Des leviers pour prévenir le risque de burnout

Beaucoup d’articles de presse, de revues, de webinaires traitent avec brio, de la prévention du burnout. Il est vrai que le nombre de personnes en burnout ou susceptibles de faire un burnout dans les mois à venir n’a jamais été aussi élevé. Si le burnout existait bien avant la crise sanitaire, celle-ci l’aurait fait exploser – en octobre 2021, 60% des salariés se considéraient comme stressés -. Pour une majorité de collaborateurs, l’augmentation de la charge de travail (en raison des nombreuses heures télétravaillées), le sentiment de solitude, l’absence de liens sociaux et la peur de perdre son travail ont eu raison de leur santé psychique.

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Des leviers pour prévenir le risque de burnout
Le burn-out n'est pas reconnu comme maladie professionnelle auprès de l'OMS.

La définition du Burnout ne fait pas consensus au niveau médical. Le Burnout ne figure toujours pas les tableaux de maladies professionnelles. L’Organisation Mondiale de la Santé préfère parler de syndrome plutôt que de maladie. Un syndrome qui résulterait d’un stress chronique au travail qui n’aurait pas pu être régulé avec succès.

Mais le burnout est aussi l’expression de la relation particulière que nous entretenons avec notre travail. Et nous n’avons pas tous, les mêmes attentes du travail, en fonction de notre histoire, de notre formation, de nos modèles familiaux…. Devant des situations de travail similaires, nous réagissons différemment. En revanche, tout le monde s’accorde à dire que le burnout est un véritable fléau qui coûte cher aux salariés, quant à leur santé, mais également pour les entreprises tant sur le plan économique que sur leur image réputationnelle.

Le burnout : un processus qui s’installe dans le temps

Le burnout est un processus qui s’installe dans le temps. Le stress est, rappelons-le, une réaction normale, un phénomène d’adaptation du corps qui nous permet de réagir à notre environnement changeant. Devant une situation de travail réelle ou perçue comme menaçante, notre corps va se mettre en position de faire face soit en combattant, soit en fuyant. Mais chacun réagit de façon personnelle et adaptée à un évènement jugé stressant.

Par exemple, on nous demande de finir un dossier en urgence pour ce soir alors qu’il est déjà 18h. Malgré un sentiment de colère ou de tristesse qui peut nous assaillir, nous pourrons réaliser ce travail supplémentaire sans impact sur notre santé. En revanche, si cette situation devait se reproduire le lendemain puis le surlendemain et ainsi de suite, alors le stress chronique va avoir tout loisir de s’installer et nous mettre potentiellement en situation de burnout. Pas immédiatement car le corps a une capacité de résistance importante.  Mais peu à peu la fatigue va s’installer, les relations avec nos collègues se dégrader, l’agressivité, l’irritabilité nous envahir.

Notre corps va commencer par nous adresser des signes, comme des crises d’eczéma par exemple ou des petits malaises qu’on attribuera à tout autre chose qu’une difficulté au travail. Ces signes d’alerte sont souvent ignorés par son porteur, mais pas par les proches tels que la famille, les amis ou encore les collègues. Très souvent ce sont eux qui sont les premiers a voir que quelque chose ne va pas. Ecoutez-les.

Déconstruire le discours sur le burnout

Le burnout n’arrive pas qu’aux autres. Il faut déconstruire les discours sur le burnout.

Le burnout n’est pas un signe de fragilité, ni lié à un manque d’organisation ou d’insuffisance professionnelle –même si ces points ne doivent pas être écartés -. Pour beaucoup encore, le burnout est une forme de déprime, un « coup de fatigue ». On entend encore « vous devez apprendre à gérer votre stress ». Certes, nous avons une petite part de responsabilité dans la régulation du stress, mais réduire le stress chronique à une fragilité individuelle est trop réducteur.  

Pour en finir avec ce stress au travail qui peut amener au burnout, il peut être intéressant de regarder du côté de l’organisation du travail, des relations entre collaborateurs, du management, des conditions de travail. C’est à la fois un travail d’observation et de questionnement sur ce qui demandé aux collaborateurs, les marges de manœuvre dont ceux-ci disposent pour réaliser les taches demandées et la manière dont ils les réalisent. Regarder uniquement par le prisme de la charge de travail est parfois insuffisant. Les collaborateurs estiment-ils avoir suffisamment d’autonomie pour réaliser leurs tâches ? existe-t-il de la coopération, de l’entraide entre collègues pour nouer des liens de bienveillance favorisant la confiance et permettant la satisfaction de notre besoin d’appartenance ?  

Le nouveau Plan Santé au Travail insiste sur la prévention primaire. Celle-ci a pour objectif d’intervenir le plus en amont possible afin de diminuer le risque d’altération à la santé, c’est-à-dire le risque de burnout, dans notre cas.

Pour cela, il faut connaître le travail, aller sur le terrain, parler du travail et faire parler ceux qui le réalisent. Si un stress de courte durée peut favoriser la performance, il pourra vite l’anéantir s’il devient chronique. Sortir des clichés sur le burnout qui puiserait ses origines essentiellement dans la personnalité de l’individu est déjà un premier levier pour prévenir les situations de burnout.

