L’intéressement : fonctionnement
L’intéressement permet de bâtir un dispositif de partage en fonction de l’atteinte d’objectifs mesurés par des indicateurs adaptés à la situation de l’entreprise. Contrairement à la participation, le choix de la formule est en effet libre. L’intéressement est le plus ancien des dispositifs d’épargne salariale puisqu’il existe depuis 1959.
Selon l’article L3312-2 du Code du travail, l’intéressement doit présenter un caractère aléatoire et résulter d’une formule de calcul liée aux résultats et performances de l’entreprise.
Ce dispositif peut répondre parfaitement au besoin de partage de la valeur avec les salariés.
En revanche, les possibilités innombrables pour la fixation des critères et des formules peuvent rendre complexe sa négociation dans le cadre d’un accord d’entreprise.
En effet, des objectifs trop complexes à atteindre peuvent conduire à une absence de versement. Il appartient ainsi aux délégués syndicaux et à l’employeur de s’entendre sur des niveaux de seuils à adapter à la situation économique de l’entreprise.
Les accords d’intéressement peuvent être conclus pour une période comprise entre 1 an et 5 ans.
Un dispositif encouragé
La loi Pacte du 22 mai 2019 a rendu le dispositif d’intéressement plus favorable. Ainsi, les entreprises de moins de 250 salariés sont exonérées de forfait social sur les primes d’intéressement versées.
Le décret n°2023-98 du 14 février 2023 simplifie en outre la mise en place des accords d’intéressement dans les entreprises de moins de 50 salariés. La démarche de construction et de dépôt d’un accord peut s’effectuer entièrement en ligne à partir du site : https://www.mon-interessement.urssaf.fr/.
Enfin, on rappelle que la loi du 16 août 2022 permet aux employeurs de moins de 50 salariés de mettre en place l’intéressement de manière unilatérale.
La solution simple prônée par l’URSSAF
Le site de l’URSSAF préconise 2 solutions extrêmement simples sur le site https://www.mon-interessement.urssaf.fr/ (page : je choisis une formule) :
- Soit en fonction de la progression du chiffre d’affaires
- En fonction du palier de résultat courant avant impôt atteint (RCAI).
Ce sont 2 visions qui s’opposent : la performance de l’entreprise est avant tout due à la progression des ventes vs la performance de l’entreprise est avant tout due au montant des bénéfices.
En fonction de la progression du CA
La première formule relative à la progression du CA prévoit que selon le taux de hausse du CA entre N et N-1, l’intéressement global est égal à un pourcentage de la masse salarial.
L’entreprise comprend 600 salariés.
Exemple : Une entreprise réalise un chiffre d’affaires de 10 millions en N. L’accord d’intéressement prévoit :
Avec un CA de 10,5 millions €, la société voit son CA progresser de 5 %. Le palier 1 est atteint (3 %), mais pas le palier 2 (6 %). |
En fonction du résultat courant avant impôts (RCAI)
Le site de l’URSSAF propose également une formule basée sur la projection du résultat courant avant impôts (RCAI).
Le RCAI est égal au résultat de l’exercice avant intégration du résultat exceptionnel et avant déduction de la participation des salariés aux résultats et de l’impôt sur les sociétés.
Avec la formule proposée par l’URSSAF, le montant global de l’intéressement est calculé proportionnellement à des paliers de RCAI atteints.
Exemple : Une entreprise fixe la formule d’intéressement suivante :
La prime peut également être directement fixée en euros plutôt qu’en pourcentage. Si le RCAI atteint 1.800.000 €, la prime d’intéressement doit atteindre 2 % x 1.800.000 = 36.000 € soit 360 € par collaborateur. |
Les autres indicateurs financiers à prendre en compte
Les solutions prônées par l’URSSAF ont le mérite d’être simples. Mais le chiffre d’affaires ne prend pas en compte la rentabilité. Il est seulement intéressant si les taux de marge dans le secteur sont extrêmement standards.
Le résultat courant avant impôt prend en compte la rentabilité. Il est simple à trouver dans les états financiers, et notamment dans la liasse fiscale, mais il intègre l’effort d’investissement de la société à travers les dotations aux amortissements et le coût du financement (intérêts d’emprunts) à travers la déduction des charges financières.
