Attention à ne pas confondre le licenciement pour insuffisance professionnelle et le licenciement pour faute. En effet, l’insuffisance professionnelle n’est pas fautive. Dès lors, le licenciement pour insuffisance professionnelle est bien un licenciement pour motif personnel mais non un licenciement pour faute.
Nous allons ci-dessous définir le licenciement pour insuffisance professionnelle mais aussi la procédure de licenciement applicable.
Qu’est-ce que l’insuffisance professionnelle ?
L’insuffisance professionnelle regroupe en réalité deux notions distinctes. Il peut s’agir soit de l’insuffisance professionnelle liée aux compétences du salarié, soit de l’insuffisance professionnelle liée aux résultats du salarié.
Toutefois, que ce soit l’une ou l’autre des deux notions, l’insuffisance professionnelle ne peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement que si elle repose sur des faits objectivement précis, matériellement vérifiables mais aussi, imputables au salarié.
Par ailleurs, l’insuffisance professionnelle ne doit pas être passagère. Elle doit être constatée dans une période suffisante ayant permis au salarié de s’adapter aux missions liées à son poste.
Distinguons ci-dessous l’insuffisance professionnelle liée aux compétences du salarié et l’insuffisance professionnelle liée aux résultats du salarié.
L’insuffisance professionnelle liée aux compétences du salarié
Le licenciement pour insuffisance professionnelle liée aux compétences du salarié repose exclusivement sur l’incapacité du salarié à effectuer correctement son travail. Ce motif de licenciement n’a toutefois aucun rapport avec une quelconque inaptitude médicale du salarié. Le salarié dispose bien de toutes ses capacités médicales mais ses compétences professionnelles ne sont pas suffisantes. Ainsi, par exemple, un salarié du bâtiment ayant un problème médical au dos et qui a des difficultés à effectuer son travail ne sera pas licencié pour insuffisance professionnelle mais pour inaptitude.
En pratique, les reproches faits au salarié dans ce genre de licenciement sont les suivants :
- une incompétence,
- une inadaptation professionnelle,
- des erreurs,
- une désorganisation dans le travail,
- un travail insuffisant,
- un manque de qualification malgré l’effort de formation de l’employeur.
Il n’existe donc pas un motif unique. La cause réelle et sérieuse s’apprécie au cas par cas.
Attention ! En pratique, la période d’essai existe pour permettre à l’employeur de juger, de tester les capacités professionnelles du salarié. Toutefois, le fait que le salarié a effectué une période d’essai ne prive pas l’employeur d’invoquer par la suite une insuffisance professionnelle. Mais il est difficile d’imaginer qu’un salarié soit licencié pour insuffisance professionnelle pour des reproches qui étaient déjà connus lors de l’accomplissement de cette période d’essai.
Par ailleurs, même si le licenciement repose sur des faits objectivement précis et matériellement vérifiables, l’employeur ne doit avoir aucune responsabilité dans la situation. En effet, en cas d’insuffisance professionnelle, l’employeur ne doit pas avoir fourni au salarié une charge de travail trop importante. L’employeur ne peut pas non plus reprocher un manque de compétence s’il a embauché, en toute connaissance de cause, un salarié de qualification insuffisante ou encore, s’il a manqué à son obligation de formation continue (C. trav. art. L6321-1). En effet, rappelons que l’employeur a l’obligation d’adapter le salarié aux évolutions de son poste de travail notamment par des formations. Il semble alors logique que l’insuffisance professionnelle ne puisse être invoquée lorsque le salarié est en cours de formation.
L’insuffisance professionnelle liée aux résultats du salarié
On parle de licenciement pour insuffisance de résultats lorsque le salarié est licencié parce qu’il n’a pas pu atteindre des objectifs préalablement fixés. Cela concerne généralement des objectifs chiffrés dans les métiers commerciaux. Ces objectifs peuvent être déterminés de manière unilatérale par l’employeur ou encore, figurer dans le contrat de travail.
Toutefois, cette insuffisance de résultats ne peut, à elle seule, constituer une cause de licenciement. Pour constituer un motif de licenciement, l’employeur doit ainsi justifier que l’insuffisance de résultat relève d’une cause réelle et sérieuse.
Attention ! En aucun cas l’employeur ne peut prévoir, à l’avance, dans le contrat de travail que le salarié sera licencié simplement s’il n’atteint pas ses objectifs (Cass. soc. 14 novembre 2000).
L’insuffisance de résultats n’est pas toujours évidente à démontrer. Le fait de ne pas atteindre les objectifs n’est pas en lui-même une cause réelle et sérieuse permettant de mettre fin au contrat de travail. Pour justifier le licenciement pour insuffisance de résultats, l’employeur doit démontrer que ces mauvais résultats résultent d’une faute du salarié, d’une insuffisance ou d’une incapacité professionnelle.
