Santé et sécurité des salariés : 
quels sont les 10 moyens d’actions à disposition du CSE ?

Le législateur attribue au Comité Social et Economique (CSE) un rôle en matière de santé, de sécurité et des conditions de travail, auparavant exercé par le CHSCT.

Dans les entreprises de plus de 300 salariés, le CSE peut déléguer tout ou partie de cette mission à la Commission Santé, Sécurité et des Conditions de Travail (CSSCT) sauf la consultation et le recours à l’expertise.

Il convient donc au préalable de prendre connaissance de l’accord sur le dialogue social signé dans l’entreprise pour connaître l’étendue des missions déléguées à la CSSCT et l’articulation entre le CSE et la CSSCT.

Si l’obligation d’assurer la santé et la sécurité des salariés relève de la responsabilité de l’employeur, ce dernier a tout intérêt à travailler en étroite collaboration avec le CSE, acteur pivot de l’entreprise.

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Santé et sécurité des salariés : 
quels sont les 10 moyens d’actions à disposition du CSE ?
Le CSE doit assurer la santé et la sécurité des salariés au travail, pour cela il dispose de nombreux moyens : droit d'alerte, droit de retrait, inspections…

1. Le préalable : être identifié en tant que membre du CSE

Afin que les membres du CSE et/ou de la CSSCT puissent exercer un rôle actif dans le champ de la santé, de la sécurité et des conditions de travail, ils doivent être clairement identifiés en interne par les salariés.

L’employeur doit afficher la liste des membres du CSE en application de l’article R2314-22 dernier alinéa du code du travail qui précise :

« La liste nominative des membres de chaque comité social et économique est affichée dans les locaux affectés au travail. Elle indique l’emplacement de travail habituel des membres du comité ainsi que, le cas échéant, leur participation à une ou plusieurs commissions du comité. »

Le CSE peut également réaliser sa propre communication sur son tableau d’affichage en y ajoutant, si ses membres y consentent, leurs photos et leurs coordonnées pour faciliter leur identification.

2. Le CSE, interlocuteur principal de la direction

En raison de ses nombreux contacts avec le terrain, le CSE est un interlocuteur essentiel en matière de protection de la santé physique et mentale des salariés, de leur sécurité et d’amélioration de leurs conditions de travail.

Il a pour mission d’assurer l’expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à l’organisation du travail.

En application de l’article L2312-8 du code du travail :

« Le comité est informé et consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, notamment sur :

  • Les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs ;
  • La modification de son organisation économique ou juridique ;
  • Les conditions d’emploi, de travail, notamment la durée du travail, et la formation professionnelle ;
(…) »

Il procède à l’analyse des risques professionnels et peut susciter toute initiative qu’il estime utile. Il formule, à son initiative, et examine, à la demande de l’employeur, toute proposition de nature à améliorer les conditions de travail dans l’entreprise.

Au moins quatre réunions annuelles du CSE portent sur la santé, la sécurité et les conditions de travail.

Le CSE est également réuni dans les cas suivants :

  • à la suite de tout accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves ;
  • en cas d’événement grave lié à l’activité de l’entreprise, ayant porté atteinte ou ayant pu porter atteinte à la santé publique ou à l’environnement ;
  • à la demande motivée de deux de ses membres représentants du personnel sur les sujets relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail.

Pour exercer de manière efficace ses attributions, le CSE a tout intérêt à prendre connaissance des documents mis à sa disposition dont notamment le document unique d’évaluation des risques (DUER) mais également la base de données économiques et sociales (BDES). En outre, le CSE peut se faire présenter l’ensemble des documents, des livres, registres et documents non nominatifs rendus obligatoires en matière de santé et de sécurité.

Indépendamment du dialogue social avec l’employeur, le CSE peut solliciter d’autres interlocuteurs extérieurs à l’entreprise tels le médecin du travail ou l’inspection du travail afin de bénéficier de leur avis et conseils sur certaines situations.