Sur ces 2 charges, les salariés de l’entreprise ne peuvent intervenir en termes de performance. Pour éviter cet écueil, on peut notamment utiliser l’EBITDA (ou EBE en Français). De manière simplifiée, il correspond au chiffre d’affaires moins les achats et services extérieurs, les impôts et taxes et les charges de personnel.
Depuis plusieurs décennies, au niveau financier, la génération de cash-flow (de flux de trésorerie) devient un enjeu essentiel. L’EBTIDA et le RCAI ne tiennent pas compte des délais de paiement des clients et fournisseurs.
Pour aller dans ce sens, il faut déduire la variation du BFR (besoin en fonds de roulement). On obtient alors l’operating cash-flow.
Les formules préconisées par les accords de branche
Un accord d’intéressement de branche est un accord négocié directement au niveau d’une branche professionnelle. La loi PACTE a en effet imposé aux branches professionnelles de négocier un régime de participation et d’intéressement avant le 31 décembre 2020 (sans obligation d’aboutir à un accord).
Chaque entreprise est évidemment libre d’élaborer et de négocier un accord d’intéressement en interne. L’utilisation des formules prévues dans l’accord de branche professionnelle (s’il existe) et adaptées au secteur d’activité, permet de faciliter la mise en place de l’accord d’intéressement, notamment dans les PME de moins de 50 salariés.
Convention collective (branche) |
Seuil de déclenchement |
Formule de calcul de l’intéressement |
Banques |
Résultat net comptable > 0 |
Le montant global de l’intéressement est égal à :
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Commerce et réparation des tracteurs et matériels agricoles |
Résultat d’exploitation > 1 % du chiffre d’affaires HT |
Intéressement global = 5 % du résultat d’exploitation |
Négoce de l’ameublement |
Résultat d’exploitation > 0 |
Si la progression du CA HT est + 8 % entre N et N-1 : Intéressement = 1,5 % de la masse salariale brute. |
Animation |
2 conditions cumulatives :
|
Intéressement = 25 % du résultat net comptable |
Source : https://www.economie.gouv.fr/accords-branche-linteressement-entreprises#
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INTÉRESSEMENT, PARTICIPATION ET PLANS D’ÉPARGNE SALARIALE
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- Mettre en place ou réviser les systèmes d’épargne salariale dans son entreprise.
- Intégrer les dernières modifications issues de la loi Pacte.
- Intégrer l’épargne salariale dans la négociation des politiques de rémunération pour la développer.
- Optimiser son coût salarial en bénéficiant des exonérations sociales et fiscales attachées aux dispositifs.
- Intégrer les notions de gestion financière associées aux dispositifs.
Le développement des indicateurs non-financiers
Les indicateurs financiers ne sont qu’un élément de la performance d’une entreprise.
La qualité, le respect des délais et de la politique RSE constituent les autres facteurs de performance. La définition même de l’intéressement permet ainsi aux entreprises de conditionner le déclenchement du versement de primes à l’atteinte de ces objectifs, et notamment, un taux d’accident du travail faible, un nombre de produits retournés limités, etc.
À ce titre, la convention collective nationale des exploitations frigorifiques préconise d’utiliser les critères suivants pour les seuils de déclenchement de l’intéressement.
Sécurité : – réduction du nombre d’AT avec ou sans arrêt ou du taux de fréquence ; – source : déclaration entreprise (registre des accidents ou logiciel de paie).
Qualité de la prestation : – (litiges clients + coût écart de stock) × 100/ CA net ; – source = factures clients.
Amélioration du présentéisme collectif : – nombre d’heures d’absences (maladie, accidents et absences non justifiées) appréciés par rapport au nombre d’heures payées (forfait jour = 7 heures) ; – source : logiciel de paie.
Préservation de l’outil de travail (engins de manutention, bâtiment, autres …) : – diminution du coût de réparation du site (hors groupes frigorifiques) ; – source : comptabilité analytique.
Efficacité opérationnelle : – nombre d’unités d’œuvre manutentionnées/ nombre d’heures travaillées ; – source : logiciel gestion des temps et logiciel gestion des stocks.
Source : Avenant n° 91 du 12 juin 2020 à l’accord du 21 février 2019 relatif à l’intéressement