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Partager la publication "Taux de défaillance des entreprises : records de sinistralité battu en 2009 !"
Risque financier majeur, le risque crédit clients constitue l’une des principales causes de défaillance des entreprises. Et il devient encore plus critique en période de crise conjoncturelle. La gestion de la fidélité client est donc vitale, analyse Jean David DARSA, dont l’ouvrage La gestion du risque crédit client – Identifier, comprendre, maîtriser, vient de paraître. En bref, le risque crédit client constitue un levier majeur à maîtriser. Rencontre.
GERESO :Difficultés financières, faillites ? La gestion du risque client est « à la une» de l’environnement économique actuel. Comment les entreprises gèrent-elles ?
Jean-David DARSA : A la lumière du taux de défaillance des entreprises en 2009, plutôt mal a priori ! Nous avons battu des records de sinistralité l’année dernière : plus de 61 000 défaillances d’entreprise en 2009 en France, (le record de 1993 est dépassé !), et les causes de défaillance demeurent globalement toujours les mêmes : une entreprise sur quatre dépose son bilan à cause d’un incident client.
Le contexte conjoncturel dégradé, initié par la crise des subprimes depuis 2008, n’a fait que renforcer les fragilités structurelles des entreprises (sous capitalisation chronique, trésorerie tendue…). La perte d’un client, d’un encours significatif, ou la dégradation des flux de trésorerie par mauvaise maîtrise des factures échues à recouvrer demeurent lourdes de conséquences pour la pérennité des entreprises.
La question de la maîtrise du risque crédit client demeure essentielle, même si elle devient peu à peu mieux gérée,notamment au cours des dernières années. Au-delà de l’embellie du volume des défaillances d’entreprises recensée au printemps 2010, encore relative, il est à noter que les processus de type crédit management demeurent plus que jamais essentiels, et ce particulièrement en contexte économique contraint.Progressivement, les entreprises s’y attellent, mais il reste encore du travail à accomplir !
Pour simplifier, la situation des entreprises demeure somme toute assez « classique » : les grandes entreprises gèrent l’enjeu risque crédit client plutôt bien avec des moyens et des méthodes robustes, les PME/PMI le font de mieux en mieux, et les TPE pas encore assez. Or, il s’agit d’un enjeu qui concerne toutes les entreprises,quel que soit le secteur d’activité. La situation s’améliore, mais le contexte économique n’en laisse plus le choix. Gérer son risque crédit client n’est désormais plus un luxe, bien au contraire.
La loi sur la nouvelle réglementation économique (NRE n°2001-420) réduit les délais de paiement à 30 jours. Avec le recul, l’apport a-t-il été bénéfique pour les entreprises ?
Très franchement… pas vraiment ! La LME,soit loi de Modernisation Economique, a effectivement officialisé un encadrement contractuel plus marqué des délais de paiements à proposer aux clients, mais les pratiques et les comportements demeurent, pour l’essentiel,globalement inchangés. Les délais réels de règlement ne se sont pas fondamentalement améliorés, ils se sont même accrus mécaniquement ! Et il est encore trop tôt pour dire si les pénalités de retard – qui devraient logiquement être collectées de manière plus sensible maintenant – auront eu un effet psychologique, financier, réel ou comportemental sur les débiteurs. Pour l’instant, rien n’a vraiment changé, au-delà des démarches volontaristes législatives.
À mon avis, l’évolution des comportements payeurs ne sera pas radicalement transformée en quelques mois, le poids des habitudes et des usages perdureront encore longtemps. La question stratégique de la qualité et de la maîtrise de l’encours client demeure en conséquence prioritaire pour toute entreprise, indépendamment des incitations étatiques à en réduire l’impact.
Comment se prémunir de ce risque à la fois spécifique et incontournable ?
