Les possibilités de cumuls d’activités ouvertes aux agents publics

En application des dispositions des articles L. 121-3 et L. 123-1 du code général de la fonction publique (CGFP) par principe, les fonctionnaires et les agents contractuels de droit public doivent consacrer l'intégralité de leur activité professionnelle à leurs tâches. Ils ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit.

Les possibilités de cumuls d’activités ouvertes aux agents publics
Cumul d’activités des agents publics : interdit sauf exceptions encadrées.

Ce principe est applicable aux fonctionnaires et aux agents contractuels, à temps partiel ou à temps plein, occupant un emploi à temps complet ou à temps non complet (toutefois, des règles spécifiques sont prévues pour les agents occupant un emploi à temps non complet pour une durée inférieure ou égale à 70 % de la durée légale du travail)

Les agents placés en congé de maladie ou en congé annuel, y sont également soumis. Le principe en est expressément réaffirmé pour le bénéficiaire d’un congé de longue maladie ou de longue durée, qui « doit cesser tout travail rémunéré, sauf les activités ordonnées et contrôlées médicalement au titre de la réadaptation » (1).

Quelles sont les activités privées interdites aux agents publics ?

Conformément à l’article L. 123-1 du CGFP, sont interdites les activités privées suivantes :

  • la création ou la reprise d’une entreprise, immatriculée au registre du commerce et des sociétés ou affiliée au régime des régime du micro-entrepreneur, lorsque l’agent occupe un emploi à temps complet et exerce ses fonctions à temps plein ;
  • la participation aux organes de direction de sociétés ou d’associations à but lucratif ;
  • le fait de donner des consultations, de procéder à des expertises et de plaider en justice dans les litiges intéressant toute personne publique (même devant une juridiction étrangère ou internationale), sauf au profit d’une personne publique ne relevant pas du secteur concurrentiel ;
  • la prise ou la détention, directement ou par personnes interposées, d’intérêts de nature à compromettre l’indépendance de l’agent, dans une entreprise soumise au contrôle de l’administration à laquelle il appartient ou en relation avec cette dernière ;
  • et le cumul d’un emploi permanent à temps complet avec un ou plusieurs autres emplois permanents à temps complet.

La violation des dispositions relatives à l’interdiction du cumul donne lieu au reversement des sommes indûment perçues, par voie de retenue sur le traitement (2). L’agent peut également faire l’objet des poursuites prévues par le code pénal en cas de prise illégale d’intérêts (3). Par ailleurs, le même agent peut en outre être sanctionné disciplinairement.

Ainsi, a été jugé légal le licenciement pour motif disciplinaire d’un agent contractuel qui, chargé d’un projet conclu entre l’administration et une société, détenait près de la moitié des actions de cette société, dont son épouse était présidente (4).

Pour autant, le principe d’interdiction de cumul est aménagé par une série de dérogations prévues par le CGFP, il s’agit de :

  • dérogations liées aux activités accessoires non soumises à autorisation ;
  • celles liées aux activités devant donner lieu à une simple déclaration ;
  • celles liées aux activités soumises à autorisation ;
  • ou encore de dérogations liées à la création ou à la reprise d’une entreprise.

Quelles sont les activités cumulables non soumises à une autorisation ?

En application des dispositions des articles L. 123-2 et L. 123-3 du CGFP, les activités suivantes peuvent être exercées sans autorisation préalable de l’administration :

  • La production des œuvres de l’esprit (au sens des articles L. 112- 1, L. 112-2 et L. 112-3 du code de la propriété intellectuelle) s’exerce librement, dans le respect des dispositions relatives aux droits d’auteur des agents publics, et des obligations de secret professionnel et de discrétion professionnelle qui leur incombent ;
  • Les personnels enseignants, techniques ou scientifiques des établissements d’enseignement et les personnes pratiquant des activités à caractère artistique peuvent exercer une profession libérale découlant de la nature de leurs fonctions.

Par ailleurs, les agents publics peuvent :

  • Exercer à titre accessoire les fonctions d’agent recenseur, par dérogation aux règles de droit commun en matière de cumul ;
  • Bénéficier d’un contrat « vendanges » de droit privé à durée déterminée, conformément à l’article L. 718-6 du code rural et de la pêche maritime ;
  • Remplir les fonctions de syndic de la copropriété au sein de laquelle ils sont eux-mêmes propriétaires ; cette activité n’est pas considérée comme activité privée lucrative, à condition qu’elle ait un caractère occasionnel et qu’elle soit compatible avec l’exercice de l’emploi.

