Il est probable que son contenu ne soit plus à jour.
Partager la publication "Actualité sur le droit disciplinaire et les ruptures de contrat de travail"
- Actualité 1 : La responsabilité civile et licenciement pour faute grave
- Actualité 2 : Licencier un salarié qui a refusé de prêter le serment pour des raisons religieuses
- Actualité 3 : Procédure de licenciement suite à une reconnaissance d’inaptitude
- Actualité 4 : Effets d’une prise d’acte effectuée par un représentant du personnel
- Actualité 5 : Opposition au transfert de son contrat de travail dans le secteur public
- Actualité 6 : Dernières jurisprudences sur le licenciement pour motif économique
La responsabilité civile d’un salarié peut-elle être engagée dans une hypothèse de licenciement pour faute grave
(Cass. Soc., 25 janv. 2017, no 17-26071, no 15-21352, 15-27365)
Dans deux de ces trois affaires, les cours d’appel avaient estimé que la faute, qualifiée de grave et justifiant le licenciement des salariés, avaient occasionné un préjudice pour l’entreprise, engageant ainsi la responsabilité pécuniaire des intéressés.
En effet, les salariés ont été jugés pour avoir exécuté de façon déloyale leurs obligations contractuelles et avoir, dans le premier arrêt, délibérément exposé l’entreprise à de lourdes conséquences en laissant une personne sans permis valable conduire un poids lourd et, dans le deuxième, détourné des clients au profit d’une entreprise dans laquelle il était directement intéressé.
Or, la Cour de cassation estime que la responsabilité pécuniaire d’un salarié ne peut être engagée qu’en présence d’une faute reconnue comme lourde.
Dans la troisième affaire, un salarié est licencié pour faute lourde et condamné à verser des dommages-intérêts à ses deux employeurs car, eu égard à ses responsabilités et ses missions dans l’administration des deux entreprises, il ne pouvait ignorer, selon les juges, que par ses actes déloyaux il leur nuisait.
Or, la Cour de cassation estime, en l’espèce, que les juges n’ont pas établi l’intention de nuire, inhérente à la qualification de faute lourde, et par la même, ne pouvait donc engager la responsabilité pécuniaire de l’intéressé.
Peut-on licencier un salarié qui a refusé de prêter le serment pour des raisons religieuses alors que cela est nécessaire à l’exercice de certaines fonctions ?
(Cass. Soc., 1er fev. 2016, no 16-10459)
Dans cette affaire, une salariée est licenciée pour faute grave par la RATP, au motif qu’elle n’a pas prêté serment devant le président du TGI, lors de son recrutement en qualité d’animateur agent mobile au sein d’une unité opérationnelle, l’empêchant de remplir ses fonctions.
Or, la salariée avait, lors de la cérémonie, proposé une formulation reprenant la formule légale et compatible avec ses convictions religieuses chrétiennes. Mais cette solution est refusée par le magistrat alors que des décisions précédentes avaient admis la substitution de la formule.
La salariée conteste son licenciement alors que l’employeur estime qu’il ne lui « appartenait ni de programmer une nouvelle cérémonie d’assermentation ni de convaincre l’autorité judiciaire d’accepter la formule proposée par la salariée ».
La cour de cassation estime que le licenciement est nul car fondé sur un motif discriminant, à savoir les convictions religieuses.
En l’absence de poste de reclassement suite à une reconnaissance d’inaptitude, l’employeur peut-il engager la procédure de licenciement et en informer le salarié lors de l’entretien puis dans la lettre de notification de la rupture ?
(Cass. Soc., 11 janvier 2017, no 15-19959)
La Cour de cassation estime que l’employeur doit d’abord informer par écrit le salarié de l’absence de solution de reclassement avant d’engager la procédure de licenciement. Après la remise ou l’envoi de cette lettre, la convocation à l’entretien préalable pourra être envisagée.
Quelle est la situation justifiant une prise d’acte effectuée par un représentant du personnel et quels en sont les effets ?
(Cass. Soc., 8 fev. 2017, no 15-14874)
Si dans une décision récente, la cour de cassation estime que le seul fait de ne pas prévoir de visite médicale d’embauche n’était pas d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail et justifier ainsi une prise en acte, une nouvelle décision nuance cette position.
Dans cette affaire, en effet, une déléguée du personnel avait pris acte de la rupture de son contrat de travail car son employeur n’avait organisé ni sa visite médicale d’embauche, ni ses visites périodiques, ni sa visite de reprise suite à un accident du travail. La Cour de cassation estime ici que ces manquements, de par leur accumulation, étaient suffisamment graves et étaient de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail. Or, cette prise d’acte étant pratiquée par un représentant du personnel, il y a lieu de considérer qu’elle produit les effets d’un licenciement nul.
Un salarié peut-il s’opposer à un transfert de son contrat de travail dans le secteur public et quelles en sont les éventuelles conséquences ?
