Heures supplémentaires : les changements apportés par la loi Travail

La loi du 8 août 2016 « relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels », dite loi Travail, définitivement adoptée par le Parlement le 21 juillet 2016, a été publiée au Journal officiel le 9 août 2016.

Parmi les nombreux changements apportés par ce texte de loi, figurent certaines dispositions de la réglementation relative aux heures supplémentaires, plus précisément la question de la majoration de rémunération mais aussi celle du décompte de ces heures. Avant d’aborder ces nouvelles dispositions mises en place par la loi Travail, nous allons rappeler les règles auparavant applicables.

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Heures supplémentaires loi travail

Heures supplémentaires : rappel des règles applicables avant la loi Travail

Par définition, une heure supplémentaire est une heure accomplie au-delà de la durée légale, fixée à 35 heures par semaine, ou au-delà de la durée considérée comme équivalente (C. trav. art. L3121-28).

Attention ! L’heure supplémentaire ne se confond donc pas avec l’heure complémentaire. L’heure complémentaire est une heure de travail effectuée au-delà de l’horaire prévu au contrat de travail d’un salarié travaillant à temps partiel. Les heures complémentaires ne concernent donc que les heures accomplies en-deçà de la durée légale du travail.

Jusqu’à présent, le Code du travail prévoyait que le décompte des heures supplémentaire s’effectuait sur la semaine civile, c’est-à-dire du lundi 00h00 au dimanche 24h.

Ces heures supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale du travail sont majorées, c’est-à-dire qu’elles sont rémunérées de façon plus favorable que les heures « normales », c’est-à-dire celles accomplies dans la limite de la durée légale. Avant l’application de la loi Travail, les heures supplémentaires étaient majorées selon les taux suivants (C. trav. art. L3121-22 dans sa version antérieure au 10 août 2016) :

  • 25% pour les 8 premières heures supplémentaires ;
  • 50% pour les heures supplémentaires suivantes.

Exemple. Un salarié était rémunéré 12,15 euros/heure. On appliquait donc les majorations de 25% pour les 8 premières heures et 50% pour les heures suivantes.

Le salaire horaire était majoré de 25% pour les 8 premières heures supplémentaires effectuées, ce qui représentait un salaire horaire de :
12,15 + (12,15 x 25%) soit 15,18 euros.

Pour les heures supplémentaires suivantes, le salaire horaire était majoré de 50% soit :  12,15 + (12,15 x 50%) = 18,22 euros.

Il est intéressant de noter qu’avant même la loi Travail, un accord de branche étendu ou un accord d’entreprise pouvait prévoir un taux de majoration différent sans toutefois que celui-ci soit inférieur à 10 %. De même, à condition de respecter certaines conditions, l’accord d’entreprise pouvait déroger (dans un sens moins favorable) aux dispositions prévues par un accord de branche conclu depuis la loi du 4 mai 2004, sauf si ce dernier accord s’y opposait expressément (on parle alors de clause de verrouillage). En pratique, peu de branches ont autorisé les accords d’entreprise à prévoir un taux de majoration des heures supplémentaires inférieur (C. trav. art. L3121-22 dans sa version antérieure au 10 août 2016). Si l’accord de branche avait été conclu avant la loi du 4 mai 2004, les dispositions d’un accord inférieur, notamment un accord d’entreprise, ne pouvaient pas être moins favorables.

Quelles sont les nouvelles dispositions concernant les heures supplémentaires introduites par la loi Travail ?

Etudions ici les dispositions relatives au taux de la majoration des heures supplémentaires ainsi que celles relatives aux modalités de décompte des heures supplémentaires.

Un taux de majoration des heures supplémentaires défini par accord

Désormais, ce sont les conventions ou les accords collectifs d’entreprise ou d’établissement et à défaut, les conventions ou les accords de branche qui déterminent le taux de majoration applicable aux heures supplémentaires. Ce n’est que si aucun accord n’est conclu que les heures supplémentaires donnent lieu à une majoration de 25% et 50% (C. trav. art. L3121-33 et art. L3121-36).

Rappelons que les accords d’entreprise sont négociés entre l’employeur et les délégués syndicaux ou à défaut, entre l’employeur et les représentants élus du personnel au comité d’entreprise. Par ailleurs, la nouvelle loi prévoit explicitement de faire primer l’accord d’entreprise ou d’établissement sur l’accord de branche, indépendamment de la date à laquelle l’accord de branche a été conclu (C. trav. art. L3121-33, 1°). Peu importe si les dispositions de l’accord d’entreprise sont plus ou moins favorables que l’accord de branche. A priori, cette nouvelle réglementation offre moins de sécurité juridique aux salariés… Même si les conditions de validité des accords sont très strictes.