En outre, le IV de l’article 23 de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 (de modernisation de la fonction publique) indique que les dispositions législatives qui ont édicté des règles spéciales à certaines catégories de fonctionnaires ou d’agents publics restent en vigueur. Sont notamment concernés les architectes qui ont la qualité soit de fonctionnaire, soit celle d’agent contractuel employé à temps plein. Ils peuvent exercer à titre individuel, sous forme libérale, lorsque leur statut ou leur contrat ne l’interdit pas, des missions de conception et de maîtrise d’œuvre pour le compte d’autres collectivités publiques ou de personnes privées.

Quelles sont les activités privées soumises à une simple déclaration ?

En premier lieu, un dirigeant de société ou d’association à but lucratif peut, tout en continuant à exercer son activité privée, être recruté en qualité de fonctionnaire, s’il est lauréat d’un concours, ou en qualité d’agent contractuel. L’interdiction faite aux agents publics d’exercer à titre professionnel une activité privée lucrative, ainsi que l’interdiction de participer à l’organe de direction d’une société ou d’une association à but lucratif, ne leur sont alors pas applicables, conformément aux dispositions de l’article L. 123-4 du CGFP.

Cependant, une telle poursuite d’une activité privée doit être compatible avec les obligations de service. Elle ne doit pas porter atteinte au fonctionnement normal, à l’indépendance, à la neutralité du service ou aux principes déontologiques (5).

Toutefois, elle doit être soumise à une déclaration écrite de l’agent à l’administration et doit préciser la forme et l’objet social de l’entreprise ou de l’association, son secteur et sa branche d’activité (6).

Conformément à l’article L. 123-4 du CGFP, cette dérogation est accordée pour une durée maximale d’un an à compter du recrutement ; elle peut être prolongée pour une durée maximale d’un an.

L’autorité peut s’opposer au cumul d’activités ou à sa poursuite :

  • Si l’intérêt du service le justifie ;
  • Si les informations sur le fondement desquelles l’autorisation a été donnée ou celles communiquées sont inexactes ;
  • Ou encore, si ce cumul est incompatible avec les fonctions exercées par l’agent ou l’emploi qu’il occupe au regard des obligations déontologiques et des conflits d’intérêts (7).

En second lieu, les agents occupant un emploi à temps non complet sont la durée de service est inférieure ou égale à 70 % de la durée légale du travail peuvent exercer une activité privée lucrative à titre professionnel, conformément aux dispositions de l’article L. 123-5 du CGFP.

L’activité doit avoir lieu en dehors des obligations de service de l’agent. Elle doit être compatible avec celles-ci et avec les fonctions exercées ou l’emploi occupé. Et l’administration doit informer l’agent de cette possibilité et des modalités de présentation de la déclaration (8).

Quelles sont les activités accessoires soumises à une autorisation de l’administration ?

Les fonctionnaires et agents contractuels peuvent être autorisés à exercer à titre accessoire une ou plusieurs activités, lucratives ou non, auprès d’une personne ou d’un organisme public ou privé, dès lors que cette activité est compatible avec leurs fonctions, n’affecte pas leur exercice et ne porte pas atteinte au fonctionnement normal, à l’indépendance ou à la neutralité du service, ni placer l’agent dans une situation de prise illégale d’intérêts (9).

Un même agent peut être autorisé à exercer plusieurs activités accessoires mais de telles activités ne peuvent être exercées qu’en dehors des heures de service de l’agent.

A noter que n’est pas fautive l’absence de déclaration ou de demande d’autorisation de cumul d’activités d’un agent, employé en qualité de vacataire aux termes de ses contrats, dès lors que la commune ne l’avait pas informé qu’il était dorénavant employé en qualité d’agent public contractuel (10).

Le caractère accessoire doit être apprécié à la lumière de trois éléments (11) :

  • l’activité envisagée ;
  • les contraintes et sujétions particulières ;
  • les conditions d’emploi de l’agent.

Aussi, une même activité peut-elle présenter un caractère accessoire pour un agent à mi-temps, mais pas pour un agent à temps plein.

Quelle est la nature des activités accessoires soumises à autorisation ?