Comme pour l’insuffisance professionnelle liée aux compétences du salarié, l’employeur ne doit avoir aucune responsabilité dans l’insuffisance de résultats. Ainsi, la charge de travail ne doit pas être exagérée. Les objectifs doivent être réalistes, sérieux et raisonnables. L’employeur doit tenir compte des conditions de travail du salarié et de la situation du marché pour les fixer. L’employeur ne peut demander au salarié d’atteindre des résultats trop élevés ou non réalisables durant la période de travail.
L’insuffisance de résultats doit donc être imputée au salarié et à lui seul. Ainsi, le licenciement pour insuffisance de résultats n’est pas justifié si le salarié ne dispose pas des moyens pour les atteindre. De même, l’insuffisance ne doit pas être due à la concurrence ou à la conjoncture économique.
Quelle est la procédure à suivre en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle ?
Le licenciement pour insuffisance professionnelle n’est pas un licenciement disciplinaire. Dès lors, la procédure de licenciement à appliquer est celle du licenciement pour motif personnel non disciplinaire. La charge de la preuve incombe à l’employeur.
Rappelons qu’avant d’envisager de licencier un salarié pour insuffisance professionnelle, ce dernier doit être mis au courant de son incompétence, de ses erreurs. L’employeur ne peut mettre en œuvre ce licenciement soudainement sans avoir prévenu préalablement le salarié. Ainsi par exemple, si un salarié n’est pas prévenu de son manque de travail lors des entretiens annuels, un licenciement pour insuffisance professionnelle devient alors difficile à justifier.
Il existe donc différentes étapes à respecter :
- convoquer le salarié à un entretien préalable,
- effectuer un entretien préalable au licenciement,
- notifier au salarié une lettre de licenciement,
- effectuer un préavis de licenciement
- verser les indemnités obligatoires.
Convoquer le salarié à un entretien préalable au licenciement
L’employeur est tenu de convoquer le salarié à un entretien préalable au licenciement.
Cette convocation, envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception, doit mentionner les éléments suivants :
- l’objet de l’entretien c’est-à-dire le licenciement pour insuffisance professionnelle ou le licenciement pour insuffisance de résultats ;
- la date, l’heure et le lieu de l’entretien ;
- la possibilité pour le salarié de se faire assister pendant l’entretien.
Il faut également noter que le salarié doit recevoir sa lettre au moins 5 jours ouvrables avant la date de l’entretien préalable.
Effectuer l’entretien préalable au licenciement
C’est durant l’entretien préalable que l’employeur doit présenter au salarié les griefs qui lui sont reprochés. Ces griefs constitueront les motifs de son licenciement. De son côté, le salarié doit pouvoir apporter des explications à ce qu’on lui reproche.
Notifier au salarié une lettre de licenciement
Un délai de 2 jours minimum doit s’écouler après l’entretien préalable pour notifier son licenciement au salarié. Cette notification doit être effectuée par lettre recommandée avec accusé de réception. Les motifs du licenciement doivent être clairement indiqués dans la lettre de licenciement avec des faits précis. Ces motifs doivent correspondre pour l’essentiel aux griefs évoqués lors de l’entretien préalable de licenciement.
A noter. Depuis les ordonnances Macron, l’employeur peut préciser les motifs indiqués dans la lettre de licenciement même si celle-ci a déjà été notifiée au salarié. Cette précision peut être effectuée soit à la demande du salarié, soit de sa propre initiative. Dans ce dernier cas, il dispose d’un délai de 15 jours à compter de la notification pour effectuer cette précision.
Effectuer un préavis de licenciement
Comme pour le licenciement pour motif personnel, le salarié licencié pour insuffisance professionnelle est tenu d’effectuer un préavis.
La durée de ce préavis varie selon l’ancienneté du salarié dans l’entreprise :
- 1 mois si le salarié a une ancienneté de 6 mois à 2 ans ;
- 2 mois si le salarié a une ancienneté supérieure ou égale à 2 ans.
Durant l’exécution du préavis, le salarié doit continuer à exécuter son travail normalement.
Notons toutefois que l’employeur peut également décider de dispenser le salarié d’effectuer un préavis en lui versant une indemnité compensatrice. Le versement de cette indemnité compensatrice de préavis doit être formalisé par écrit.
Verser les indemnités obligatoires
Le salarié licencié pour insuffisance professionnelle peut bénéficier du versement des indemnités prévues en cas de licenciement non disciplinaire pour motif personnel. Ainsi, le salarié peut percevoir l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement et éventuellement, une indemnité de préavis et une indemnité de congés payés.