Sortir de l’isolement. Oser dire non, se donner des permissions

Tous les jours, quand nous nous entretenons avec des salariés qui ont fait un burnout ou qui se sont trouvés dans une situation de stress chronique telle que celle-ci a nécessité une consultation, nous entendons souvent les mêmes remarques. « je me disais, allez encore un jour et je suis en vacances… mes vacances je les ai passé à l’hôpital » ou encore « en tant que manager, je ne me voyais pas dire à mes équipes ou à ma hiérarchie que je n’y arrivais plus. Alors je prenais des trucs pour tenir, jusqu’au jour … ».

Toutes les histoires entendues dans les cabinets des psychiatres, des psychologues renvoient à la même question. Comment peut-on en arriver là ? Ne pas oser dire stop quand on se sent submergé par le travail, alors même que notre corps nous envoie des signes d’alerte. Ne pas oser dire non au nième dossier donné en urgence, ne pas s’autoriser à refuser la tâche en trop. 

Certes nous sommes dans un monde du travail qui s’est intensifié combiné à un manque de moyens évident. Dès notre enfance, nous avons été formatés à nous taire, mais surtout nous nous sentons seuls. Et la pandémie a accentué ce sentiment de solitude.

Pourtant, un des leviers pour éviter un burnout est de sortir de cette solitude, oser parler. Qu’on soit manager, collaborateur ou représentant du personnel, oser parler du burnout, mettre en place des espaces où le travail peut être abordé sous un autre regard que celui des résultats attendus, des indicateurs de performance, celui de la rentabilité à tout prix.

Un collaborateur qui saura reconnaitre les premiers signes d’un stress qui pourraient l’amener à un burnout fera attention à lui, saura adopter une bonne hygiène de vie. Une grande entreprise française a mis en place des « capteurs de stress ». Ce sont des managers ou des membres du service des ressources humaines et du service de santé au travail qui sont chargés de détecter au plus tôt les collaborateurs qui présenteraient des signes d’un stress avancé. Les signes peuvent être le présentéisme, le retrait soudain d’un collaborateur à des moments de convivialité, une agressivité soudaine, un travail bâclé…L’enjeu est de trouver des solutions pour réguler ce stress, le plus en amont possible.

Débattre des attendus du travail

Lorsque le psychiatre français Claude Veil a introduit le concept d’épuisement professionnel dans l’histoire médicale, en 1959, il écrivait : « L’état d’épuisement est le fruit de la rencontre d’un individu et d’une situation. L’un et l’autre sont complexes, et l’on doit se garder des simplifications abusives. Ce n’est pas simplement la faute à telle ou telle condition de milieu, pas plus que ce n’est la faute du sujet. ». Cela signifie que le burnout n’est pas du fait du travail seul, mais bien de la relation que nous entretenons avec lui.

C’est une rencontre qui peut être parasitée par des biais cognitifs, qui vont nous faire voir le travail attendu autre qu’il n’est. C’est par exemple, le collaborateur qui arrive le matin et voit un nombre conséquent de dossiers sur son bureau. il pourra se dire qu’il ne va jamais y arriver, se mettre en situation de refuser de faire, ce qui aura pour conséquences de générer une situation de stress. Mais il pourra aussi aller discuter avec son manager qui lui expliquera que tous ces dossiers sont à gérer pour la fin du mois et non pour la fin de la journée.  On voit bien que les attendus du travail ne sont pas identiques entre celui qui prescrit le travail et celui qui le réalise.

Ce n’est que par le dialogue, les échanges qu’on peut éviter des situations de stress qui peuvent dégénérer en burnout si elles se reproduisent trop souvent.

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Accepter de faire moins bien ou discuter des critères de qualité.

À la suite d’un burnout d’un de ses collaborateurs, un dirigeant signalait « je ne comprends pas pourquoi il s’est mis dans cet état. Il faut arrêter avec la sur-qualité.  Il est admis que les perfectionnistes sont le plus à risque de faire un burnout.  Mais demander à un collaborateur d’aller moins dans le détail, de faire moins bien ce qui, pour lui représente « un bon travail » a un coût psychique important. Ne pas faire aussi bien que ce que l’on souhaiterait faire peut être une véritable souffrance.

Mais parce que nos organisations sont de plus en plus contraintes en termes d’effectifs, de temps, les dirigeants et les managers pourraient peut-être prendre du temps pour expliquer à leurs équipes, que ne pas faire aussi bien que ce qu’on souhaiterait n’est pas un gage de mauvaise qualité, qu’il est possible de viser la juste qualité sans poursuivre à tout prix et constamment l’excellence. 

L’idéal serait de discuter collectivement des critères de qualité attendus des uns et des autres afin de trouver un consensus. Lorsqu’on sait qu’on fait partie des individus qui se donnent des exigences excessives, il peut être judicieux de se faire aider par ses collègues ou managers. C’est une manière d’apprendre à lâcher prise.

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