Les charges de personnel et le seuil de rentabilité

Il est très courant en contrôle de gestion de distinguer les coûts de l'entreprise entre charges variables et charges fixes. Cette distinction permet d'isoler les coûts fonction du volume d'activité des autres coûts, moins flexibles. Les charges de personnel peuvent également se décomposer entre les charges variables et charges fixes. Ce mix de charges conditionne le niveau du seuil de rentabilité de l'entreprise.

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Article mis à jour le 12 juillet 2021

La distinction charges variables/charges fixes

Les charges variables

Les charges variables ou opérationnelles constituent des coûts proportionnels au volume d’activité de l’entreprise. Ce sont des charges, liées au fonctionnement opérationnel de l’entreprise, qui augmentent lorsque le chiffre d’affaires progresse et inversement.

On retrouve dans cette catégorie, les matières premières et composants. Le niveau de ces achats progresse en principe dans les mêmes proportions que le chiffre d’affaires.

Les charges fixes

Les charges fixes ou de structure sont des coûts qui restent relativement fixes, quel que soit le niveau d’activité de l’entreprise. Ces coûts sont souvent liés à l’existence de l’entreprise.

On retrouve dans cette catégorie, l’essentiel des dits « frais généraux », à savoir les loyers, les frais d’assurance, les dotations aux amortissements, etc.

Certains frais généraux sont néanmoins en partie des charges variables (coût de réparation du matériel servant directement à l’activité, frais de carburant des opérationnels, idem pour le téléphone, etc.).

Néanmoins, on constate que ces coûts fixes ne demeurent fixes qu’à court ou moyen terme. À un certain niveau de chiffre d’affaires ces coûts augmentent d’un coup, par paliers et redeviennent à nouveau stables entre deux paliers de chiffre d’affaires.

Ce constat s’explique aisément de manière opérationnelle. En cas de progression importante du chiffre d’affaires, les locaux deviennent souvent trop petits et un déménagement s’impose, occasionnant inévitablement une hausse soudaine du loyer, et probablement également des frais d’énergie et d’eau. Le phénomène est identique lorsqu’une entreprise doit investir dans une nouvelle machine compte tenu d’une demande croissante. Les dotations aux amortissements augmentent alors d’un coup puis demeurent stables sur une nouvelle période.

Charges de personnel : charges  variables ou fixes ?

Majoritairement des coûts fixes

Les charges de personnel et autres frais liés aux ressources humaines de l’entreprise sont la plupart du temps majoritairement composées de coûts fixes. Les rémunérations, cotisations patronales du personnel permanent de l’entreprise demeurent en effet stables quel que soit le niveau d’activité de l’entreprise, du moins à court/moyen terme. À nouveau, en cas de développement de l’activité, des embauches seront nécessaires, et les charges de personnel augmenteront d’un coup.

CDD et heures supplémentaires

À l’intérieur du poste comptable 641 – Rémunérations du personnel, des cotisations correspondantes (645 – Charges de sécurité sociale et de prévoyance) et des charges fiscales correspondantes (compte 633, taxe d’apprentissage, formation continue, etc.), on peut également trouver des coûts variables relatifs notamment aux heures supplémentaires du personnel affecté à la production et autres postes opérationnels, ainsi que les rémunérations et cotisations du personnel en CDD, également pour les postes opérationnels, à condition que ces heures et CDD soient justifiés par un surcroît d’activité. S’ils sont justifiés par un remplacement d’un personnel permanent, il s’agit à nouveau de coûts fixes.

Les heures supplémentaires et CDD pour les postes plus « fonctionnels » (services comptabilité, RH, etc.) peuvent également répondre à cette logique, mais le lien est souvent moins direct.

Ce raisonnement vaut également pour le personnel extérieur à l’entreprise (intérimaires et personnel détaché) que l’on retrouve dans le compte 621 – Personnel extérieur à l’entreprise.

Primes et frais de déplacement

Les primes fonctions du chiffre d’affaires, notamment pour les commerciaux constituent évidemment des charges variables. Les frais de déplacement des commerciaux pour aller voir leurs clients sont également des coûts variables. Les autres frais de déplacement (des services fonctionnels, de la direction générale, etc.) représentent en revanche des coûts fixes.

Intéressement et participation

Dans les charges de personnel, l’intéressement constitue également souvent un coût variable, en tout cas, lorsque la formule est liée au niveau du chiffre d’affaires. Lorsque la formule de l’intéressement est liée à un niveau de rentabilité à atteindre (bénéfice ou marge), l’analyse est plus complexe. Le chiffre d’affaires est loin d’être entièrement proportionnel au bénéfice, justement à cause de la présence des coûts fixes. Dans les faits, seule une partie de l’intéressement pourra être considéré comme variable.

L’analyse est identique pour la participation des salariés aux résultats de l’entreprise (compte 691 du PCG).

Le tableau de résultat différentiel

La répartition de l’ensemble des charges de l’entreprise entre coûts fixes et coûts variables permet d’établir ensuite le tableau de résultat différentiel. Il s’agit d’un tableau de résultat d’exploitation synthétisé en seulement 5 lignes.

Il permet de mettre en évidence, la marge sur coût variable (M/CV) qui représente la marge de l’entreprise après déduction des coûts variables.

M/CV = Chiffre d’affaires – Charges variables

Le tableau de résultat différentiel se présente ainsi :

     
  Montant %age du CA
Chiffre d’affaires (CA)   100 %
(-) Charges variables (CV)    
(=) Marge sur coût variable (M/CV)   Taux de M/CV
(-) Charges fixes (CF)    
(=) Résultat d’exploitation (Re)   Taux de rentabilité

Le tableau fait généralement apparaître le taux de marge sur coût variable.

