Quelles sont les conditions d’application de la règle d’alternance lors des élections professionnelles (Cass. Soc., 9 mai 2018, no 17-60133 – no 17-14088) ?
Dans une première affaire, lors de l’élection de la DUP au sein d’une association en février 2017, la CFDT présente sa liste avec deux candidates suppléantes en tête de liste et remporte tous les sièges à pourvoir. Mais l’union départementale FO de la Lozère relève que la CFDT a présenté deux femmes en tête de liste chez les suppléants et n’a dès lors pas respecté la règle d’alternance femmes/hommes.
En effet, selon les dispositions légales, la présentation d’une liste de candidats aux élections professionnelles doit respecter deux règles, à savoir :
- La même proportion d’hommes et de femmes que celle présente dans le collège électoral
- Une alternance d’un candidat de chaque sexe jusqu’à épuisement des candidats d’un des sexes
A défaut, la violation de cette règle emporte la nullité du mandat du ou des élus mal placés sur la liste de candidats.
Néanmoins, malgré ces règles, la Cour de cassation a considéré que la violation de la règle d’alternance femmes/hommes sur les listes de candidats ne doit pas être sanctionnée dès lors qu’elle ne porte pas atteinte à la représentation équilibrée des sexes au sein de la représentation du personnel et qu’aucun candidat CFDT n’a été évincé puisque toute la liste a été élue.
Dans une deuxième affaire, concernant les élections au sein de la CPAM de l’Indre, le protocole d’accord préélectoral prévoit l’élection de deux titulaires et deux suppléants dans le collège cadres composé à 77 % par des femmes.
A l’issue du vote, le seul candidat FO est élu comme titulaires du collège ainsi qu’une candidate CFDT et, comme suppléants, deux candidats CFDT.
Mais la CPAM et la CFDT contestent la validité du mandat du candidat homme de la la liste FO au motif que le principe de parité n’était pas respecté.
En première instance, le tribunal instance valide les élections car il estime que les nouvelles exigences légales n’ont vocation à s’appliquer qu’aux listes comportant plusieurs candidats et non à celle ne comportant qu’un seul candidat.
Néanmoins, la Cour de cassation casse ce dernier raisonnement dans la mesure où deux postes était à pourvoir, supposant alors le respect de la règle de la parité.
Dans quel cas l’employeur doit il saisir la Direccte pour la répartition des salariés dans les collèges électoraux (Cass. Soc., 9 mai 2018, no 17-26522) ?
Dans cette affaire, suite à l’invitation de l’employeur à la négociation du protocole préélectoral pour les élections des délégués du personnel, un syndicat s’est présenté à une première réunion, le 23 juin, sans qu’aucune discussion sur le fond n’intervienne ce jour-là. Une deuxième séance est prévue le 17 juillet mais le syndicat demande un report en raison de l’indisponibilité de ses représentants. Aucune suite n’est cependant donnée et l’employeur fixe seul la répartition des électeurs et des sièges dans les collèges.
A la suite des élections ayant eu lieu en août, le syndicat saisit le tribunal d’instance d’une demande d’annulation des élections.
Le tribunal d’instance constate qu’aucune négociation n’ayant commencé, l’employeur pouvait parfaitement déterminer seul la répartition des sièges et des électeurs.
En revanche, la Cour de cassation va à l’encontre de ce raisonnement en estimant que dès lors qu’une organisation syndicale s’est manifestée pour participer à la négociation du protocole préélectoral, l’employeur doit saisir la Direccte, à défaut d’accord, pour faire procéder à la répartition des sièges et des électeurs au sein des collèges.
A quelle condition le CHSCT peut-il solliciter une expertise pour risque grave (Cass. Soc., 9 mai 2018, no 17-10852) ?
Dans cette affaire, suite, d’une part, à sept accidents du travail intervenus en quelques mois dont certains ont donné lieu à l’exercice du droit d’alerte et, d’autre part, à plusieurs accidents survenus sur les rails notamment des collisions de trains, le CHSCT du technicentre SNCF de la gare Saint Charles à Marseille vote le recours à une expertise pour risque grave. Dans ce conteste, un expert est nommé pour procéder à une analyse détaillée des causes à l’origine de cette situation afin de l’aider à formuler des propositions pour améliorer les conditions de travail.
Or, pour la SNCF, suivie par la Cour d’appel, le bien-fondé de cette expertise supposait que le CHSCT démontre la réalité du risque grave, c’est-à-dire mette en évidence l’existence d’un dysfonctionnement au sein de l’entreprise à l’origine de ces accidents.
La Cour de cassation estime cependant que les accidents dont fait état le CHSCT suffisent à caractériser un risque grave et à justifier le recours à l’expertise sans qu’il lui appartienne d’en déterminer l’origine.