L’autoliquidation de la TVA sur les importations

Jusqu'en 2015, la plupart des entreprises françaises qui importaient des marchandises d'un pays non membre de l'Union européenne devaient payer la TVA aux douanes françaises. Même si cette TVA est déductible, il en résultait une avance de trésorerie qui pouvait être particulièrement préjudiciable pour les opérations d'un montant important. En 2016, deux textes (la loi sur l'économie bleue et la loi de finances rectificative pour 2016) permettant aux entreprises d'autoliquider la TVA ont été adoptés. La grande majorité des importateurs réguliers pourront en bénéficier et n'auront plus de TVA à avancer.

Cet article a été publié il y a 7 ans, 8 mois.
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Importations : auto-liquidation de la TVA

Règlementation antérieure à 2015

Importations et acquisitions intracommunautaires

Les importations, au sens fiscal du terme, sont des acquisitions de biens en provenance d’un État tiers à l’Union européenne.

L’Union européenne comprend aujourd’hui 28 États membres : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Bulgarie, Chypre, la Croatie, le Danemark, l’Estonie, l’Espagne, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Irlande, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Slovénie, la Slovaquie, la Suède, la République Tchèque.

Les achats en provenance de ces pays constituent des acquisitions intracommunautaires. Sous condition de transmission au fournisseur, du numéro d’identification à la TVA du client, ce dernier reçoit une facture HT sans TVA. Le client autoliquide alors la TVA au taux de TVA de son pays. L’autoliquidation signifie que sur l’opération, la TVA est à la fois collectée et déductible. Dans le cas général, ce mécanisme est neutre pour la trésorerie de l’entreprise.

Les achats en provenance d’autres Etats que les 28 pays membres de l’Union européenne constituent des importations. Tel est le cas par exemple, lorsqu’une entreprise française achète des marchandises à un fournisseur suisse. Pour l’exportateur, l’opération est exonérée de TVA. En revanche, l’importateur français est soumis à la TVA française. Cette TVA n’est pas inscrite sur la facture, mais doit être payée à la douane française. Dans la pratique, les transitaires assurent le transport de la marchandise et la réalisation des formalités administratives douanières. Ils avancent ainsi les droits de douane et la TVA à leur client, TVA qu’ils vont ensuite évidemment leur refacturer.

Exemple simplifié – énoncé

Une entreprise française acquiert des marchandises auprès d’un client suisse pour 10.000 € HT. Le transport des marchandises est réalisé par un transitaire français. Ce dernier refacture à l’entreprise française, des frais de transport et de gestion pour 1.000 € HT, ainsi que la TVA qu’il a avancée aux douanes françaises. Nous faisons abstraction des droits de douane ici.

Facture du transitaire français :

 

Frais de transport France – Suisse et frais de gestion 1.000
TVA à 20% (1.000 x 20%) 200
Refacturation de la TVA sur les marchandises importées (10.000 x 20%) 2.000
Net à payer 3.200

La spécificité de ces factures résulte de la proportion de TVA qui constitue l’essentiel du montant de la facture.

Exemple simplifié – Enregistrements comptables

1ère opération  – facture du fournisseur suisse

N° de compte Libellé du compte Débit Crédit
607 Achats de marchandises 10.000  
401 Fournisseur (dette)   10.000

2ème opération – facture du transitaire

N° de compte Libellé du compte Débit Crédit
624 (et 6224) Frais de transport (et rémunération des transitaires pour le compte 6224) 1.000  
44566 TVA déductible (2.000 + 200) 2.200  
401 Fournisseur   3.200

2015 : autoliquidation possible pour les titulaires d’une PDU

Pour permettre de supprimer l’avance de trésorerie correspondant à la TVA, plusieurs réformes ont progressivement permis aux importateurs d’autoliquider la TVA, à l’image de ce qui est pratiqué pour les acquisitions intracommunautaires.

L’article 52 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 autorise dans un premier temps, la pratique de l’autoliquidation de la TVA pour les importations  depuis le 1er janvier 2015 mais uniquement pour les personnes assujetties à la TVA, disposant d’un agrément à une procédure douanière simplifiée de dédouanement avec domiciliation unique. Ces personnes disposent d’une PDU (procédure de dédouanement unique).

