Dernière étape du processus de recrutement, il joue un rôle important, parfois même déterminant dans la construction de la relation du collaborateur à son entreprise. En 2015, la DARES avait déjà fait émerger des statistiques alarmantes sur les chiffres du turnover à moins d’un an en France : en effet son enquête (hélas confirmée par l’enquête YouTrust menée deux ans plus tard) révélait qu’un salarié sur trois rompt son CDI avant son premier anniversaire. Depuis, le phénomène semble rester d’actualité, d’autant plus que les nouvelles générations, plus nomades et méfiantes vis-à-vis de l’entreprise classique, n’hésitent pas à changer rapidement d’emploi. Les entreprises multiplient les « opérations séduction » pour attirer les meilleurs talents. Cependant elles ont également pris conscience qu’il ne suffit plus de convaincre le salarié de rejoindre l’entreprise mais qu’il s’agit aussi de savoir le retenir par la suite, et que l’échec d’une intégration engendre des coûts de gestion et d’image non négligeables. L’onboarding est donc (re) devenu un process clé dans les politiques RH. Voici quelques conseils pour en faire un véritable atout de votre marque employeur.
1. Assurez-vous de la cohérence de la phase d’intégration avec votre process de recrutement
On est souvent surpris d’entendre des candidats évoquer le contraste entre leur recrutement et leur intégration dans l’entreprise. Avant de se voir « dérouler le tapis rouge », le candidat a parfois dû surmonter un véritable parcours du combattant, avec son lot de désagréments (site carrière exigeant de re-saisir l’intégralité de son CV, nombre d’entretiens démultiplié, temps d’attente démesuré à l’accueil le jour de l’/des entretien(s), posture ascendante voire parfois même condescendante du recruteur, questions déplacées, demande de documents exagérée, délais de réponse interminables etc.). À l’inverse, d’autres jeunes recrues, à qui l’on a promis monts et merveilles lors de leur(s) entretien(s) d’embauche, se retrouvent, aussitôt dans l’entreprise, totalement livrées à elles-mêmes, ou doivent se contenter d’une pile de documentation posée sur leur bureau, quand elles ne doivent pas attendre trois jours ledit bureau, ou leur badge, ordinateur ou autre outil de travail. Si les process RH peuvent être découpés en phases successives qui appellent des modes de gestion différents (recrutement, intégration, vie du contrat, développement de compétences, etc.), l’expérience du collaborateur en revanche, s’inscrit dans un flux continu, qui commence dès la réponse à l’offre d’emploi ; les bonnes et les mauvaises expériences s’engrangent et construisent (ou détruisent) la relation du collaborateur à son entreprise, la confiance et la considération qu’il a pour son employeur, et par conséquent son niveau d’engagement. Lorsque le candidat constate que les comportements au cours de la phase de recrutement ou de l’onboarding ne sont pas cohérents avec ce qui est affiché par l’entreprise, on peut d’ores et déjà craindre que la réussite de la collaboration ne soit compromise. Lors de la construction ou du remaniement de votre stratégie d’onboarding, veillez donc à vous interroger sur vos pratiques de recrutement et à vous assurer qu’elles véhiculent les mêmes messages que ceux que vous souhaitez délivrer dans l’entreprise.
2. Impliquez les collaborateurs dans l’élaboration du parcours d’intégration
Les spécialistes de la Marque Employeur l’ont bien compris : plus vous impliquez vos collaborateurs dans la définition de votre marque, plus vous avez de chances que l’image employeur sur laquelle vous allez communiquer soit authentique, et que vos collaborateurs en soient les ambassadeurs. Il paraît donc assez logique d’impliquer d’autres salariés de l’entreprise que les RH dans l’intégration du nouvel arrivant. Si vous bâtissez votre premier parcours d’intégration, désigner ce projet comme un projet d’entreprise et réunir autour de la table des collaborateurs d’autres équipes, motivés par le sujet, peut s’avérer très enrichissant, et renforcer considérablement l’adhésion et l’implication de l’ensemble des salariés. Les regards croisés de diverses fonctions pourront être utiles pour réfléchir aux multiples questions à se poser sur les composantes du parcours : quel message cherche-t-on à transmettre ? comment préparer le manager ? quelle implication pour son équipe ? faut-il prévoir un kit d’accueil ? quels outils peut-on utiliser ? comment profiter des innovations numériques ? est-il souhaitable de choisir un tuteur ou un parrain ? comment développer une culture d’accueil ? comment favoriser la transversalité dès les premiers pas du collaborateur dans l’entreprise ?
Dans la grande majorité des intégrations, le manager et l’équipe que va rejoindre le nouveau collaborateur ont un rôle important à jouer pour garantir le succès de l’onboarding. Même si, dans de nombreux cas, l’arrivée d’une nouvelle ressource répond à une surcharge de travail, il est important qu’ils dégagent des créneaux suffisants sur leurs emplois du temps pour le consacrer à leur nouvel équipier. Plus facile à dire qu’à faire dans la réalité, certes, mais essentiel.