Dans l’hypothèse d’irrégularités dans l’application de la réglementation du travail, l’inspection du travail dispose de différents moyens d’actions. L’inspecteur pourra notamment adresser à l’employeur des observations rappelant les règles en vigueur, des mises en demeure de se conformer à la réglementation ou bien dresser des procès-verbaux en cas d’infractions pénales. Il a également la possibilité de décider de l’arrêt temporaire des travaux lorsqu’ils présentent un danger grave et imminent pour la vie ou la santé d’un travailleur.

3. L’exercice de la liberté de déplacement

Les membres du CSE peuvent circuler librement dans l’entreprise et y prendre tous contacts nécessaires, sous réserve de ne pas apporter de gêne importante à l’accomplissement du travail des salariés.

La liberté de circulation s’exerce durant les heures de délégation. En dehors des heures de délégation, elle s’exerce en dehors du temps de travail.

Ce moyen permet aux élus d’aller à la rencontre de leurs collègues, d’échanger avec eux sur leurs conditions de travail et de prendre connaissance de leur environnement.

Afin de faciliter les échanges et créer un lien de confiance, les élus doivent garantir aux salariés la confidentialité de leurs entretiens.

Les membres du CSE peuvent également se déplacer hors de l’entreprise pour l’exercice de leurs fonctions durant les heures de délégation.

Ils peuvent à cette occasion rencontrer la médecine du travail et /ou l’inspection du travail qui jouent un rôle actif en matière de prévention des risques professionnels en entreprise.

4. L’information des salariés sur l’exercice du droit de retrait

Le CSE n’a pas la capacité d’imposer un arrêt du travail, il peut en revanche informer chaque salarié de sa possibilité d’utiliser son droit de retrait.

En effet, en application de l’article L4131-1 du code du travail, si le salarié a un motif raisonnable de penser que la situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, il peut alors se retirer de son poste de travail et interrompre ses activités.

Le droit de retrait constitue un droit individuel et subjectif.

A titre d’exemples, seraient susceptibles de justifier un droit de retrait un risque d’agression, l’absence d’équipement de protection individuelle et/ou collective, un outil de travail défectueux…

5. Le pouvoir de procéder à des inspections

Le CSE procède, à intervalles réguliers, à des inspections en matière de santé, de sécurité et des conditions de travail. La fréquence de ces inspections est au moins égale à quatre par an.

Il s’agit d’un moyen important de prévention des risques professionnels. L’objectif est double : détecter d’éventuels dysfonctionnements et améliorer les conditions de travail.

Le législateur n’a pas prévu les modalités d’exercices des inspections. Les partenaires sociaux sont donc libres pour définir leur organisation (composition de la délégation, choix des thématiques et des services à inspecter, temps d’échanges avec les salariés…)

Pour être efficace, l’inspection doit être préparée en amont et faire l’objet d’une formalisation afin d’en améliorer le suivi.

6. La réalisation d’enquête

Le CSE réalise des enquêtes en matière d’accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel.

Les enquêtes sont réalisées par une délégation paritaire comprenant l’employeur ou son représentant et un représentant du personnel siégeant à ce comité.

L’enquête permet d’analyser les causes de l’accident dans le but qu’il ne se reproduise pas.

La principale méthode utilisée est celle de l’arbre des causes permettant d’identifier les faits ayant concouru à la survenance de l’accident.

Le temps passé par les membres de la délégation du personnel du CSE aux enquêtes menées après un accident du travail grave ou des incidents répétés ayant révélé un risque grave ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave est payé comme temps de travail effectif. Ce temps n’est pas déduit des heures de délégation.

7. Le départ en formation

Tous les membres du CSE titulaires et suppléants bénéficient d’un droit à la formation en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail.

Cette formation a pour objectifs :

  • de développer leur aptitude à déceler et à mesurer les risques professionnels et leur capacité d’analyse des conditions de travail ;
  • de les initier aux méthodes et procédés à mettre en œuvre pour prévenir les risques professionnels et améliorer les conditions de travail.