Cet agrément était obtenu après un audit douanier.

Moins de 500 entreprises ont bénéficié de cette procédure et de la possibilité d’autoliquider la tva sur les importations.

Loi sur l’économie bleue : généralisation de l’autoliquidation

Afin de faire profiter des bénéfices de l’autoliquidation à davantage d’entreprises, l’article 27 de la loi 2016-816 du 20 juin 2016 (entrée en vigueur le 22 juin), dite loi pour « l’économie bleue » a supprimé l’obligation de disposer d’une PDU.

Toutes les entreprises répondant aux 3 conditions suivantes peuvent selon cette loi autoliquider la TVA sur les importations :

  • bonne gestion des écritures douanières,
  • absence d’infractions douanières et fiscales graves,
  • solvabilité financière (absence de procédure collective notamment).

Pour cela, il suffisait aux importateurs souhaitant bénéficier de cette procédure de remplir une simple demande auprès des douanes, au PAE compétent (pôle d’activité économique). L’option vaut pour 3 ans.
Même si cette loi est entrée en vigueur le 22 juin dernier, la direction générale des douanes et des droits indirects avait reporté au 1er octobre 2016 son application. Mais même avant cette date, les entreprises ont pu faire parvenir leur demande.

La loi de finances rectificative pour 2016

4 conditions pour autoliquider

Cette généralisation de l’autoliquidation n’est pas sans risque pour les finances publiques. À l’image de ce qui est pratiqué pour les opérations intracommunautaires, une recrudescence des fraudes de type carrousel est crainte. Le ministère des Finances a ainsi proposé des conditions plus restrictives.

Initialement prévue dans le projet de loi Sapin 2 mais censurée par le Conseil constitutionnel, ces nouvelles conditions ont finalement intégré la loi de finances rectificative pour 2016 (article 87, IV.1°).

4 conditions doivent désormais être remplies (article 1695 II 1° du CGI) :

  • avoir effectué au moins 4 importations au sein de l’Union européenne au cours des 12 derniers mois précédant la demande (nouvelle condition par rapport à la loi sur l’économie bleue)
  • disposer d’un système de gestion des écritures douanières et fiscales permettant le suivi des opérations d’importation (une attestation de cette gestion sur le formulaire de demande déposé aux douanes suffit),
  • justifier de l’absence d’infractions graves ou répétées aux dispositions douanières et fiscales
  • justifier d’une solvabilité financière leur permettant de s’acquitter de leurs engagements au cours des 12 derniers mois précédant la demande (absence de défaut de paiement auprès des services fiscaux et douaniers, absence de procédure collective).

La LFR 2016 précise que ces 4 conditions sont réputées respecter pour les entreprises titulaires du statut d’opérateur économique agréé (OEA), sans avoir à justifier de ces 4 conditions.

Le statut d’opérateur économique agréé (OEA) est obtenu auprès de l’administration des douanes. Il permet de bénéficier de certaines simplifications douanières.

La demande d’autorisation de l’autoliquidation de la TVA sur les importations doit à nouveau être réalisée sur un formulaire selon un modèle fixé par l’administration. Ce formulaire doit être transmis aux douanes. Ces dernières seront chargées de vérifier si l’entreprise à l’origine de la demande respecte les 4 conditions évoquées ci-dessus.

L’autorisation n’est en revanche pas acquise de manière définitive. Elle est valable à partir du premier jour du mois suivant la décision jusqu’au 31 décembre de la 3ème année suivante.

L’autorisation est renouvelée tacitement, par période de 3 années civiles. À tout moment, l’administration des douanes peut annuler cette autorisation si elle constate que les conditions d’octroi ne sont plus respectées.

Entrée en vigueur

Les nouvelles mesures intégrées dans la loi de finances rectificative pour 2016 s’appliquent aux demandes formulées à compter du 31 décembre 2016.