Taux de M/CV = Marge sur coût variable / Chiffre d’affaires

La marge sur coût variable étant proportionnelle au chiffre d’affaires, le rapport entre les deux est en conséquence relativement fixe. Ainsi, dans ce tableau, seuls le coût fixe et le taux de M/CV sont des éléments fixes sur un horizon court/moyen terme.

Exemple 

La société « Peau douce » fabrique et vend un produit unique, une lotion pour la peau, au prix unitaire HT de 25 €. 70.000 produits ont été écoulés au cours de l’année.

Après analyse des charges de la comptabilité par le contrôleur de gestion, on aboutit à la distinction charges variables/charges fixes suivante :

Charges Montant total Charges variables Charges fixes
Matières premières 800 000 800 000  
Autres achats et charges externes 200 000 60 000 140 000
Impôts et taxes 40 000   40 000
Charges de personnel 400 000 100 000 300 000
Dotations aux amortissements 260 000   260 000
Total des charges 1 700 000 960 000 740 000

Les charges de personnel variables correspondent principalement aux heures supplémentaires réalisées par le personnel.

Cette distinction permet d’obtenir le tableau de résultat différentiel suivant :

  Montant %age CA
Chiffre d’affaires HT (CAHT) 1 750 000 100 %
Charges variables (CV) 960 000  
Marge sur coût variable (M/CV) 790 000 45,14%
Charges fixes (CF) 740 000  
Résultat d’exploitation (R) 50 000 2,9%

La société Peau douce réalise une marge, après déduction des coûts variables de 790.000 € soit un taux de M/CV de 45,14%.

Taux de M/CV = (M/CV) / Chiffre d’affaires HT

Taux de M/CV = 790.000 / 1.750.000 = 45,14%

Pour 100 € de vente, l’entreprise réalise une marge sur coût variable de 45,14 €.

Taux de rentabilité = Résultat d’exploitation / Chiffre d’affaires

Taux de rentabilité = 50 000 / 1 750 000 = 2,9%

Pour 100 € vendu, la société Peau douce réalise un bénéfice de 2,90 €. Contrairement au taux de M/CV, ce taux de rentabilité diffère en fonction du niveau des ventes.

Le taux de marge sur coût variable peut également être retrouvé par un raisonnement unitaire :

  Montant % Prix Vente
Prix de vente 25,00 100 %
Coût variable = 960.000 / 70.000 13,71  
Marge sur coût variable unitaire 11,29 45,14%

Taux de M/CV = 11,29 / 25 = 45,14%

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Le seuil de rentabilité

La formule du seuil de rentabilité

La distinction entre charges variables et charges fixes permet également le calcul du seuil de rentabilité.

Également appelé chiffre d’affaires critique, le seuil de rentabilité correspond au chiffre d’affaires pour lequel le résultat est égal à zéro.

Le seuil de rentabilité est déterminé grâce à la formule suivante :

CA critique ou seuil de rentabilité = Charges fixes / Taux de M/CV

Cette formule est déterminée à partir des égalités suivantes :

Marge sur coût variable = CA x taux de M/CV

Marge sur coût variable – Charges fixes = Résultat

CA critique x taux de M/CV – Charges fixes = 0

D’où CA critique = Charges fixes / Taux de M/CV

Le seuil de rentabilité de la société Peau douce

Seuil de rentabilité = Charges fixes / taux de M/CV

Seuil de rentabilité (ou CA critique) = 740.000 / 45,14% = 1.639.241 €.

La société Peau douce commence à faire des bénéfices à partir d’un chiffre d’affaires de 1.639.241 €.

Il est également possible d’exprimer ce seuil de rentabilité en quantité (SRq).

SRq = Seuil de rentabilité en valeur / Prix de vente = 1.639.241 € / 25 € = 65.570 produits

La société Peau douce réalise des bénéfices à partir de 65.570 produits vendus par an.

Le seuil de rentabilité comme outil de gestion

Le seuil de rentabilité est régulièrement utilisé comme outil de gestion.

L’objectif pour une entreprise est de réduire le seuil de rentabilité, donc le chiffre d’affaires minimum assurant un bénéfice.

Ce raisonnement entraîne une baisse du risque et une meilleure résistance et flexibilité de l’entreprise en cas de conjoncture difficile.

Dans un but de réduction du seuil de rentabilité, en utilisant la formule « seuil de rentabilité = Charges fixes / taux de marge sur coût variable » on aboutit généralement à un raisonnement qui encourage à substituer des coûts fixes par des coûts variables. Ces derniers peuvent, il est vrai, être supprimés plus facilement.

Cette technique se traduit souvent par un phénomène de sous-traitance. Pour réduire les coûts fixes, les entreprises préfèrent ainsi ne plus réaliser ou gérer certaines tâches en interne et les confier à un sous-traitant. Les coûts fixes sont alors remplacés par des coûts variables. L’intérim répond notamment à cette logique.

Chaque entreprise cherche ainsi l’équilibre entre le résultat (bénéfice) et le risque (seuil de rentabilité). On constate la plupart du temps qu’une entreprise optant pour une structure à coûts fixes plus élevés (internalisation de plus d’activités) subira un seuil de rentabilité et donc un risque plus élevé, mais profitera davantage d’une conjoncture favorable (bénéfice plus élevé grâce à des coûts variables plus faibles et des coûts fixes répartis sur une plus grande quantité vendue).

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