Quand le DJ fonctionnaire se fait couper le son par le Conseil d’État

Quand on est DJ, il est parfois difficile de résister à l'appel des platines et des soirées endiablées. Mais quand on est aussi fonctionnaire, il faut savoir régler son rythme entre "mix" et "bureau". C'est ce qu'un agent de maintenance de Bordeaux a appris à ses dépens.

En cumulant soirées musicales et missions au collège, notre DJ public a fini par se faire couper le son par le Conseil d'État. Retour sur une affaire où le juge administratif a montré qu'il n'était pas prêt à danser sur tous les airs... et où "Another One Bites the Dust" 

Quand le DJ fonctionnaire se fait couper le son par le Conseil d’État
Quand le mix entre DJ et fonctionnaire déraille, le Conseil d'État coupe le son !

Révocation pour activité non autorisée : une histoire qui fait du bruit

M. A…, agent de maintenance des bâtiments au sein d’un collège de Bordeaux, a été révoqué par le président du conseil départemental de la Gironde par arrêté du 17 octobre 2017. Cette décision faisait suite à une procédure disciplinaire engagée à son encontre pour avoir exercé, sans autorisation, une activité commerciale d’animation de soirées musicales. M. A… avait contesté cette révocation devant le tribunal administratif de Bordeaux, qui avait rejeté sa demande par un jugement du 17 octobre 2019. La cour administrative d’appel de Bordeaux avait  d’abord annulé la décision de révocation, estimant la sanction disproportionnée, mais le Conseil d’Etat a rappelé à l’agent que « You Can’t Always Get What You Want », … sous peine de devoir tirer sa révérence sur l’air de « Sorry Seems to Be the Hardest Word ». 

Non-cumul et obligations des fonctionnaires : des règles strictes à respecter

Le Conseil d’État a rappelé que le fonctionnaire doit consacrer l’intégralité de son activité aux tâches qui lui sont confiées et ne peut exercer une activité privée lucrative sans autorisation. L’exercice d’une telle activité à titre accessoire constitue une dérogation à ce principe de non cumul (Article L121-3 du CGFP). En l’espèce, M. A… a tenté de faire carrière sur deux scènes en même temps, et en dépit d’une mise en demeure de cesser cette activité et d’un blâme qui lui avait été infligé, il « Résiste » ! 

Manquements graves : le Conseil d’État tranche

Le Conseil d’État a estimé que la cour administrative d’appel a commis une erreur en jugeant que les faits reprochés à M. A… n’avaient pas gravement mis en cause l’intérêt ou la dignité du service. Pour le Conseil, ce DJ d’un autre genre avait choisi de « faire un bébé tout seul » en continuant son activité commerciale non autorisée, malgré les avertissements répétés et une sanction antérieure, constituant ainsi une violation manifeste des obligations statutaires de l’agent et des règles relatives au cumul d’activités. Le Conseil d’État a jugé que les manquements de M. A… étaient d’une gravité telle que toute sanction moins sévère que la révocation aurait été insuffisante. 

La révocation : une sanction proportionnée

Le Conseil d’État a également écarté les arguments de M. A… selon lesquels la sanction de révocation violait le principe de « non bis in idem » (interdiction de sanctionner deux fois les mêmes faits). La haute juridiction a considéré que la révocation ne portait pas sur les faits ayant justifié le blâme infligé en janvier 2017, mais sur la persistance de l’activité commerciale après cette première sanction. 

Une leçon de rigueur pour les fonctionnaires

En annulant l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux, le Conseil d’État a rétabli la décision de révocation de M. A… et a confirmé le respect strict du principe de cumul d’activités par les agents publics. La décision souligne l’importance de la proportionnalité des sanctions disciplinaires au regard des manquements reprochés. Elle rappelle également que l’autorité hiérarchique dispose d’un pouvoir d’appréciation pour autoriser ou refuser l’exercice d’activités accessoires, et que tout manquement grave à cette réglementation peut justifier une révocation.

Moralité : rester dans le bon tempo avec son employeur

Entre les platines et l’administration, M. A… aura tenté de jongler, mais le Conseil d’État a tranché : pas question de passer du bureau au dancefloor sans respecter les règles. Pour notre DJ fonctionnaire, c’est la fin d’une tournée qui aura coûté bien plus cher qu’un simple rappel à l’ordre. Moralité ? Que l’on mixe des dossiers ou des disques, il vaut mieux toujours garder le bon tempo avec son employeur… sous peine de finir sa carrière en silence !

Conseil d’État, 3ème chambre, 10 juillet 2024, n° 466526

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