La liste des activités accessoires autorisées est fixée par les dispositions de l’article R. 123-8 du CGFP, il s’agit des activités suivantes :

  • expertise et consultation, sauf dans les litiges intéressant une personne publique, le cas échéant devant une juridiction étrangère ou internationale, relevant du secteur concurrentiel (12) ;
  • enseignement et formation ;
  • activité à caractère sportif ou culturel, y compris encadrement et animation dans les domaines sportif, culturel, ou de l’éducation populaire ;
  • activité agricole dans une exploitation constituée ou non sous forme sociale ;
  • activité de conjoint collaborateur au sein d’une entreprise artisanale, commerciale ou libérale ;
  • aide à domicile à un ascendant, à un descendant, à son conjoint, à son partenaire de PACS ou à son concubin, permettant à l’agent de percevoir, le cas échéant, les allocations afférentes à cette aide ;
  • travaux de faible importance réalisés chez des particuliers ;
  • activité d’intérêt général exercée auprès d’une personne publique ou d’une personne privée à but non lucratif ;
  • mission d’intérêt public de coopération internationale ou auprès d’organismes d’intérêt général à caractère international ou d’un Etat étranger.

Toutes ces activités accessoires peuvent être exercées sous le régime du micro-entrepreneur ou sous tout autre régime (13).

Toutefois, conformément aux dispositions de l’article R. 123-8 du CGFP, les deux activités suivantes ne peuvent être exercées que sous le régime du micro-entrepreneur :

  • services à la personne ;
  • et vente de biens produits personnellement par l’agent.

A noter que les collaborateurs de cabinet des autorités territoriales peuvent être autorisés à exercer à titre d’activité accessoire les fonctions de collaborateur d’un député, d’un sénateur ou d’un représentant au Parlement européen (14).

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 CUMUL D’ACTIVITÉS DANS LA FONCTION PUBLIQUE 

1 jour – En présentiel ou à distance

  • Respecter le cadre légal et le champ d’application du régime de cumul d’activités issues de la loi « Déontologie ».
  • Appliquer la procédure de cumul d’activités suivant leur articulation public/public ou public/privé.
  • Gérer les cas particuliers de cumul d’activités et de fonctions.
  • Utiliser le régime de sanctions en cas de non respect des règles.
  • Faire respecter les règles déontologiques.

Dans quels cas l’administration peut-elle remettre en cause d’une autorisation ?

L’administration dont relève l’agent peut s’opposer à tout moment à la poursuite d’une activité accessoire dont l’exercice a été autorisé, dans l’un des cas suivants (15) :

  • lorsque l’intérêt du service le justifie ;
  • lorsque les informations sur la base desquelles l’autorisation a été donnée ou celles communiquées dans la déclaration se révèlent inexactes ;
  • ou, lorsque le cumul est incompatible avec les fonctions exercées par l’agent ou l’emploi qu’il occupe au regard des obligations déontologiques et des conflits d’intérêts.

La décision de l’administration doit indiquer les considérations de droit et de fait qui la motivent (16).

Enfin et à titre expérimental pour une durée de trois ans à compter du 30 décembre 2022, les agents publics (fonctionnaires et contractuels) peuvent être autorisés à exercer à titre accessoire l’activité lucrative de conduite d’un véhicule affecté aux services de transport scolaire ou assimilés (17). L’exercice de cette activité ne doit pas porter atteinte au fonctionnement normal, à l’indépendance ou à la neutralité du service d’affectation de l’agent et ne doit pas le mettre dans une situation de prise illégale d’intérêts.


Références :

  1. Par exemple, s’agissant de la fonction publique territoriale, voir l’article 28 du décret n°87-602 du 30 juillet 1987, relatif à l’organisation des conseils médicaux, aux conditions d’aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;
  2. Article L. 123-9 du CGFP ;
  3. Article 432-12 du code pénal ;
  4. CE, 31 juillet 2009, requête n° 299959 ;
  5. Article R. 123-3 du CGFP ;
  6. Article R. 123-4 du CGFP ;
  7. Article R. 123-2 du CGFP ;
  8. Article R. 123-5 du CGFP ;
  9. Articles L. 123-7 et R. 123-7 du CGFP ;
  10. CAA Paris, 30 janvier 2024, requête n° 22PA03928 ;
  11. Circulaire du 11 mars 2008, relative aux cumuls d’activités portant application de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, modifiée, notamment son article 25, et du décret n° 2007-658 du 2 mai 2007, relatif au cumul d’activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l’Etat ;
  12. Activité interdite en application de l’article L. 123-1 du CGFP ;
  13. Articles L. 123-7 et R. 123-8 du CGFP ;
  14. Article R. 123-13 du CGFP ;
  15. Article R. 123-2 du CGFP ;
  16. Voir la circulaire citée en note 11 ;
  17. Décret n° 2022-1695 du 27 décembre 2022, ouvrant à titre expérimental la possibilité pour un agent public d’exercer à titre accessoire une activité lucrative de conduite d’un véhicule affecté aux services de transport scolaire ou assimilés.

 

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