Cass soc. 14 octobre 2008 : incidence sur la durée du travail)
- La mobilité ne doit pas être mise en œuvre de manière précipitée (Cass soc. 16 février 1987 : demande de rejoindre la nouvelle affectation dans les 24 heures, Cass soc.21 juin 2006 : délai de 10 jours pour un salarié de Marcq en Baroeul rejoindre sa nouvelle affectation de Tours, distante de 468 kms). Le licenciement d’un salarié ayant refusé une mutation en application d’une clause de mobilité, alors que l’employeur ne respectait pas le délai de prévenance d’un mois, est dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass soc. 4 mars 2020)
- La clause ne doit porter une atteinte excessive à la vie personnelle et familiale du salarié (Cass soc. 14 octobre 2008– Cass soc. 13 janvier 2009., dans une espèce ou une veuve qui élevait seule deux jeunes enfants avait été mutée, cette mutation entraînant une modification de l’horaire de travail). Même en présence d’une clause de mobilité, le juge doit rechercher si la décision de l’employeur de muter une salariée de La Rochelle à Niort ne portait pas une atteinte au droit de l’intéressée à une vie personnelle et familiale, laquelle faisait valoir que ses déplacements devaient être limités à 20 kilomètres conformément aux préconisations du médecin du travail et qu’elle ne pouvait déménager, son époux étant entrepreneur à La Rochelle, et si une telle atteinte pouvait être justifiée par la tâche à accomplir et était proportionnée au but recherché (Cass soc. 17 octobre 2012)
- La bonne foi contractuelle étant présumée, les juges n’ont pas à rechercher si la décision de l’employeur de faire jouer une clause de mobilité stipulée dans le contrat de travail est conforme à l’intérêt de l’entreprise (V. Cass soc. 9 mai 1990). Il incombe au salarié de démontrer que cette décision a en réalité été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt, ou bien qu’elle a été mise en œuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle (Cass soc. 23 février 2005)
Clause de mobilité géographique et refus du salarié
Le refus par le salarié, dont le contrat comporte une clause de mobilité, de la modification de son lieu de travail constitue un manquement de ses obligations contractuelles, mais ne caractérise pas à lui seul une faute grave (Cass soc. 5 mai 2010).
Pour tous les salariés protégés, la clause de mutation géographique ne saurait faire échec aux dispositions d’ordre public, instituant pour ces derniers une protection exceptionnelle et dérogatoire du droit commun. Il en résulte donc, qu’en dépit de la clause prévue entre les parties, un employeur ne saurait imposer au salarié une modification même mineure. En d’autres termes, si le salarié refuse une modification, l’employeur n’aurait d’autre choix que d’envisager un licenciement après autorisation administrative (Cass soc. 28 mars 1989).
La clause de quota (ou clause d’objectif ou de résultat)
L’employeur et le salarié ont la faculté de prévoir dans le contrat de travail une clause de quota, (ou clause d’objectif ou de résultat). Celle-ci peut se traduire pratiquement par un chiffre d’affaires à réaliser ou par une obligation de vente minimum de produits à réaliser sur une période considérée.
Les conditions de validité de la clause de quota
Plusieurs conditions sont nécessaires pour la validité de cette clause :
- Elle doit avoir été signée par l’employeur et le salarié.
- Il convient qu’elle ne soit pas prohibée par la convention collective applicable à l’entreprise.
- Elle doit faire référence à des objectifs réalistes et réalisables. Il a ainsi été jugé que l’employeur ne pouvait imposer au salarié une augmentation de 100 % par rapport aux deux années précédentes (Cass soc. 13 juillet 1989). De même, il convient que les objectifs soient compatibles avec le marché (cass soc. 30 mars 1999).
- Il faut que l’employeur ne soit pas à l’origine du non réalisation de l’objectif (Cass. soc. 23 février 2000).
- La clause ne saurait prévoir que le non-respect de l’objectif constituera une cause de licenciement (« aucune clause du contrat de contrat de travail ne peut valablement décider qu’une circonstance quelconque constituera une cause de licenciement : il appartient au juge d’apprécier si les faits invoqués par l’employeur peuvent caractériser une cause réelle et sérieuse » (Cass soc. 14 novembre 2000)
Les conséquences d’un non-respect de la clause de quota
Dans un arrêt du 30 mars 1999, la chambre sociale a décidé que « la seule insuffisance de résultat ne peut, en soi, constituer une cause de licenciement ». Il appartient donc aux juges du fond d’apprécier « d’une part, si les objectifs, fussent-ils définis au contrat, étaient réalistes, d’autre part, si la salariée était en faute de ne pas les avoir atteints » (Cass soc. 14 novembre 2000).
En résumé, le juge ne saurait se contenter de la lecture de la clause de quota. Il devra vérifier si les objectifs sont réalistes, si cette non réalisation est constitutive d’une faute ou d’une insuffisance professionnelle imputable au salarié, si la non-réalisation est imputable à l’employeur qui ne fournit pas au salarié les moyens de les réaliser, si elle n’est pas imputable à la situation du marché.
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La clause de résidence
Cette clause qui impose un lieu de domicile à un salarié doit être acceptée par ce dernier.
Pratiquement, cette clause est difficile à être mise en œuvre. On rappellera ainsi que la Convention Européenne des droits de l’homme dans son article 8 dispose : « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ».
Cependant l’employeur pourrait aussi invoquer l’article L.1121-1 du Code du travail que nous avons vu précédemment. Ainsi, a déclaré nulle la clause de résidence insérée dans le contrat de travail de gardiens d’immeuble, alors que ceux-ci pouvaient exécuter les tâches qui leur étaient confiées tout en habitant à l’extérieur de leurs lieux de travail (Cass soc.13 avril 2005).
Dans le même sens, a été déclarée illégale la clause de résidence insérée dans le contrat de travail d’un avocat l’obligeant à fixer sa résidence au lieu d’implantation du cabinet employeur en se fondant sur la seule nécessité d’une « bonne intégration de l’avocat dans l’environnement local ». (Cass soc. 12 juillet 2005).
Ainsi cette étude montre, s’il en était besoin, que la liberté n’est pas totale quant au contenu des clauses de mobilité, de quota et de résidence. Dans chaque cas de figure, il appartient au juge de vérifier si les principes édictés par l’article L 1121-1 du Code du travail ont bien été respectés. A l’employeur à se montrer vigilant dans la rédaction des clauses !