Télétravail : quels retours 2 ans après sa mise en oeuvre ?

Plus de deux ans après l’institution du télétravail dans les organisations du travail, celui-ci fait toujours l’objet de débats parfois animés. Quand d’aucuns le plébiscitent, d’autres s’y opposent encore fortement, tous avec des arguments plus convaincants les uns que les autres.

Cet article a été publié il y a 2 ans, 1 mois.
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Télétravailler en 2022 : Retour d'expérience après plus de 2 ans de télétravail : Toujours des avantages mais aussi de nouveaux risques
Quelles conclusions 2 ans après la généralisation du télétravail en entreprise ?

Des avantages certains

Le télétravail n’est plus une option. Les jeunes en font même, un critère de recrutement, dans un contexte de pénurie des talents.

De leur côté, les entreprises repensent leur organisation du travail en transformant les bureaux en open space, en Flex office, réalisant au passage de substantielles économies. En matière de production ou de performance, tous s’accordent à dire qu’elle est au moins égale en télétravail qu’en présentiel, par la possibilité offerte aux collaborateurs, de mieux se concentrer notamment par la réduction des interactions sociales.

Mais, le premier avantage est probablement le gain de temps réalisé par l’élimination d’une partie des trajets domicile-travail, adossé à des gains économiques induits par la réduction de ces déplacements. Le télétravail contribue également à une baisse de la fatigue physique et à la diminution du stress en permettant une meilleure conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle.

Enfin, le télétravail contribue à la diminution de la pollution par une utilisation moindre de son véhicule.

Mais aussi des risques dont il faut savoir se prémunir

Néanmoins, derrière cette image idyllique, on peut constater l’émergence d’un « ras-le-bol » de plus en plus de collaborateurs ainsi qu’une fatigue physique qui s’installe dans le temps. Alors que le télétravail devrait être bénéfique en nous permettant de limiter nos temps de trajet, cette forme de travail envahit parfois trop notre sphère personnelle. La raison en est souvent un droit à la déconnexion encore peu ou mal appliqué.

Pourtant, pour que le télétravail soit gagnant/gagnant pour le salarié comme pour l’entreprise, il est important de savoir s’arrêter. Des petits rituels tels que « fermer et ranger son ordinateur » afin qu’il ne nous happe pas au passage, s’obliger à « sortir du travail » en s’adonnant à une activité sportive, culturelle, aller voir un ou une amie est un moyen de stopper un travail qui peut devenir excessif.

Lorsque nous sommes au bureau, prendre le métro, son vélo, sa voiture ou encore rentrer à pied, rythme notre journée de travail et nous oblige à arrêter.

Il est important de recréer cette coupure symbolique chez soi afin d’éviter une surcharge cognitive importante. Réaffirmer un vrai droit à la déconnexion permet de prévenir un risque d’épuisement.

Les réunions et évènements en ligne (vidéoconférences, webinaires…) se multiplient depuis le premier confinement. Si initialement, ces échanges avaient pour objectif louable de conserver un lien social alors que nous étions pour la plupart d’entre nous, confinés à domicile, aujourd’hui ces réunions et évènements en ligne présentent quelques risques.

Car lorsqu’ils sont trop nombreux, ils peuvent donner lieu à une fatigue générale importante, visuelle, sociale, émotionnelle et aussi motivationnelle. Une étude américaine par des chercheurs de Stanford a mis en évidence des facteurs de « zoom fatigue ». Le premier facteur est le nombre très (trop) important de contacts visuels souvent très rapprochés qui peuvent nous épuiser.  Lorsque nous conversons par écran interposé, notre attention est centrée sur le visage de notre interlocuteur, alors qu’en réunion présentielle, notre attention va se décentrer (prise de notes, regard vers la fenêtre, vers un collègue), ce qui nous évite cette trop grande charge attentionnelle. Le fait de se voir dans l’écran durant tout le temps d’une réunion en Visio n’est pas naturel, peut même devenir stressant. Corollaire de ces longues réunions en visioconférence, un boom du recours à la chirurgie esthétique, ces derniers mois. Voir trop longtemps et trop souvent nos défauts nous inciterait à avoir recours à la chirurgie esthétique. Si c’est possible, accordez-vous une pause visuelle (en coupant votre caméra quelques minutes) lors des réunions.

De plus, les réunions en Visio réduiraient notre capacité à innover, notre créativité, en raison d’une trop grande concentration demandée par ces réunions. Lorsqu’une réunion en présentiel permet de promener notre regard sur l’environnement qui nous entoure, utile pour nous divertir, l’écran happe complètement notre attention. Le divertissement serait la particule élémentaire de la créativité. il serait souhaitable de reconsidérer les réunions. Les faire en présentiel quand c’est possible, sinon les réduire afin de ne pas altérer notre capacité de concentration et de créativité. En un mot, les réinventer.

Un autre risque apparu après quelques mois de télétravail provient de l’éloignement géographique du télétravailleur avec son entreprise qui peut provoquer une perte de motivation. En nous éloignant de nos collègues, la distance peut faire évoluer notre rapport à l’autre et notre attachement à l’entreprise.

