Partager la publication "La question du report des heures déficitaires et excédentaires de l’agent d’une année à l’autre"
Aménagement et annualisation du temps de travail
Il ressort de ces dispositions que le temps de travail effectué dans les établissements relevant des trois versants est envisagé sur la base d’une limite annuelle.
Les dispositions réglementaires applicables ont même entendu permettre aux administrations d’aménager le temps de travail de leurs agents, à la fois pour emplir cette exigence, tout en conservant une certaine souplesse d’organisation.
Dans le versant hospitalier de la fonction publique, si les cycles de travail ne peuvent pas dépasser 12 semaines, il est désormais envisageable, par dérogation et par accord collectif, d’annualiser le temps de travail pour « s’ajuster aux variations de l’activité tout au long de l’année civile ».
Difficultés pratiques et jurisprudence
Dans la pratique, et en dépit de ce tout dernier dispositif introduit récemment, il est difficile de respecter ce principe, notamment en raison des difficultés liées au manque d’attractivité de certaines professions, qui engendre un important sous-effectif au sein des services et, partant, un recours accru à certains agents, qui cumulent, d’année en année, de nombreuses heures.
C’est pourquoi le juge administratif accepte, dans le cadre de la réglementation, que certains agents conservent le bénéfice des heures effectuées. Dans une certaine limite.
Décisions de justice sur le report des heures
En effet, il avait déjà pu confirmer le report du reliquat des heures d’agents, d’une année à l’autre, que des heures de récupération au titre des droits à réduction du temps de travail (RTT), des heures supplémentaires et des heures dues au titre des repos aménagés, aucun texte ne précisant que le report dans le temps de ces dispositifs serait prohibé.
Cour administrative d’appel de Bordeaux, 12 mai 2020, n° 19BX00794
Le juge administratif sanctionne toutefois la compensation entre heures positives et congés non pris. En l’espèce, l’agent avait effectué 1 490 heures en lieu et place des 1 582 heures réglementaires. L’établissement avait alors reporté l’exécution des 92 heures restant dues sur l’année suivant, au cours de laquelle il avait effectué 1 686 heures. Il en résultait un excédent de 104 heures, que l’établissement avait retranché des congés non pris par l’agent.
Tribunal administratif de Dijon, 25 mars 2010, n° 0700960
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- Distinguer dans la réglementation sur le temps de travail ce qui est négociable et adaptable localement de ce qui ne l’est pas.
- Mettre en œuvre les différentes obligations annuelles de travail : repos fixes, variables, travail de nuit, alternant jour/nuit.
- Choisir le cycle de travail le plus adapté pour optimiser l’organisation du travail.
- Mettre en œuvre les congés annuels et autorisations spéciales d’absences.
- Évaluer l’impact sur le temps de travail et sur les organisations des absences pour maladie.
Confirmation et application de la réglementation
De la même façon, la Cour administrative d’appel de Lyon avait eu l’occasion de confirmer cette position : bien que l’employeur public dispose de la faculté d’indemniser les jours non pris ou de les verser sur le régime additionnel de retraite, aucune disposition ne prévoit de défalquer du compte épargne temps de l’agent, les heures qu’il n’a pas réalisées.
Cour administrative d’appel de Lyon, 15 avril 2021, n° 20LY03360
C’est à nouveau ce que vient rappeler le juge administratif par une décision en date du 26 février 2024, rappelant l’application de la réglementation précitée et de manière subséquente, l’absence de porosité d’année en année des compteurs des agents.
Conseil d’État, 26 février 2024, n° 453669
Dans cet arrêt de principe, le Conseil d’État reprécise que si l’autorité compétente peu prévoir des reports infra-annuels de déficits ou d’excédents horaires entre cycles, la réglementation fait obstacle à ce que l’écart constaté entre les service annuel horaire effectué par un agent et le volume annuel de travail auquel il est soumis puisse avoir pour effet de modifier, par report, ses obligations horaires de l’année suivante.
En l’espèce, l’employeur avait modifié les dispositions de son guide du temps de travail, en prévoyant la possibilité, avec l’accord de l’agent, de défalquer de son compte épargne-temps, l’écart négatif constaté au terme de l’année ou de reporter ce même écart sur les obligations horaires de l’année suivante.
Par ce nouvel arrêt de principe, le juge administratif continue à construire sa jurisprudence à l’égard du report des déficits ou des excédents horaires d’année en année, confirmant, cette fois, en cassation, l’application stricte de la réglementation : pas de compensation du déficit horaire de l’agent sur l’obligation annuelle de l’année suivante.
Il incombe, dans ces circonstances, à l’administration d’envisager une compensation infra-annuelle, au risque de ne pouvoir requérir de l’agent l’accomplissement des heures non effectuées.