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Qu’est ce que le droit de retrait ?
Exercer son droit de retrait, c’est quitter son poste ou refuser de s’y installer sans l’accord de son employeur au motif que la situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, qu’il soit physique ou mental.
Juridiquement, le droit de retrait est très encadré. Le Code du travail y consacre son article L4131-1, et dispose ainsi : « Le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection.
Il peut se retirer d’une telle situation.
L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection ».
Dans quelle situation un salarié peut-il exercer son droit de retrait ?
Le Code du travail est très clair à ce sujet, face à une situation dangereuse, un salarié peut refuser de travailler.
Mais attention, l’article du Code du travail visé ci-dessus, ajoute que le salarié doit avoir une croyance raisonnable en un danger grave et imminent. Il s’agit d’une condition cumulative.
Toutefois, c’est la jurisprudence qui va définir cette notion de « danger grave et imminent », le code est en effet muet sur ce point. La notion de « danger grave et imminent » est laissée à la libre appréciation de chacun.
Aussi, en cas de litige avec l’employeur, c’est au juge qu’il appartiendra d’apprécier si le salarié s’est trouvé dans une situation de dangerosité certaine, danger physique ou moral. C’est ce qu’indique la Cour de cassation dans un arrêt rendu par la Chambre sociale le 28 novembre 2000 (pourvoi n° 98-45.048) en ces termes « si le salarié justifiait d’un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie et sa santé ».
L’évaluation de la gravité : là, est tout l’enjeu.
Pour être tout à fait clair, le danger doit revêtir une importance telle qu’il porte atteinte rapidement ou sans délai à la vie ou à la santé du salarié. Le danger soulevé par le salarié ne doit pas être un simple risque lié aux conditions de travail.
Focus : Différence entre droit de retrait et droit de grève
En effet, la Cour de cassation dans un arrêt du 26 septembre 1990 (pourvoi n° 88-41.375), a énoncé le principe suivant : « constitue l’exercice du droit de grève et non du droit de retrait, l’arrêt de travail décidé par des salariés qui, après avoir refusé d’exécuter un ordre dangereux pour leur santé et leur vie, ont présenté une revendication professionnelle en demandant le bénéfice de la position chômage intempéries ».
Quelques exemples :
Droit de retrait légitime |
Droit de retrait illégitimes |
Bureau placé sous une dalle de plafond qui menace de s’effondrer |
Travailler dans un niveau sonore très élevé |
Employeur qui envoie en mission dans une zone à risques (zone de guerre par ex.) |
Travail répétitif pouvant engendrer une maladie du dos |
Salarié voulant exercer son droit de retrait : comment doit-il s’y prendre ?
Aucun formalisme prescrit par la loi en la matière !
Il incombe seulement au salarié d’informer l’employeur du danger constaté, sans délai, de façon concomitante à son retrait. Il peut le faire, par voie écrite, ou même oralement.
Le Code du travail en son article L4132-1 fixe seulement la règle suivante : le droit de retrait ouvert au salarié est exercé de « de telle manière qu’il ne puisse créer pour autrui une nouvelle situation de risque grave et imminent ». En effet, il serait impensable que le retrait du salarié n’entraîne un danger surabondant pour ses collègues.
Exemple jurisprudentiel :
Ainsi, l’abandon de poste sans autorisation, faisant courir un risque d’accident à un autre salarié,
constitue une faute grave, dès lors que l’intéressé connaissait le caractère impératif de la consigne de sécurité qui exigeait la présence simultanée de deux personnes sur la machine (Cass. soc., 15 avr. 1983, inédit).
Il convient de noter que le droit de retrait peut s’exercer en concertation avec ses collègues. Il peut donc être collectif. Toutefois, il faut ajouter que dans pareille situation, chaque salarié devra informer l’employeur à titre individuel.
Autrement dit, le salarié se mettant en retrait de la situation de travail l’exposant à un danger grave et imminent pour sa vie ou pour sa santé devra justifier à titre individuel d’un motif raisonnable.