Tout d’abord, rappelons que sans client, il n’y a pas d’entreprise. La prise de risque client est incontournable, nécessaire,et source de création de valeur par nature. Par contre, l’entreprise doit se donner impérativement les moyens de maîtriser les enjeux du risque crédit client. Ce risque comporte tant un volet amont : la prise de risque proprement dite, qu’une dimension aval (la gestion du risque, c’est-à-dire pour simplifier la surveillance des risques pris et les mécanismes de recouvrement des créances échues).
Les entreprises doivent prioritairement définir une véritable politique crédit client, en cohérence avec la stratégie de développement commercial et la politique financière de l’organisation. Ne jamais oublier que l’enjeu « risque crédit client » impacte tant le compte de résultat que le bilan de l’entreprise. Pas uniquement un niveau de provisions pour dépréciation d’actifs.
Une fois définie la politique crédit, le dirigeant doit ensuite mettre en oeuvre sa stratégie crédit client, qui, elle,sera multi-facette : internalisation ou externalisation des processus de prise et de gestion des risques, outils, méthodes, moyens à déployer, pilotage et mesure de l’efficacité des actions initiées. Il n’existe pas de réponse unique ou idéale, seul le profil de l’entreprise permettra de qualifier les bonnes démarches à déployer.
En matière de risque crédit client, il n’y a pas de réponse unique pour se prémunir du risque. L’objectif principal consiste à prendre le bon risque, sur le bon client, au bon moment, aux bonnes conditions.Refuser le dossier d’un prospect jugé risque qui est toujours vivant 5 ans après, ou dégrader une rentabilité suite à une défaillance majeure sont des décisions potentiellement critiquables, mais qu’il faut contextualiser. L’enjeu majeur réside dans la capacité de l’entreprise à assurer en permanence la cohérence de ses actions en matière de risque crédit client, de manière lucide,volontariste et pragmatique.
Audit de sa chaîne administrative,commerciale, financière ? Impulser une gestion volontariste du risque client oui, mais par où commencer ?
Je préconise de déployer un plan d’action en plusieurs étapes. Tout d’abord, réaliser un audit de son existant :composition du portefeuille client, typologie des transactions, historique des paiements, analyse des profils débiteurs, procédures existantes etc… Ensuite,définir une véritable politique crédit pour l’entreprise (quels objectifs ?quels moyens ? quels enjeux ? Quelles solutions ?), en assurant la cohérence de la démarche dans son intégralité.
Puis, bâtir un plan d’action de déploiement, en travaillant simultanément les enjeux « prise de risque » et« gestion du risque ».Ne pas oublier les questions de délégation, les enjeux associés aux Conditions Générales des contrats, aux pratiques du Marché,à la budgétisation du coût du risque crédit client, etc.
Un conseil : ne pas se ruer sur les solutions logicielles existantes ou les sociétés spécialisées qui promettent monts et merveilles. En matière de risque crédit client, chaque option organisationnelle ou fonctionnelle est potentiellement éligible, il n’y a pas de solution miracle, mais la bonne solution adaptée à votre contexte propre. En matière de risque crédit, pas de dogmatisme, seulement la recherche permanente de la meilleure efficacité des actions.
La maîtrise du risque crédit client implique de multiples processus opérationnels (de la prospection à la résolution judiciaire d’un contrat), de multiples compétences (analyse financière, juridique,comptable, organisationnelle, informatique…), une vision transversale et matricielle des enjeux. Ne sous-estimez pas l’importance de ce sujet particulièrement critique, ni le sens à donner à sa maîtrise pertinente et collective.
Par ailleurs, j’invite tous les lecteurs de cette Lettre à questionner son existant : comment l’enjeu « Risque crédit Client » est-il effectivement traité
dans mon entreprise ?Quel est le coût du risque crédit client de mon organisation ? Suis-je certain de la robustesse de mes processus ? ? Vous pourriez être surpris !
La maîtrise du risque crédit client n’est pas limitée à une vision financière ou juridique. Elle doit s’inscrire dans une démarche volontariste globale de l’entreprise, en cohérence avec sa stratégie.Je serai tenté de conclure en disant « qu’il n’est de risques financiers que de risque client » !