(Cass. Soc., 1er fev. 2017, no 15-18480 et 481, 10 janv. 2017, no 15-14775)
Il s’agit ici de plusieurs affaires qui concernent la reprise, en gestion directe, par des collectivités locales, en l’espèce des communes ou des centres communaux d’action sociale, d’activités réalisées par des associations, financées d’ailleurs principalement par ces collectivités.
Or, selon l’article L 1224-1, les contrats de travail en cours sont automatiquement transférés dans la nouvelle structure. Néanmoins, l’article L 1224-3 prévoit, compte tenu du caractère particulier de la situation, qu’ « il appartient à la personne publique de proposer aux salariés un contrat de droit public, sachant que les clauses « substantielles » du contrat de travail sont reprises, sauf si les dispositions légales ou les conditions générales de rémunération et d’emploi des agents non titulaires de la personne publique se révèlent incompatibles avec lesdites clauses». Et, en cas de refus des salariés, le contrat « prend fin de plein droit » mais en suivant les dispositions prévues à cet effet par le Code du travail.
La Cour de cassation a déjà précisé qu’il faut considérer cette rupture comme un licenciement « sui generis » et les présents arrêts donnent des précisions sur la procédure qu’il convient de suivre et l’impact d’une irrégularité.
Ainsi, il appartient à la personne publique de notifier la rupture du contrat de travail par écrit après avoir informé les salariés des conditions de leur passage dans les statuts public et avoir recueilli le refus express des salariés. Par ailleurs, la suspension du contrat de travail en raison d’un accident du travail ne remet pas en cause la rupture et n’empêche pas l’institution de la notifier.
La Cour de cassation écarte, cependant, l’obligation de respecter un entretien préalable et estime que si la rupture prononcée « produit les effets d’un licenciement » les dispositions relatives à la convocation à l’entretien préalable « en cas de licenciement pour motif personnel » ne sont pas applicables.
En revanche, il appartient à la personne publique de notifier la rupture du contrat de travail par écrit, et le salarié est en droit d’effectuer son préavis selon les dispositions légales ou conventionnelles prévues dans le cadre du droit privé ou de percevoir une indemnité compensatrice de préavis, sauf si le salarié est à l’origine de sa non-exécution. Et, pendant le préavis, le contrat initial continue, le salarié ayant refusé le transfert et l’application des règles de droit public.
Enfin, en cas d’irrégularité de procédure, la rupture reste fondée, seuls des dommages-intérêts peuvent être octroyés en fonction du préjudice subi.
Dernières jurisprudences sur le licenciement pour motif économique ?
(CE, 1er février 2017, no 391744 et CE, 1er février 2017, no 387886)
Lorsqu’une entreprise de plus de 50 salariés envisage de licencier plus de 10 personnes sur une période de 30 jours, elle se doit de mettre en place une PSE. Celui-ci peut prendre la forme soit d’un accord collectif validé par la Direccte, soit d’un document établi unilatéralement par l’employeur et soumis alors à l’homologation de la Direccte après consultation du CE, constituant un contrôle plus lourd de la part de l’administration.
Dans ce dernier cas, la Direccte doit en effet :
- S’assurer que la procédure d’information/consultation du CE (et éventuellement du CHSCT) a été régulière ;
- Vérifier la conformité du plan aux dispositions législatives et règles conventionnelles applicables ;
- Apprécier, au regard de l’importance du projet de licenciement, si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si elles sont, dans leur ensemble, propres à satisfaire aux objectifs de maintien dans l’emploi, compte tenu des efforts de formation et d’adaptation déjà réalisés par l’employeur et des moyens dont dispose l’entreprise ;
- S’assurer que le plan de reclassement intégré au PSE est de nature à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité.
Dans le présent arrêt, le Conseil d’état estime que la décision de l’administration doit justifier aussi bien les raisons qui la conduisent à ne pas homologuer le plan que celles qui fondent une décision positive.
Dans la deuxième affaire, le Conseil d’état aborde la manière de prendre en considération les critères d’ordre de licenciement. En effet, le choix des salariés licenciés doit être fondé sur des critères spécifiques appliqués par catégorie professionnelle. Ces critères sont fixés avec les syndicats ou, par l’employeur seul, après consultation des représentants du personnel et doivent prendre en considération notamment ceux fixés par le Code du travail, à savoir :
- Les charges de famille et en particulier celles des parents isolés ;
- L’ancienneté dans l’établissement ou l’entreprise ;
- La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment des personnes handicapées et des salariés âgés ;
- Les qualités professionnelles.
S’il est possible d’affecter des coefficients de pondération à chacun, ils doivent non seulement être tous pris en considération mais donner lieu à une appréciation différenciée selon les salariés. En l’espèce, des points étaient attribués selon le nombre d’années d’ancienneté et d’enfants à charge, selon la présence d’une situation de handicap ou d’un congé en cours pour maternité ou accident du travail. En revanche, les qualifications professionnelles donnaient lieu à l’attribution d’un point à tous les salariés. Or, il a été jugé que l’attribution d’une valeur identique à tous équivalait à une absence de prise en considération du critère.
Il est donc impératif de prévoir une modulation de chacun des critères.