La mise à distance du travail peut, petit à petit, nous éloigner de celui-ci. Tout comme l’absence de signes non verbaux reste un frein à une bonne communication et collaboration, l’éloignement de notre lieu de travail peut être un frein à la productivité, à la qualité du travail. Une qualité du travail qui passe par la reconnaissance de nos collègues. La reconnaissance au travail se joue à plusieurs. Elle recouvre toutes les attentions que nous portent nos responsables hiérarchiques mais aussi nos collègues, ce qui est un excellent moyen de renforcer son estime de soi.

Se sentir motivé et engagé va de pair avec des retours et le soutien régulier de l’équipe. On entend beaucoup de salariés dire « j’ai envie de retrouver les collègues », « j’ai besoin du collectif ». Par ailleurs, Il est admis qu’un salarié motivé est un salarié performant. Pour se protéger des effets délétères d’un télétravail intensif, il est souhaitable de veiller à la cohésion d’équipe et à l’implication du salarié même à distance.

Un autre risque trouve ses origines dans une communication complexifiée en télétravail, notamment quand celui-ci s’intensifie. Cette communication médiée peut voir l’émergence ou une recrudescence des conflits interpersonnels, des incivilités numériques particulièrement, une augmentation de l’agressivité notamment entre collègues.

Si avec le recul, on constate qu’une équipe qui fonctionne bien en distanciel est souvent une équipe qui fonctionnait déjà très bien en présentiel, force est de constater qu’après plus de deux ans de télétravail, les conflits, les incivilités en télétravail se sont multipliées. Que ce soit entre collègues ou avec son responsable hiérarchique, mais aussi avec les clients, les fournisseurs.

Des collaborateurs notent une exacerbation des tensions, des conflits et des incivilités en télétravail en raison d’échanges par mail ou par sms envoyés un peu rapidement peut être et qui peuvent être mal compris à leur réception.  Ces canaux de communication que sont les sms, les mails, les tchats ont pris une part importante avec l’essor du télétravail apportant parfois incompréhension, quiproquo, conflits.

L’absence de communication non-verbale nous empêche de voir les réactions de nos interlocuteurs à la réception d’un mail par exemple. Le non-verbal est important dans la communication car il témoigne de nos émotions. Les variations de notre voix, nos expressions faciales, notre posture corporelle teintent nos messages et envoient des informations très importantes à notre interlocuteur. Or nos échanges médiés ont pris de l’ampleur avec le télétravail – de nombreux collaborateurs en télétravail, affirment communiquer exclusivement par mail ou par sms – laissant la place à l’installation de conflits interpersonnels faisant ainsi le nid à une souffrance au travail.

Pour conclure sur ce sujet de cette communication distancielle, avez-vous remarqué, lorsque nous informons nos interlocuteurs que nous sommes en télétravail, que ceux-ci n’osent pas nous appeler (pourtant télétravail, ne signifie pas ne pas répondre au téléphone).

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1 jour – En présentiel ou à distance

  • Intégrer le cadre juridique du télétravail.
  • Définir les évolutions organisationnelles générées par le télétravail.
  • Construire des outils pertinents pour la mise en oeuvre du télétravail.
  • Préparer la procédure de mise en place ou de révision.

D’autres risques émergent avec le télétravail avec le développement d’addictions par exemple.  Quand le lieu de travail protège, par l’interdiction faite de fumer dans les espaces de travail par exemple, ou encore de consommer de l’alcool, aucune réglementation s’impose aux télétravailleurs quand ceux-ci sont à leur domicile. Les professionnels de la santé au travail mettent en garde devant l’augmentation importante de ces addictions telles que le tabac, l’alcool, la drogue ou encore le workaholisme (qui est une addiction au travail) en situation de télétravail. 

Enfin, un risque qui mérite toute notre attention est lié à l’intégration des nouveaux embauchés. En effet, les intégrations particulièrement délicates pendant les périodes de confinement ont laissé des traces chez ces nouveaux recrutés et montrent l’importance de l’accueil des nouveaux embauchés.

En effet, au-delà d’une période à l’issue de laquelle un nouveau salarié pourrait avoir accès au télétravail, le processus d’intégration mérite d’être repensé, notamment pour créer un sentiment d’appartenance à l’entreprise. Aujourd’hui, on peut constater qu’avec le télétravail (au-delà de 2 jours par semaine), ce sentiment d’appartenance s’est étiolé au détriment du lien d’appartenance à la famille qui lui s’est étoffé – ce qui est une excellente chose en soi. Mais le sentiment d’appartenance participe à la construction de notre identité. Il se construit dans le temps, par le partage avec nos collègues de mêmes valeurs, de mêmes objectifs. Pour une entreprise, il permet la réduction du turnover, un meilleur engagement des salariés, une meilleure fidélisation. Aujourd’hui, il peut être une réponse à ces difficultés de recrutement que rencontrent les entreprises ou pour parer cette « grande démission » dont nous entendons parler dans les médias. Donner envie aux nouveaux salariés de rester dans l’entreprise est un joli challenge.

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