Il est probable que son contenu ne soit plus à jour.
Partager la publication "Contestation d’un redressement URSSAF : de l’intérêt de bien motiver un recours devant la commission de recours amiable !"
Le législateur avait donc considéré cette commission, émanation du Conseil d’administration de chaque Caisse, comme un filtre chargé de procéder à un nouvel examen des dossiers avant la phase judiciaire. Cependant, même si cette commission ne constitue pas une juridiction, elle ne saurait être prise en dérision ! En effet, la formulation du recours peut avoir des incidences importantes sur la suite de la procédure !
Une saisine obligatoire…
Suivant l’article R. 142-1 du Code de la Sécurité sociale, les réclamations, relevant du contentieux général de la Sécurité sociale et de la Mutualité sociale agricole et formées contre les décisions prises par les organismes de Sécurité sociale et de la Mutualité sociale agricole de salariés et de non-salariés, sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil d’administration de chaque organisme. Il ressort clairement de cet article que le cotisant, qui souhaite contester le redressement opéré par l’URSSAF, doit préalablement saisir, suite à la mise en demeure, la commission de recours amiable. Il s’agit là d’une disposition d’ordre public, ainsi que le confirme une jurisprudence constante (Cass. civ. 20 juin 1958. Bull. civ. II, n° 454. 19 mars 1969. Bull. civ. V. n° 197. 11 février 1981. Bull. civ. V. n° 130. Paris. Pôle 6. Ch. 12. 30 mars 2018. RG n° 14/09633).
Très récemment, plusieurs arrêts ont enfoncé le clou en rappelant que cette commission était un préalable obligatoire. Faute de saisine de cette commission, le recours devant le tribunal est irrecevable (Paris. Pôle 6 – Chambre 12. 22 mai 2020. RG n° 17/04209 – V. dans le même sens : Amiens.2° Protection sociale. 6 avril 2020. RG n° 19/01574, 9 avril 2020. RG n° 19/03595). Ce rappel n’est pas superflu lorsque l’on sait que cette commission n’est pas une juridiction, mais une simple émanation du conseil d’administration de chaque organisme de Sécurité sociale….
Pratiquement, Il appartient au cotisant, qui entend saisir la CRA de formuler sa demande « dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation ». Avec toutefois une particularité pour la suite de la procédure. En effet, le cotisant n’a pas l’obligation d’attendre la décision de la commission avant de saisir le tribunal. Deux hypothèses peuvent être retenues :
- soit le cotisant laisse la Commission statuer sur sa réclamation. Dans ce cas, il attendra la notification de la décision.
- soit le cotisant fera application des dispositions de l’article R 142-6 du Code de la sécurité sociale suivant lequel lorsque la décision du Conseil d’Administration ou de la Commission n’a pas été portée à la connaissance du requérant dans le délai de deux mois, l’intéressé peut considérer sa demande comme rejetée et se pourvoir directement devant le tribunal.
Ainsi, le cotisant dispose d’un choix : soit laisser la Commission statuer sur son différend, soit accélérer la procédure en saisissant le tribunal en l’absence de décision de la Commission deux mois après sa saisine. L’article R 142-6 du Code de la sécurité sociale est donc très clair, et n’est envisagé que comme une faculté pour l’assuré (le cotisant « peut considérer »).
Jusque-là, tout semble à peu près simple ! Mais, comment formuler le recours ? C’est sans doute à ce niveau qu’il faut être prudent. Car toute maladresse pourrait avoir des conséquences fatales pour la suite du dossier !
Un contenu à envisager avec prudence…
Envisageons une première hypothèse que l’on rencontre (malheureusement) fréquemment : le cotisant a limité son recours à un ou plusieurs chefs de redressement. Dans ce cas, selon la jurisprudence, il ne pourra plus contester les autres points de redressement devant la juridiction contentieuse… même si des possibilités juridiques apparaissent ultérieurement. C’est ainsi qu’il convient d’interpréter un arrêt de la Cour d’appel d’Amiens : dès lors qu’une société n’avait saisi la commission de recours amiable de l’URSSAF que d’une contestation du chef de redressement n°7 relatif aux cadeaux en nature offerts par l’employeur, la demande présentée quant au chef de redressement n°1, non soumise à l’examen préalable de la commission de recours amiable de l’URSSAF, ne pouvait donc qu’être déclarée irrecevable (Amiens.2° Protection sociale. 6 avril 2020. RG n° 19/01574). Cette solution doit donc être évitée.
Voyons également une autre hypothèse où le cotisant, tout heureux d’avoir décelé une erreur dans la procédure (ex : absence de réponse de l’URSSAF aux observations du cotisant, contenu irrégulier de la mise en demeure), la signale devant la commission de recours amiable ! Erreur fatale ! En effet, la jurisprudence décide que l’URSSAF peut régulariser une mise en demeure nulle par l’envoi d’une nouvelle mise en demeure faite dans le respect de la procédure (V. Cass civ. 2°. 6 juillet 2017 pourvoi n° 16-19384 – Colmar, Chambre sociale – section SB, 14 mai 2020, RG n° 17/00725). Finalement, l’honnêteté et le zèle du cotisant ne serviraient qu’à aider l’URSSAF qu’à rectifier ses erreurs de procédure … !
Une troisième hypothèse se doit donc d’être davantage envisagée : contester de manière globale, devant la commission de recours amiable, la totalité du redressement. Solution judicieuse qui permettra au cotisant de contester par la suite d’autres éléments même non visés dans la requête initiale (Cass soc. 25 janvier 1989 pourvoi n° 86-11940 – Cass civ.2°. 7 mai 2015 pourvoi n° 14-14914 V. également : Riom. Quatrième chambre civile (sociale).15 mai 2018. RG n° 17/01721 – Aix-en-Provence. Chambre 14. 29 avril 2016. RG n° 14/17349). On pourrait ainsi suggérer des formulations permettant de ménager l’avenir, comme : « Je conteste l’ensemble des redressements opérés et la mise en demeure subséquente, notamment pour les motifs suivants : … »
Plus que jamais, on ne saurait encourager les cotisants à la prudence dans la motivation, et ce dès la saisine de la commission de recours amiable ! Sans doute « le poids de mots » a-t-il toute importance en la matière…