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Partager la publication "La santé, la sécurité et le Comité Social et Économique (CSE) : impact de la loi du 2 août 2021"
Il ne s’agit pas d’une première réforme sur le sujet ; en effet, depuis de nombreuses années, le législateur rappelle régulièrement l’importance de la santé et de la sécurité, notamment au prisme de la prévention. A ce titre, la loi n°2021-1018 du 2 août 2021 transpose l’ANI (accord national interprofessionnel) du 10 décembre 2020, visant à renforcer la prévention en matière de santé au travail et à moderniser les services de prévention et de santé au travail.
Cette réforme est donc la continuité d’un processus législatif impactant les obligations de l’employeur et les représentants du personnel mais aussi la médecine du travail.
Quelles sont les nouveautés pour les salariés en termes de prévention ?
Avant tout, l’ensemble des salariés bénéficiera d’une visite médicale de mi-carrière. Ainsi, un nouvel article est prévu, l’article L 4624-2-2 du Code du travail (version au 31 mars 2022). A la lecture de ce futur article du Code du travail, les salariés pourront être « examinés par le médecin du travail au cours d’une visite médicale de mi-carrière organisée à une échéance déterminée par accord de branche ou, à défaut, durant l’année civile du quarante-cinquième anniversaire du travailleur ». L’objectif est ainsi de privilégier la santé au travail en vérifiant que l’état de santé du salarié lui permet de tenir le poste de travail mais aussi en analysant les risques de désinsertion professionnelle et enfin en sensibilisant le salarié sur les risques liés au vieillissement au travail.
En outre, les salariés pourront bénéficier d’un accompagnement pour lutter contre le risque de désinsertion professionnelle et notamment lorsqu’ils auront été absents sur une longue période, en raison d’une maladie, accident et même maternité. L’employeur pourra alors prévoir un entretien avec le salarié en y associant la médecine du travail. L’objectif est alors de proposer un accompagnement rapide dès que les premiers signes de fragilité pourraient entrainer une désinsertion professionnelle.
Ces dispositions visent aussi les publics vulnérables ou en situation de handicap. Une nouvelle cellule pluridisciplinaire de prévention de la désinsertion professionnelle devra alors être prévue au sein des services de préventions. Ces cellules auront de multiples missions en termes de prévention mais aussi d’accompagnement (version au 31 mars 2022 : nouvel article L4622-8-1 du Code du travail).
Comment devra s’organiser la médecine du travail ?
La médecine du travail est présentée depuis plusieurs années comme un organe principalement de prévention et d’accompagnement pour faire face aux risques.
La loi Rebsamen (Loi n° 2015-994 du 17 août 2015) par exemple, prévoyait déjà un renforcement du rôle de la médecine du travail en prévention et notamment l’obligation de l’employeur ou du salarié d’informer l’autre partie de son recours face à la décision de la médecine du travail. Pour affirmer cette orientation, la dénomination même de la médecine du travail évolue. En effet, les services de santé et sécurité au travail seront appelés les « services de prévention et de santé au travail » (SPST) – appuyant alors sur les missions préventives de l’organe.
Ainsi, les missions des centres de prévention et de santé au travail sont élargies et comprennent en plus du suivi des travailleurs des missions de prévention et de conseils. L’article L4622-2 du code du travail est totalement remodelé (version au 31 mars 2022) et indique les domaines à développer, comme l’accompagnement des employeurs, des travailleurs et de leurs représentants dans l’analyse de l’impact sur les conditions de santé et de sécurité des travailleurs de changements organisationnels importants dans l’entreprise
Pour acter ces transformations, la gouvernance des services de santé et de prévention au travail est réaménagée et le conseil d’administration de chacune sera composé, en sus des représentants des employeurs et des salariés habituellement présents, des organisations représentatives au niveau national et interprofessionnel, voire aussi de branche.
En outre, des partenariats devraient se nouer de plus en plus avec la médecine de ville. Et, un médecin praticien correspondant (en contrat de collaboration avec les services de santé et de prévention), disposant d’une formation en médecine du travail, peut contribuer, en lien avec le médecin du travail, au suivi médical du travailleur. Son action a ses limites et par exemple, il ne peut réaliser de suivi médical renforcé. De plus, il ne peut cumuler sa fonction avec celle de médecin traitant. Et afin de rendre les liaisons entre la médecine de ville et la médecine du travail plus ténue, il est prévu que dans trois régions et à titre expérimental, les médecins du travail puissent par exemple prescrire et renouveler un arrêt de travail ou encore prescrire des soins et examens…
Dans cette lignée, le médecin du travail pourra aussi accéder au dossier médical partagé de chaque salarié et possédera la possibilité de le remplir, sous réserve que le salarié ait donné son accord.
Enfin, les infirmiers se voient attribuer une section entière dans cette réforme et on leur reconnait un véritable statut au sien de la médecine du travail. Leurs missions sont étendues et il est indiqué dans le futur article L4623-9 du Code du travail qu’ils peuvent assurer « les missions qui lui sont dévolues par le présent code [Code du travail] ou déléguées par le médecin du travail… »
Quel sera le rôle des représentants du personnel dans le domaine de la santé/ sécurité ?