Il est précisé que les demandes formulées avant cette date selon les règles exposées par la loi sur l’économie bleue  restent valables. En revanche, ces demandes ne pourront bénéficier de la reconduction tacite par période de 3 années civiles.

La généralisation de l’autoliquidation de la TVA à toutes les importations pourrait concerner 7.500 entreprises françaises.

La pratique de l’autoliquidation en comptabilité et sur la CA3

Depuis 2015, la déclaration de TVA en régime réel normal (CA3) prévoit  de nouvelles cases permettant de déclarer les importations qui bénéficient du régime de l’autoliquidation :

  • la case 2B « Importations (entreprises ayant opté pour le dispositif d’autoliquidation de la TVA à l’importation) » pour le montant HT de l’importation
  • la case 7C « dont TVA sur importations bénéficiant du dispositif d’autoliquidation ».

Reprise de l’exemple de l’importation auprès d’un fournisseur suisse avec option pour le dispositif d’autoliquidation :

En cas d’option pour l’autoliquidation, l’importateur français traitera la facture du fournisseur suisse de la manière suivante en comptabilité :

N° de compte Libellé du compte Débit Crédit
607 Achats de marchandises 10.000  
401 Fournisseur (dette)   10.000
44566(.) TVA déductible sur autres biens et services 2.000  
445(.) TVA due sur achats de marchandises   2.000

La facture envoyée par le transitaire se trouve simplifiée. La TVA n’est plus avancée ni refacturée par le transitaire.

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Facture du transitaire français :

 

Frais de transport France – Suisse et frais de gestion 1.000
TVA à 20% (1.000 x 20%) 200
Net à payer 1.200
N° de compte Libellé du compte Débit Crédit
624 (et 6224) Frais de transport (et rémunération des transitaires pour le compte 6224) 1.000  
44566 TVA déductible 200  
401 Fournisseur   1.200

Dans la CA3 du mois concerné, les montants suivants seront renseignés :

  • ligne 2B : 10.000
  • ligne 8 (TVA brute, taux normal 20%) : 10.000 en colonne « base hors taxe » et 2.000 en colonne « taxe due »
  • ligne 7C : 2.000
  • ligne 20 (TVA déductible sur autres biens et services) : 2.000 (TVA autoliquidée sur les importations) + 200 (TVA déductible sur la prestation du transitaire).

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6 réponses pour L’autoliquidation de la TVA sur les importations

  1. Bonjour,

    Sur la ligne 20 de la déclaration de TVA CA3, on va pouvoir inscrire la TVA déductible sur les importations alors???
    Il y aura une TVA collectée et une TVA déductible comme les acquisitions intracommunautaires alors??

    Merci bien de votre réponse…

  2. Bonjour,
    Effectivement, si les 4 conditions mentionnées dans l’article sont bien réunies, l’importateur va pouvoir autoliquider la TVA en la mentionnant en TVA collectée mais également en TVA déductible, ligne 20 (TVA sur autres biens et services), de la même manière que pour les acquisitions intracommunautaires.
    La base HT doit être mentionnée ligne 2B, et un rappel du montant de la TVA autoliquidée sur les importations est nécessaire ligne 7C.

    1. Bonjour,
      Merci pour cet article très détaillé, et qui permet d’y voir plus clair.
      Au niveau comptable, savez vous si l’ANC a préconisé l’utilisation de certains comptes pour cette autoliquidation, comme elle l’avait fait pour la TVA DUE INTRACOMMUNAUTAIRE (445200) ?

      Merci d’avance de votre réponse.
      Cordialement,

  3. Bonjour,
    Qu’en est il de la cohérence entre dédouanement sous le régime de l’autoliquidation, écritures comtpable et CA3 dans des cas d’échantillons, de gratuit ou de pièce retournée ? Dans chacun des cas, le fournisseur ne fait rien payer, donc en comptabilité, valeur 0 euro, mais ces éléments ont bien passé la frontière et ont fait l’objet d’une déclaration avec une valeur statistique. Dois je malgrés tout le faire figurer sur la CA3 ?
    merci pour vos éclairages

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