Traitement indu perçu en maladie

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Le versement à un fonctionnaire en congé de maladie de la totalité de son traitement en lieu et place d’un demi-traitement n’a pas le caractère d’une décision accordant un avantage financier. De ce fait, il s’agit d’une erreur de liquidation, non créatrice de droit, qui peut donc être retirée au delà du délai de 4 mois. Ainsi, l’employeur est en dans l’obligation de corriger cette erreur et doit demander à l’intéressé le recouvrement des sommes indument perçues.

 

Juridiction: Conseil d’État
Formation: 1ère sous-section jugeant seule
Date de la décision: mercredi 16 février 2011
N°: 332162
Inédit au recueil Lebon
Type de recours: Excès de pouvoir

Président: M. Chantepy
Rapporteur: Mme Chrystelle Naudan-Carastro
Commissaire du gouvernement: Mme Landais Claire

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu l’ordonnance du 10 septembre 2009, enregistrée le 21 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, par laquelle le président de la cour administrative d’appel de Marseille a transmis au Conseil d’Etat, en application de l’article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par le MINISTRE DE L’ALIMENTATION, DE L’AGRICULTURE ET DE LA PECHE ;

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 septembre et 29 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés par le MINISTRE DE L’ALIMENTATION, DE L’AGRICULTURE ET DE LA PECHE ; le ministre demande au Conseil d’Etat d’annuler le jugement du 11 juin 2009 du tribunal administratif de Toulon déchargeant M. Pierre A de l’obligation de payer notifiée par la saisie attribution qui lui a été adressée le 5 avril 2007 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de Mme Chrystelle Naudan-Carastro, chargée des fonctions de Maître des requêtes,

– les conclusions de Mme Claire Landais, rapporteur public ;

Considérant que M. A, qui était employé en qualité de maître auxiliaire dans un lycée agricole relevant du ministre chargé de l’agriculture, a été titularisé, à compter du 1er septembre 1988, par un arrêté du 10 novembre 1992 ; que le ministre chargé de l’agriculture a demandé à M. A le remboursement du trop-perçu au titre des sommes qui lui avaient été versées pendant sa période d’arrêt maladie par deux titres de perception émis le 6 août 1992, portant respectivement sur la période du 1er janvier au 30 juin 1992 pour un montant de 14 387 francs (soit 2 193,28 euros) et sur la période du 3 juin au 30 décembre 1991 pour un montant de 31 966 francs (soit 4 873,19 euros), soit un montant total de 46 353 francs (soit 7 066,47 euros) ; qu’en l’absence de remboursement intégral de cette somme par l’intéressé, une saisie attribution pour un montant de 5 034, 68 euros restant à payer lui a été notifiée le 5 avril 2007 ; que, par un jugement du 11 juin 2009, le tribunal administratif de Toulon l’a déchargé, à sa demande, de l’obligation de payer notifiée par l’acte de saisie attribution du 5 avril 2007, par voie de conséquence de l’illégalité des titres de recettes du 6 novembre 1992 ; que le MINISTRE DE L’ALIMENTATION, DE L’AGRICULTURE ET DE LA PECHE se pourvoit en cassation contre ce jugement ;

Considérant que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l’administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; qu’une décision administrative explicite accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l’administration avait l’obligation de refuser cet avantage ; qu’en revanche, n’ont pas cet effet les mesures qui se bornent à procéder à la liquidation de la créance née d’une décision prise antérieurement ; que, pour l’application de ces règles pour la détermination de la rémunération des agents publics, le maintien du versement d’un avantage financier ne peut être assimilé à une décision accordant un avantage financier et constitue une simple erreur de liquidation non créatrice de droits ; qu’il appartient à l’administration de corriger cette erreur et de réclamer le reversement des sommes payées à tort, sans que l’agent intéressé puisse se prévaloir de droits acquis à l’encontre d’une telle demande de reversement ;

Considérant qu’il résulte de ces principes que le tribunal administratif de Toulon a entaché son jugement d’erreur de droit en jugeant que les titres de recettes du 6 novembre 1992 et la saisie attribution du 5 avril 2007 avaient été émis à tort au motif tiré de ce que le versement à M. A de son plein traitement, alors qu’étant placé en position de congé de maladie, il n’aurait dû percevoir qu’un demi-traitement, constituait un avantage financier résultant d’une décision explicite créatrice de droits qui ne pouvait être légalement retirée que dans un délai de quatre mois suivant son édiction ; que, par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, son jugement doit être annulé ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le versement de sommes à M. A en sus du traitement auquel il pouvait légalement prétendre pendant sa période d’arrêt maladie n’a pas le caractère d’une décision accordant un avantage financier et constitue une simple erreur de liquidation non créatrice de droits ; qu’il appartenait à l’administration de corriger cette erreur et de demander à M. A le recouvrement des sommes indûment perçues ; qu’il suit de là, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le trésorier-payeur général du département des Hauts-de-Seine, que M. A n’est pas fondé à demander l’annulation de la saisie attribution qui lui a été notifiée le 5 avril 2007 ;

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d’une somme au titre des frais exposés par M. A en première instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 11 juin 2009 du tribunal administratif de Toulon est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A au tribunal administratif de Toulon est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L’AGRICULTURE, DE L’ALIMENTATION, DE LA PECHE, DE LA RURALITE ET DE L’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE et à M. Pierre A.

 

Source : Conseil d’Etat, 16 février 2011, requête n° 332162

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