Sanctionner un salarié suite à une faute

Vous venez d’avoir connaissance d’une faute commise par l’un de vos salariés ? Selon vous, ce salarié mérite incontestablement d’être sanctionné… Mais dans quelles conditions pouvez-vous agir ?

A côté de votre pouvoir de direction, vous avez la possibilité d’exercer sur vos salariés un pouvoir disciplinaire issu de l’une des quatre lois Auroux du 4 août 1982. Ce pouvoir disciplinaire s’exerce quelle que soit l’activité de l’entreprise, son effectif ou encore, son statut.

Cet article a été publié il y a 7 ans, 6 mois.
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Sanctionner un salarié suite à une faute

Nous allons tenter de répondre dans ce dossier à toutes les questions que vous pouvez vous poser pour sanctionner un salarié : Qu’est-ce qu’une faute disciplinaire ? Quelles sont les sanctions autorisées ? Au contraire, quelles sont les sanctions interdites ? Quelle est la procédure disciplinaire à respecter ? Quel est le rôle éventuel du juge ? Etc.

Qu’est-ce qu’une faute disciplinaire ?

Il n’existe aucune définition légale de la faute disciplinaire, ni dans le texte de la loi du 4 août 1982, ni d’ailleurs dans tout autre texte ultérieur.

D’une manière générale, la faute du salarié peut donc se définir comme un manquement du salarié à ses obligations professionnelles. Ainsi, le comportement du salarié peut être considéré comme fautif dès lors qu’il ne correspond pas à l’exécution normale du contrat de travail.

En revanche, l’exercice normal d’un droit ne peut jamais être constitutif d’une faute. Il en est ainsi de l’exercice normal du droit de grève, du droit d’expression, du droit d’exercer une activité syndicale, du droit de refuser de passer à temps partiel, du droit de refuser de suivre une formation hors temps de travail, du droit de retrait, etc.

Quelles sont les différents types de sanctions pouvant être infligées au salarié ?

Bien qu’il existe une grande diversité de fautes pouvant être infligées à un salarié, certains principes doivent être systématiquement appliqués. Ainsi, un même fait fautif ne peut donner lieu à deux sanctions successives. C’est ce principe que l’on retrouve sous les termes « non bis in idem ». En pratique, cela signifie que si des retards répétés ont fait l’objet d’un avertissement, ils ne peuvent plus, par la suite, être à nouveau sanctionnés par un licenciement, sauf bien entendu si de nouveaux retards se sont reproduits par la suite.

Par ailleurs, toutes les sanctions sont prescrites par trois ans. Cela signifie qu’aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l’engagement de nouvelles poursuites disciplinaires ne peut plus être invoquée pour sanctionner de manière plus grave les faits reprochés au salarié.

Cela dit, distinguons les sanctions autorisées des sanctions prohibées.

Les sanctions autorisées

Le Code du travail donne une définition générale de la sanction.  Ainsi, selon l’article L1331-1 de ce code constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

Cette définition ne permet pas de définir précisément les différentes sanctions. Mais une chose est certaine : la sanction doit être proportionnée et justifiée par rapport aux faits reprochés au salarié.

En pratique, les sanctions sont multiples. On peut cependant affirmer que les sanctions les plus courantes sont les suivantes : l’avertissement, le blâme, la mise à pied disciplinaire, la mutation, la rétrogradation ou encore, le licenciement.

Attention. La mise à pied disciplinaire ne doit pas se confondre avec la mise à pied conservatoire qui ne constitue qu’une mesure provisoire.

Pour constituer juridiquement une sanction disciplinaire, une sanction doit nécessairement être écrite. Un mail envoyé par l’employeur à un salarié pour lui reprocher tel comportement ou telle faute doit être considéré comme un avertissement écrit. Au contraire, une observation orale ne constitue pas une sanction. Par ailleurs, il est établi que la sanction ne peut résulter d’une abstention de l’employeur. Cela signifie que la sanction ne peut prendre la forme d’une absence d’augmentation, d’un retard dans le tableau d’avancement, etc.

Notons enfin que la sanction, mise à part le licenciement, doit obligatoirement figurer dans le règlement intérieur, obligatoire dans les entreprises d’au moins 20 salariés. Le règlement intérieur peut également mentionner le type de comportement constitutif d’une faute. Par exemple, le règlement intérieur peut prévoir que de multiples retards donnent lieu à un avertissement.

Les sanctions interdites

Certaines sanctions sont totalement prohibées. Il s’agit des sanctions discriminatoires et des sanctions pécuniaires.

Ainsi, l’article L1132-1 du Code du travail prévoit que l’employeur ne peut pas sanctionner un salarié pour une raison discriminatoire. En effet, selon ce texte, aucun salarié ne peut être sanctionné en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français.

Tous ces éléments appartiennent à la vie privée du salarié et l’employeur ne peut en aucun cas s’appuyer sur un de ces éléments.