La durée de la formation est fonction des effectifs de l’entreprise, elle est de :

  • 3 jours pour les entreprises dont l’effectif est inférieur à 300 salariés
  • 5 jours pour les entreprises dont l’effectif est supérieur à 300 salariés

Le temps consacré à la formation est pris sur le temps de travail et est rémunéré comme tel. Il n’est pas déduit des heures de délégation.

Cette formation est financée par l’entreprise.

8. Le droit d’alerte

En matière de santé, de sécurité et de conditions de travail, le CSE bénéficie d’un droit d’alerte dans les situations suivantes :

  1. En cas d’atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles (article L2312-59 du code du travail)
  2. En cas de danger grave et imminent (articles L 4132-2 et suivants du code du travail)
  3. S’il existe un risque grave pour la santé publique ou l’environnement (articles L4133-2 et suivants du code du travail)

Chacune de ces alertes répond à des conditions d’exercice propres.

Elles permettent de forcer le dialogue social entre les partenaires sociaux. En effet, suite à une alerte lancée, une enquête paritaire réunissant la direction et le(s) membre(s) du CSE doit avoir lieu.

Si à l’issue de cette enquête, il existe une divergence sur le constat et/ ou sur les mesures pour faire cesser le trouble, une personne extérieure peut alors être saisie pour statuer sur la situation.

Il s’agira du bureau de jugement du conseil de prud’hommes dans le premier cas d’alerte, de l’Inspection du travail dans le second cas et du Préfet dans le dernier cas.

9. Le recours à l’expertise

Le recours à l’expertise permet aux élus d’obtenir une vision objective et indépendante de la situation.

Il permet d’enrichir le dialogue social en aidant les élus à formuler un avis lors des consultations et en proposant des pistes d’actions à mettre en place.

Le CSE est libre de recourir à tout type d’expertise pour la préparation de ses travaux, financée en totalité sur son budget de fonctionnement.

En dehors de cette expertise libre, le législateur a prévu la possibilité pour le CSE de recourir selon les cas à un expert-comptable ou à un expert habilité qualité du travail et de l’emploi dans les situations suivantes :

  • Lors de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi. Cette consultation doit avoir lieu chaque année, sauf disposition conventionnelle contraire. L’expertise est financée à 100% par l’employeur.
  • Lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement. L’expertise est financée à 100% par l’employeur.
    A titre d’exemples, le risque grave justifiant le recours à l’expertise a été reconnu en cas de risque sérieux de pollution accidentelle par vaporisation de substances chimiques (Cass. soc., 19 déc. 2012, n° 11-11.799) ou en présence d’une charge de travail très importante avec une exposition des salariés à un risque d’épuisement (Cass. soc., 25 oct. 2017, 16-15.265).
  • En cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail. L’expertise est financée par le comité, sur son budget de fonctionnement, à hauteur de 20 %, et par l’employeur, à hauteur de 80 %.

Le projet d’entreprise s’accompagnant non seulement du déplacement géographique des salariés, mais aussi d’une évolution de leurs tâches a été considéré comme un projet important justifiant le recours à l’expertise (Cass. soc., 30 mars 2011, n° 09-68.161)

10. L’action en justice

Lorsque les différents leviers ont été actionnés par le CSE, il lui reste en dernier ressort la saisine du juge.

Le CSE des entreprises de plus de 50 salariés doté de la personnalité juridique dispose à ce titre de la capacité d’ester en justice.

Si le juge des référés estime que la violation de l’obligation de sécurité et de prévention de la santé des salariés par l’employeur constitue « un trouble manifestement illicite », il peut alors ordonner des mesures pour faire cesser ce trouble.

Une des illustrations récentes est la condamnation de l’entreprise Amazon France par le Tribunal Judiciaire de Nanterre par décision du 14 avril 2020 qui a ordonné à l’entreprise d’évaluer les risques professionnels en y associant les représentants du personnel et de restreindre son activité sous peine d’astreinte.

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