Partager la publication "L’ouverture de droits à l’allocation d’aide au retour à l’emploi pour les agents refusant le renouvellement de leur contrat"
Cependant, contrairement aux salariés de droit privé, l’analyse de la notion de privation involontaire d’emploi s’avère cruciale lorsque l’agent refuse le renouvellement de son contrat. Le décret n° 2020-
741 du 16 juin 2020, à son article 2, précise en effet que sont considérés comme involontairement privés d’emploi les agents dont le contrat n’est pas renouvelé à l’initiative de l’employeur, ou à leur initiative si ce refus de renouvellement est lié à des considérations d’ordre personnel ou à une modification substantielle et injustifiée du contrat.
Les critères du refus légitime de renouvellement
Le Conseil d’État a été amené à préciser les contours de cette notion. Ainsi, un agent qui refuse le renouvellement avant que l’employeur n’ait formellement manifesté son intention de reconduire le contrat n’est pas considéré comme involontairement privé d’emploi. Toutefois, il appartient à l’administration, sous le contrôle du juge, d’apprécier si les circonstances du refus permettent de le qualifier de perte involontaire d’emploi.
Deux situations peuvent ainsi être assimilées à une privation involontaire d’emploi.
1. Les considérations d’ordre personnel et notamment :
- la séparation avec un conjoint, un déménagement ou des obligations familiales impératives, comme la garde des enfants, ont été jugés légitimes (Cour administrative d’appel de Douai, 2 avril 2021) ;
- en revanche, des motifs liés à des projets personnels, tels qu’un investissement associatif ou des difficultés psychologiques liées à l’activité professionnelle, n’ont pas été retenus comme des refus légitimes (Cour administrative d’appel, 9 novembre 2022).
2. La modification substantielle et injustifiée du contrat :
- une diminution importante de la quotité de travail entraînant une réduction significative de rémunération a été reconnue comme une modification substantielle justifiant le refus (Conseil d’État, 9 juin 2021) ;
- toutefois, la seule réduction de la durée du renouvellement, si elle répond à l’intérêt du service et repose sur une évaluation objective des capacités de l’agent, ne constitue pas une modification injustifiée (Conseil d’État, 28 mars 2023).
Dans ce contexte, la décision de la Cour administrative d’appel de Paris (4e chambre, 4 octobre 2024, n° 23PA02807) illustre l’importance de cette distinction. Le renouvellement du contrat de Mme B… pour une durée d’un an, au lieu des trois ans initiaux, constituait une modification substantielle. Toutefois, il a été établi que cette réduction était justifiée par des difficultés d’adaptation de l’agent à ses missions, tout en laissant à Mme B… une période supplémentaire pour s’améliorer dans les domaines non maîtrisés. Cette réduction a donc été considérée conforme à l’intérêt du service.
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L’appréciation du caractère involontaire
L’appréciation de l’administration et du juge administratif repose sur un examen factuel et individualisé :
- l’agent doit établir que son refus est motivé par des circonstances impératives ou des modifications substantielles ;
- l’administration, quant à elle, doit vérifier que le refus n’est pas dénué de fondement.
En l’absence de preuves suffisantes (Cour administrative d’appel de Douai, n° 453076), l’administration peut refuser l’octroi des ARE, en étant fondée à considérer que la privation d’emploi résulte d’une décision volontaire de l’agent.
Ainsi, le directeur des ressources humaines du centre hospitalier de Douai avait refusé d’octroyer les allocations ARE en se fondant sur l’absence de perte involontaire d’emploi et sur une recherche d’emploi insuffisante. Bien que l’agent ait évoqué des motifs graves, tels qu’un harcèlement présumé, elle n’a pas apporté les preuves nécessaires pour justifier ces accusations. De plus, son activité limitée de recherche d’emploi a également conduit à l’exclusion des droits à l’allocation d’aide au retour à l’emploi (Cour administrative d’appel de Douai, 2e chambre, 13 juin 2023, n° 22DA00125).
Conclusion
Le refus de renouvellement de contrat, pour ouvrir droit à l’allocation d’aide au retour à l’emploi, doit répondre à des critères précis. Les considérations d’ordre personnel doivent être impératives, et toute modification du contrat doit être substantielle et injustifiée.