À noter : pour les accords signés avec un ou plusieurs délégués syndicaux, la loi pose le principe de l’accord « majoritaire ». Cette nouvelle règle sera applicable à partir du 1er janvier 2017 en matière de durée du travail. L’accord collectif conclu avec les DS ne sera valide qu’aux conditions suivantes (C. trav. art. L2232-12) :

  • soit après signature par des syndicats ayant obtenu plus de 50 % des voix exprimés en faveur de syndicats représentatifs au 1er tour des dernières élections professionnelles ;
  • soit si l’accord est signé par des syndicats n’ayant obtenu « que » plus de 30 %, possibilité pour ces syndicats de demander à faire valider l’accord par référendum auprès des salariés.

En revanche, l’accord signé par un représentant élu du personnel au comité d’entreprise ou à la délégation unique du personnel ou, à défaut, par un délégué du personnel mandaté doit avoir été approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés (C. trav. art. L2232-21-1).

Par ailleurs, la loi Travail n’a pas modifié les dispositions relatives à la contrepartie sous forme de repos accordée, sous certaines conditions, en plus de la majoration de salaire.

La contrepartie obligatoire en repos commence à être calculée dès lors que le salarié effectue des heures supplémentaires au-delà du contingent d’heures annuel (soit 220 heures en principe). A défaut d’accord d’entreprise, le calcul de cette contrepartie est fixé à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel pour les entreprises de moins de 21 salariés, et 100 % pour les entreprises de 21 salariés ou plus. En principe, le salarié peut bénéficier de son droit au repos dès lors que la durée de la contrepartie atteint 7 heures. Cette contrepartie peut être prise pour une journée entière ou par demi-journées.

Une nouvelle possibilité de décompter les heures supplémentaires

La Loi Travail n’évoque plus un décompte systématique des heures supplémentaires sur la semaine civile mais ouvre la possibilité d’une répartition sur une période de 7 jours consécutifs à défaut de stipulation contraire d’un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, d’un accord de branche (C. trav. art. L3121-32). Par exemple, l’accord pourra prévoir que la semaine débute le dimanche à 00h00 et se termine le samedi à 24h. Ce n’est qu’en l’absence d’accord que la semaine débute le lundi à 0 heure et se termine le dimanche à 24 heures (C. trav. art. L3121-35).

À noter : dans le cadre de l’aménagement du temps de travail supérieur à la semaine jusqu’à 3 ans mis en place par la loi Travail, les heures supplémentaires sont décomptées à la fin de période de référence, sauf si cette période de référence est supérieure à un an. En effet, si la période de référence est supérieure à un an, l’accord doit prévoir une limite hebdomadaire, supérieure à 35 heures, au-delà de laquelle les heures de travail effectuées au cours d’une même semaine constituent des heures supplémentaires dont la rémunération est payée avec le salaire du mois considéré.

Une nouvelle répartition de la semaine de travail peut avoir des conséquences importantes si un salarié est amené à effectuer plus d’heures de travail en fin de semaine qu’en début. C’est notamment le cas pour les salariés travaillant dans les restaurants, les cafés ou encore les commerces.

Imaginons un décompte qui s’effectue du dimanche à 00h00 au samedi à 24h.

Semaine A

  • J1 : dimanche – Jour de congé
  • J2 : lundi
  • J3 : mardi
  • J4 : mercredi
  • J5 : jeudi
  • J6 : vendredi
  • J7 : samedi

Semaine B

  • J8 : dimanche
  • J9 : lundi
  • J10 : mardi
  • J11 : mercredi
  • J12 : jeudi
  • J13 : vendredi
  • J14 : samedi – Jour de congé

Grâce à cette répartition des horaires, deux avantages majeurs se dégagent pour l’employeur.

1er avantage : Faire travailler un salarié plus de 6 jours consécutifs

En principe, un salarié ne peut travailler plus de 6 jours par semaine (C. trav. art. L3132-1). Si la semaine commence le dimanche à 0h00 et se termine le samedi à minuit, un employeur peut faire travailler un salarié du lundi de la semaine A (J2) jusqu’au vendredi de la semaine B (J13), soit 12 jours d’affilée sans se trouver en infraction avec la législation. En effet, dans ce cas, le premier dimanche (J1) constitue le jour de congé de la semaine A et le samedi de la deuxième semaine (J14) constitue le jour de congé de la semaine B. Le salarié peut donc travailler durant ces 12 jours sans qu’on lui accorde un seul jour de repos.

2ème avantage : Répartir les heures supplémentaires sur deux semaines consécutives

Un décompte de la semaine du dimanche à 0h00 au samedi à minuit permet d’effectuer un calcul différent des heures supplémentaires effectuées le week-end : en effet, les heures supplémentaires effectuées le samedi et dimanche (J7 et J8) se trouvent réparties sur 2 semaines au lieu d’être comptabilisées sur une seule semaine. Dans le cas d’une répartition des heures supplémentaires sur 2 semaines, l’employeur aura alors moins d’heures supplémentaires à payer au salarié.

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