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Partager la publication "Fonction publique : une note de service qui exige un lieu de télétravail permettant un retour sur site dans des délais compatibles avec un rappel par l’administration est-elle légale ?"
Si le télétravail connaît un développement inégal dans la fonction publique en dépit du cadre juridique institué par le décret n° 2016-151 du 11 février 2016, cette forme d’organisation du travail – imposée par la crise sanitaire dans nombre d’administrations – occupe depuis quelques mois une place de choix sur la scène juridique.
Fruit d’une négociation sur le fondement de l’ordonnance n° 2021-174 du 17 février 2021, un premier accord est signé à l’unanimité le 13 juillet 2021, bientôt suivi par l’engagement de négociations par les employeurs publics en vue d’en assurer sa déclinaison à l’automne dernier, alors que c’est au Conseil d’État qu’il est revenu cet été d’apporter des précisions quant à ses modalités.
Après avoir statué sur le droit au bénéfice de titres-restaurants des agents en télétravail, qu’il conditionne à l’absence de dispositif de restauration collective par une application combinée des articles 6 du décret du 11 février 2016 et 19 de l’ordonnance du 27 septembre 1967 relative à l’aménagement des conditions de travail en ce qui concerne le régime des conventions collectives, le travail des jeunes et les titres-restaurants (Conseil d’État, 7 juillet 2022, n° 457140), la Haute juridiction devait se prononcer sur la légalité d’une note de service qui exige d’un agent de choisir un lieu de télétravail permettant son retour sur site dans un délai compatible avec un rappel de l’administration (Conseil d’État, 5 août 2022, n° 457238).
Sur la légalité externe de la note de service, le Conseil d’État asserte qu’elle n’a ni pour objet ni pour effet de modifier les dispositions de l’arrêté du 2 août 2016 portant application au ministère du décret n° 2016-151 du 11 février 2016 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature. Le requérant n’est donc pas fondé à soutenir que le comité technique compétent aurait dû, en application du I de l’article 7 du décret du 11 février 2016, être préalablement consulté sur son contenu. Le moyen tiré du défaut de consultation du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) compétent doit de la même manière être écarté alors que la note de service se borne à préciser les modalités pratiques de mise en œuvre du télétravail, ne constituant dès lors pas un projet d’aménagement important sur lequel le CHSCT aurait dû être préalablement consulté.
Quant à la légalité interne, le Conseil d’État affirme en premier lieu que la note de service qui énonce : « la décision d’accorder ou non l’autorisation de télétravail tient compte de la nature et des caractéristiques de l’activité du demandeur, des orientations collectives régissant la communauté de travail, de l’efficacité et de la cohésion de l’organisation du travail et des équipes et des nécessités de service. L’autorisation accordée peut être plus circonscrite que la demande de l’agent » se borne à expliciter la condition de compatibilité du télétravail avec l’intérêt du service, conformément à l’article 5 du décret du 11 février 2016, et n’ajoute pas de condition supplémentaire à l’autorisation de télétravail. Elle n’a en outre ni pour objet ni pour effet de dispenser de l’examen de la situation individuelle de chaque agent concerné, ni encore de restreindre les possibilités de télétravail et ne compromet donc la cohérence et l’efficacité des mesures de lutte contre la propagation de l’épidémie de Covid-19 décidées par l’État.
Visant ensemble les articles 25 septies I et 28 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires alors en vigueur, l’article 2 du décret du 11 février 2016 et 3 de l’arrêté du 2 août 2016 en portant application, le Conseil d’État décide par ailleurs qu’en énonçant : « l’agent doit déclarer le lieu d’exercice de son télétravail. Ce lieu doit permettre un retour sur site dans des délais compatibles avec un éventuel rappel sur site par l’administration, qui peut intervenir à tout moment en cas de nécessité de service », la note attaquée se borne à expliciter une exigence s’imposant à tout agent autorisé à télétravailler pour respecter ses obligations de service, en particulier lorsqu’en application de l’article 6 de l’arrêté ministériel, une nécessité de service impose de reporter un jour télétravaillé.
La note n’imposant donc pas illégalement une obligation de résidence, le moyen tiré de ce qu’elle méconnaîtrait l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales [Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance] ne peut, pour les mêmes motifs, qu’être écarté.
Pour le Conseil enfin, les dispositions de la note de service relatives à l’instruction de la demande d’autorisation de télétravail et au lieu d’exercice du télétravail ne sont pas équivoques et ne méconnaissent pas, en tout état de cause, l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la norme.
La requête de l’agent aux fins d’annulation pour excès de pouvoir de la note de service est, par suite, rejetée.