Le Comité social et économique (CSE) voit son rôle précisé dans le domaine de la prévention, notamment au niveau du document unique de sécurité ou document d’évaluation des risques professionnels.
Jusqu’alors, ce document obligatoire dans toutes les entreprises comptant au moins 1 salarié, n’était pas réellement un sujet de dialogue social. Il devait être maintenu à disposition des élus pour lecture mais il ne faisait pas l’objet d’une information/ consultation. Les pratiques étaient donc variées et dans certaines entreprises, il était un sujet d’échanges, notamment lors de rencontre avec la CSSCT (commission santé/ sécurité et conditions de travail, obligatoire dans les entreprises de plus de 300 salariés). Mais, dans d’autres, il était gardé au service des ressources humaines et les élus qui souhaitaient le consulter devaient alors procéder sur place. Les pratiques n’étaient donc pas uniformes (voire sur le sujet la position du Tribunal judiciaire de Lyon, ordonnance de référé du 22 juin 2020)
Aux termes des articles L. 4121-2 et R. 4121-1 et suivants du Code du travail, ce document unique de sécurité recense l’ensemble des risques existants dans l’entreprise. Ceux-ci y sont hiérarchisés et un plan d’action est proposé pour en limiter leurs portées. Ce document doit être mis à jour par l’employeur au moins chaque année afin de refléter la réalité vécue par les salariés.
Il fait l’objet de nouvelles dispositions dans la loi du 2 août 2021. Le futur article L4121-3-1 du Code du travail (version à venir au 31 mars 2022) indique que ce document unique comprend dans les entreprises de plus de 50 salariés le programme annuel de prévention des risques professionnels (comprenant la liste des actions à mener, les ressources associées, et le calendrier de mise en œuvre). Et, nouveauté non négligeable, le document unique devra répondre à des obligations de traçabilité. « La durée, qui ne peut être inférieure à quarante ans, et les modalités de conservation et de mise à disposition du document ainsi que la liste des personnes et instances sont fixées par décret en Conseil d’Etat ». Aussi, les différentes versions du document devront donc être gardées par l’employeur. Et, à terme, ce document sera déposé en version numérique sur un portail numérique déployé et administré par un organisme géré par les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel.
Ces précisions réglementaires quant à son contenu et sa conservation seront les bienvenues lorsque les membres du CSE devront donner leurs avis. En effet, à compter du 31 mars 2022, les documents uniques d’évaluation des risques professionnels et leurs mises à jour devront obligatoirement donner lieu à une consultation préalable du comité social et économique. En l’absence, l’employeur ne remplira pas ses obligations vis-à-vis du CSE et son oubli pourra participer à sa condamnation pour non-respect de son obligation de sécurité et de prévention.
Le CSE sera donc associé à cette démarche de prévention et pour qu’il puisse exercer correctement ces missions dans le domaine, la loi du 21 août 2022 prévoit alors un remodelage des actions de formation sur le sujet.
L’article L2315-18 du Code du travail est modifié (version à venir au 31 mars 2022) et une distinction est établie entre les représentants détenant un premier mandat et ceux dont il s’agit d’un renouvellement. En effet, la formation est d’une durée minimale de cinq jours lors du premier mandat des membres de la délégation du personnel. Dans le cas d’un renouvellement de mandat, les règles sont les suivantes :
La formation est d’une durée minimale :
- De trois jours pour chaque membre de la délégation du personnel, quelle que soit la taille de l’entreprise.
- De cinq jours pour les membres de la commission santé, sécurité et conditions de travail dans les entreprises d’au moins trois cents salariés.
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Focus sur la notion de harcèlement sexuel et agissements sexistes : les nouvelles dispositions
L’article L1153-1 du Code du travail est modifié et de nouvelles situations sont envisagées. Déjà, sont pris en considération les agissements sexistes et la définition des situations pouvant entraîner du harcèlement est complétée.
Ainsi, il était déjà prévu que le harcèlement sexuel soit constitué lorsque le ou la salariée subissait des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui portaient alors atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, ou créaient à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
Dorénavant en sus de cette situation, il est précisé que le harcèlement sexuel est caractérisé :
- Lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ;
- Lorsqu’un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition. Reste tout de même à préciser les situations qui sont visées dans ce cas précis car la partie suivante « savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition » pourrait entrainer des interprétations.
- Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.
Ainsi le Code du travail et le Code pénal s’alignent et offrent plus de précisions sur la définition du harcèlement sexuel.
En conclusion, la réforme du 2 août 2021 prévoit de nombreuses transformations dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail en faveur de la prévention. Les employeurs participent alors à ce mouvement notamment en élaborant un passeport prévention, qui reprendra l’ensemble des actions de prévention que le salarié a suivi au cours de sa carrière au sein de l’entreprise. Mais, la médecine du travail a aussi été impactée, notamment en développant son rôle de conseil, de prévention et de promotion de la santé publique. Enfin, les représentants du personnel sont eux aussi associés à ce mouvement. Il est donc attendu de tous une prise de conscience et une participation active à la prévention et à la santé au travail.