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L’ESSENTIEL DU DROIT DU TRAVAIL
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Les conséquences du droit de retrait
Le droit de retrait n’est pas sans entraîner des conséquences que ce soit pour le salarié ou pour l’employeur.
Les conséquences du droit de retrait pour le salarié
Le Code du travail est très explicite sur ce sujet malgré la formulation employée.
En effet, l’article L.4131-3 précise : « Aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un travailleur ou d’un groupe de travailleurs qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d’eux ».
Aucune sanction ne peut donc être prise à l’encontre d’un salarié qui aurait a priori exercé son droit de retrait dans l’hypothèse où sa démarche serait jugée légitime par les juges (notion de danger grave et imminent).
Par conséquent :
- Ou bien l’exercice du droit de retrait est fondé et le dispositif légal s’applique, à savoir que l’employeur ne pourra pas sanctionner l’employé, ni effectuer de retenue sur son salaire.
- Ou bien l’exercice du droit de retrait n’est pas fondé et l’employeur pourra sanctionner le salarié. Une retenue sur salaire pourra alors être effectuée.
Les conséquences du droit de retrait pour l’employeur
Le principal écueil auquel pourrait faire face l’employeur est celui de ne pas prendre suffisamment au sérieux les avertissements et alertes délivrés par le salarié ou par les salariés.
Dans de telles circonstances, l’employeur doit tout mettre en œuvre afin de permettre au salarié de reprendre le travail en toute sécurité. Si ce dernier vient à être victime d’un accident à cause d’un risque signalé et non pris en compte, l’entreprise peut être condamnée pour faute inexcusable. Dans ce cas, le salarié aura droit à des indemnités majorées et à une rente d’accident du travail.
Aussi, il est pour lui impératif de respecter la procédure définie par le Code du travail en matière de danger grave et imminent, décomposée ci-dessous :
Information et consignation par écrit
Le représentant du personnel au CSE doit immédiatement informer l’employeur et consigner cet avis par écrit sur le registre des dangers graves et imminents.
Le signalement du danger grave et imminent, daté et signé doit revêtir a minima, les informations suivantes :
- Poste(s) de travail concerné(s).
- Nature du danger et de sa cause.
- Nom du ou des salariés exposés.
Ce registre est tenu, sous la responsabilité de l’employeur, à la disposition des membres du CSE.
Une enquête réalisée de façon conjointe
L’employeur réalisera, en général sous 48 heures, une enquête conjointement avec le représentant du personnel au CSE qui l’a avisé de ce « dysfonctionnement ». Le but : prendre toutes les dispositions nécessaires afin de faire cesser le trouble.
Cette enquête doit permettre d’y voir plus clair et de trouver des solutions afin de remédier à la situation de danger grave et imminent.
On examinera ainsi les lieux de travail siègent de la situation de danger grave et imminent, on interrogera les salariés, et en cas d’accord sur la réalité du danger, il conviendra de prendre toutes les mesures pour y remédier sans délai.
En cas de désaccord sur la réalité du danger et la façon de le faire cesser, le CSE aura la possibilité de faire appel à l’inspection du travail et au service de prévention de la CARSAT.
Une réunion d’urgence se tiendra alors, réunissant l’employeur, le CSE, l’inspection du travail et la CARSAT. En cas de désaccord persistant, l’employeur saisira officiellement l’inspection du travail.
L’inspection du travail pourra :
- Adresser au chef d’établissement une mise en demeure de remédier à la situation, dans un délai fixé par le directeur départemental du travail et de l’emploi. Dès lors que la situation dangereuse n’a pas cessé à l’expiration de ce délai, l’agent de contrôle de l’inspection du travail peut alors dresser un procès-verbal à l’employeur.
- Ordonner toutes les mesures propres à faire cesser le risque.
- Saisir le président du tribunal de grande instance, statuant en référé (c’est-à-dire en urgence).