3. Soyez différenciant
Qu’est-ce qui fait qu’un talent choisit de venir travailler chez vous et d’y rester ? qu’est-ce qui fait de vous un employeur exceptionnel ? C’est à ces questions que tentent de répondre les responsables de la Marque Employeur. Réduire les coûts de turnover et de recrutement, booster l’engagement des salariés, augmenter les ventes, les bénéfices sont multiples et mesurables. Les candidats sont de plus en plus sensibles à l’image véhiculée par leur employeur et recherchent les entreprises qui bénéficient d’une image attractive. C’est pourquoi il est utile de soigner son image, son discours, et sa communication dès les premières semaines.
Prenez le temps de bien préparer le déroulé des premiers jours du collaborateur dans l’entreprise. Ajoutez des éléments de personnalisation à votre dispositif, en vous appuyant sur ce que vous savez du poste, de l’équipe, du candidat. Evitez les parcours trop « processés », rigides et uniformes. Votre nouvel arrivant a besoin de sentir que ce n’est pas un nouveau salarié lambda que l’on accueille, c’est Lui. Il ne s’agit pas ici d’un nouveau maillon que l’on ajoute à une chaîne de montage mais d’un collaborateur que l’on a choisi, attendu et sur lequel on investit dans le futur. Humaniser votre parcours permettra à votre nouvelle recrue d’éprouver plus rapidement un sentiment d’appartenance à l’entreprise et de prendre plus facilement ses marques dans son nouveau poste.
4. Suivez l’intégration dans la durée
S’intégrer dans un nouvel environnement, assimiler l’ensemble des modes de fonctionnement d’une entreprise, maîtriser son poste de travail nécessitent du temps, quel que soit le niveau d’expérience du collaborateur. L’onboarding est donc un dispositif qui s’envisage dans la durée. Ne criez donc pas victoire trop vite et gardez à l’esprit que plus vous accompagnez le collaborateur dans ses premiers pas, plus vous sécurisez vos chances de réussite de l’intégration. Vous pouvez jalonner votre parcours de quelques étapes au cours desquelles vous pourrez demander et donner du feedback au collaborateur : rapport d’étonnement, entretien de suivi, point avec le tuteur ou le parrain, mini-enquêtes en lignes, de nombreux outils peuvent être utilisés pour vous assurer que votre nouveau collaborateur s’épanouit dans son nouvel environnement.
5. Les pièges à éviter
Égalité de traitement : évitez dans la mesure du possible les parcours d’intégration exclusivement réservés à une seule catégorie (les CDI, les cadres, les commerciaux, etc.). Les salariés, et particulièrement les jeunes générations, sont en forte demande d’égalité de traitement et d’équité ; à l’heure de l’entreprise libérée, de la remise en question de l’efficacité des organisations ultra-hiérarchisées et de la critique du management « commande-contrôle », ajuster la qualité du parcours d’intégration en fonction du statut du salarié dans l’organisation ou de la nature de son contrat peut être très mal perçu par les autres collaborateurs. D’un point de vue juridique d’ailleurs, la précaution n’est pas superflue, car le thème de l’égalité de traitement ne cesse de monter en puissance et de générer une jurisprudence abondante, notamment lorsqu’il s’agit de rupture de cette égalité entre CDI et CDD. Cela ne vous empêche pas pour autant de personnaliser votre onboarding en fonction du public visé : un manager expérimenté aura probablement besoin d’une intégration différente de celle d’un apprenti. Mais l’un comme l’autre a besoin d’être accueilli et accompagné.
Expérimentez votre parcours, éprouvez-le et demandez des feedbacks. Ne faites pas de promesses que vous n’êtes pas sûrs de tenir, ne « vendez pas du rêve » et restez attentifs à la cohérence du parcours avec votre stratégie de marque employeur. Vérifiez sa mise en œuvre et opérez des réajustements s’il s’avère irréalisable, trop ambitieux. Un bon dispositif d’onboarding doit être complet mais pas devenir surchargé ; s’il devient trop chronophage, pour le nouveau collaborateur ou pour les parties prenantes au process, il devient contre-productif et votre beau process risque d’être à terme bâclé, sinon abandonné.
Enfin sachez récompenser les salariés impliqués dans le dispositif d’onboarding, reconnaître le temps et l’énergie qu’ils consacrent au projet. Bons cadeau, prime, repas convivial, remerciements de la direction etc., vous ne regretterez pas ces marques de reconnaissance lorsque vous devrez faire face à une grosse vague de recrutements et que vous pourrez compter sur l’engagement de vos partenaires.