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Le forfait-jour est sur la sellette ! Tous les médias se sont fait l’écho hier de l’examen en cours, par la Cour de cassation du dossier d’un commercial qui exige le paiement de ses heures supplémentaires après son licenciement en 2006.
Débouté jusqu’ici par le Conseil des Prud’hommes puis la Cour d’Appel, la plus haute juridiction pourrait lui donner raison.
Au final, près de 1 500 000 salariés pourraient réclamer le paiement de leurs heures supplémentaires, et ce, jusqu’au délai de prescription, soit au cours des 5 dernières années. Autant dire que les enjeux sont énormes !
Un dispositif né des 35 heures
Le régime du forfait jour a été créé en 2000, au moment de la loi Aubry 2 sur les 35 heures.
Il concerne les salariés autonomes dans l’organisation de leur travail, donc essentiellement les cadres, pour lesquels une durée quotidienne de travail n’a pas de sens. Leur temps de travail n’est donc pas calculé en heures mais en nombre de journées travaillées à l’année, d’où le nom de forfait-jour. Cette clause doit être clairement intégrée dans leur contrat de travail.
Comment fonctionne le forfait-jour ?
En pratique, les salariés au forfait-jour ne sont pas tenus de respecter des horaires stricts de travail. Mais ils ne sont pas concernés par la durée maximale du travail autorisée par le Code du Travail. Ils peuvent aussi travailler plus de 10 heures par jour, 44 heures par semaine. Ils doivent simplement respecter les durées minimales de repos : 11 heures par jour, et 35 heures consécutives par semaine. Au total, ils peuvent donc travailler jusqu’à 78 heures par semaine sans que l’employeur ne paye d’heures supplémentaires.
Pour compenser ces journées à rallonge, les cadres ne travaillent que 218 jours par an. Ils bénéficient donc d’environ de 10 jours de congés de plus que les autres salariés, voire plus selon l’accord d’entreprise ou la convention collective.
Pourquoi est-il remis en cause ?
Pour la CGT et la CFE-CGC, ces contreparties sont in suffisantes. Les deux syndicats ont donc saisi le Comité européen des droits sociaux, qui a jugé à trois reprises le forfait-jour contraire aux droits européens. Motif invoqué : une durée de travail de 78 heures par semaine n’est pas « raisonnable ». Jusqu’à présent, le gouvernement a fait la sourde oreille. Mais la Cour de Cassation pourrait s’appuyer sur cet avis pour ordonner le paiement des heures supplémentaires dans ce dossier, qui ferait jurisprudence.
Quelles conséquences d’une disparition du forfait-jour ?
En cas de remise en cause du forfait-jour, les contentieux risquent de se multiplier. Dans ce cas, il revient aux salariés de prouver leurs heures supplémentaires. En cas de condamnation, les entreprises pourraient se retourner contre l’Etat, qui leur a imposé une loi contraire aux dispositions européennes.
Dernière minute
La chambre sociale de la Cour de cassation a mis en délibéré au mercredi 29 juin sa décision dans l’affaire du forfait-jour.
L’audience, qui s’est tenue en début d’après-midi mercredi 8 juin et à laquelle « Les dessous du social » ont assisté, n’aura duré en fait que 15 petites minutes, montre en main. Le rapporteur de la chambre sociale a exposé les faits, non sans rappeler les multiples avis rendus par le Comité européen des droits sociaux contre le forfait-jour.
Manière, à peine déguisée, de suggérer à la Cour de se saisir de la question de sa licéité par rapport au droit européen.
L’avocat général a quant à lui suggéré à la chambre sociale de ne répondre qu’aux questions qui lui étaient posées (le cas en l’espèce) et surtout pas à celle qui ne l’était (la validité du forfait-jour), et ce malgré les articles de presse l’invitant à le faire. « Il serait sage d’en rester là », a-t-il argué. Et si jamais la chambre était tentée de le faire, il lui a alors conseillé de reporter le débat, ne serait-ce que parce que les parties présentes n’avaient pas été invitées à répondre à la question de la licéité du forfait-jour.
Les seuls mémoires qu’il a reçus ces derniers jours, a-t-il précisé légèrement agacé, émanent de l’entreprise IMV Technologies (l’ex-employeur qui attaque en cassation) et du… Medef. La Cour s’est ensuite réunie à huis-clos, pendant 45 minutes, pour débattre du dossier…
Au final, on saura donc le 29 juin si la chambre sociale se saisit ou non de la question de la licéité du forfait-jour. Et si, dans le cas positif, elle rend son jugement sans attendre ou si elle reporte sa décision de plusieurs mois après avoir demandé leur avis aux parties prenantes. Le gouvernement va pouvoir souffler pendant trois semaines…
Sources : Capital.fr et
Votre formation GERESO en intra sur ce thème : Gestion des forfaits-jours