Par ailleurs, l’employeur ne peut apporter de restrictions aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives que si elles sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché (article L1121-1 du Code du Travail). Ainsi, les juges peuvent considérer qu’une sanction disciplinaire est justifiée si la tenue vestimentaire du salarié est incompatible avec ses fonctions et ses conditions de travail.

De même, l’article L1331-2 du Code du travail énonce que l’employeur ne peut infliger au salarié aucune amende ou autre sanction pécuniaire. Toute disposition ou stipulation contraire est réputée non écrite. L’employeur qui inflige une sanction pécuniaire doit ainsi rembourser au salarié la somme ainsi retenue et se voit contraint de payer une amende de 3750 euros.

Attention ! Il ne faut pas confondre la sanction pécuniaire qui est certes prohibée avec la sanction disciplinaire qui pourrait avoir des répercussions pécuniaires. En effet, la mise à pied disciplinaire, période de suspension du contrat de travail pendant laquelle le salarié n’est pas payé, n’est pas considérée comme une sanction pécuniaire. C’est une sanction autorisée.

Comment agir pour sanctionner un salarié ?

Le délai pour sanctionner le salarié 

Selon l’article L1332-4 du Code du travail, à partir du moment où la faute est constatée, l’employeur dispose d’un délai de deux mois pour sanctionner le salarié concerné.

Bon à savoir. Si la faute du salarié donne lieu à des poursuites pénales, le délai de deux mois est interrompu. L’employeur pourra sanctionner le salarié après que l’affaire ait été jugée au pénal.

En pratique, le délai de deux mois débute le jour où l’employeur a eu une connaissance exacte et complète des faits reprochés. Passé ce délai de deux mois, la faute ne peut plus faire l’objet d’une sanction. La faute est considérée comme prescrite. Elle peut cependant être invoquée à l’occasion d’une nouvelle faute.

Les étapes de la procédure disciplinaire

Les différentes étapes de la procédure disciplinaire sont prévues par l’article L1332-2 du Code du travail. Cet article rappelle que l’employeur qui souhaite sanctionner un salarié doit lui envoyer une convocation à un entretien préalable. Ce n’est qu’après l’organisation de cet entretien que l’employeur peut notifier au salarié sa sanction.

Bon à savoir. Même si la convention collective ou le règlement intérieur prévoit une procédure disciplinaire spécifique, les principes de base énoncés par la loi doivent être respectées.

La convocation à l’entretien préalable

L’employeur a l’obligation d’organiser un entretien préalable sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature qui n’a pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.

Le salarié est donc convoqué par écrit à cet entretien préalable dans les deux mois de la connaissance des faits.

En pratique, la convocation doit être remise en main propre contre décharge ou envoyée en recommandé (article R1332-1 du Code du Travail). Cette convocation doit comporter les informations suivantes : l’objet de l’entretien, la date, l’heure, le lieu de l’entretien et la possibilité pour le salarié de se faire assister par une personne appartenant à l’entreprise.

Le déroulement de l’entretien préalable

Au cours de l’entretien préalable, l’employeur doit indiquer le motif de la sanction. Le salarié peut ainsi se défendre en apportant des explications concernant les faits qui lui sont reprochés.

La notification de la sanction

Dès que l’entretien a eu lieu, l’employeur doit notifier au salarié la sanction infligée et son motif.

Pour les sanctions dites mineures, c’est-à-dire celles n’ayant pas fait l’objet d’entretien préalable, il n’existe pas de délai à respecter pour la notification de la sanction.

En revanche, si la sanction fait suite à un entretien préalable, la notification ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien (article L1332-2 du Code du Travail).

Quel rôle pour le juge en cas de litige ?

Bien entendu, le salarié sanctionné peut contester la sanction disciplinaire devant le Conseil des prud’hommes.

Le rôle du juge va alors consister à contrôler le bien-fondé de la sanction. Il va ainsi apprécier si la procédure suivie est régulière et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier la sanction (c’est-à-dire vérifier si cette sanction n’est pas injustifiée ou disproportionnée à la faute commise).

C’est à l’employeur de fournir la preuve que la sanction est régulière, justifiée ou proportionnée à la faute commise. Si un doute subsiste, il profite au salarié (article L1333-1 du Code du travail).

Si le juge constate que la sanction est irrégulière, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise, il peut alors l’annuler (article L1333-2 du code du travail) mais en aucun cas il ne peut la modifier. L’employeur peut toutefois prendre une nouvelle sanction si celle contestée est jugée disproportionnée aux faits. En revanche, aucune nouvelle sanction ne peut être prise si la sanction contestée est déclarée irrégulière ou injustifiée.

Notons que le salarié peut demander des dommages et intérêts s’il parvient à démontrer que la sanction prise à son encontre lui a porté préjudice.

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