Actualité Mai 2015 sur les contrats de travail et les conditions de travail

Cet article a été publié il y a 9 ans, 5 mois.
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Est-il possible de faire varier le montant de la contrepartie financière, liée à une clause de non concurrence, en fonction du mode de rupture  ? 

Selon la Cour de cassation, le montant de la contrepartie financière ne peut pas varier en fonction des circonstances ou de la nature de la rupture dans la mesure où l’obligation de non concurrence reste identique. Il n’est donc pas possible de prévoir de minorer le montant de la contrepartie en la faisant passer, comme en l’espèce, de 25 à 10 % selon que le contrat est rompu suite à un licenciement ou à une démission. Dans une telle hypothèse et pour autant que l’obligation de non concurrence est respectée, la partie de la clause minorant le montant doit être réputée non écrite et le salarié peut prétendre au montant prévu, le plus élevé, quel que soit le mode de rupture. Pour rappel, il en va autrement en l’absence de contrepartie ou de contrepartie dérisoire puisque, dans une telle hypothèse, la clause est nulle dans son intégralité. Le salarié n’est donc non seulement pas soumis à une obligation de non concurrence mais peut également demander des dommages-intérêts. (Cass. soc., 9 avril 2015, 13-25847)

 

Un changement  d’horaires s’accompagnant de la suppression d’une prime compensant les sujétions liées à l’ancien horaire doit-il s’analyser en une modification des conditions de travail ou du contrat de travail ?  

En l’espèce, un mécanicien travaillait dans le cadre d’un cycle avec des horaires alternant jour et nuit selon les semaines. Or, par note de service, l’employeur décide de modifier les horaires du cycle entrainant une fréquence moindre des horaires de nuit et le salarié refuse de les respecter conduisant ainsi à son licenciement pour motif disciplinaire. L’intéressé, estimant que ce changement impactait sa rémunération de 48,76  € par mois, du fait du versement moindre des primes de panier liées au travail de nuit, il considérait cette modification d’horaires comme une modification de son contrat de travail et non comme un changement de ses conditions de travail. Il a donc saisi la juridiction prud’homale pour que son licenciement soit jugé sans cause réelle et sérieuse, estimant qu’une telle modification ne pouvait lui être imposée. Or, la Cour de cassation considère, au contraire, que le changement des horaires de travail appartient au pouvoir de direction et d’organisation de l’employeur et que la perte d’une partie des primes de panier, liée à une moindre fréquence du travail de nuit, est légitime puisqu’il y a moins de sujétions à compenser. Par ailleurs, les Hauts magistrats relève que cette prime de panier n’est pas de nature contractuelle et que l’employeur n’avait donc pas pu s’engager à la maintenir. Il s’agit donc bien d’une modification des conditions de travail qui s’impose au salarié et non du contrat de travail qui requiert son accord. (Cass. soc., 9 avril 2015, 13-27624)

 

Quelle position adoptée en entreprise quant à l’utilisation de la cigarette électronique ?

Le projet de loi relatif à la santé, adopté en première lecture à l’assemblée Nationale,  interdirait l’usage de la cigarette électronique dans les lieux de travail fermés à usage collectif. De plus, il imposerait aux entreprises de mettre à la disposition des salariés concernés des emplacements, réservés à cet effet dont les modalités d’aménagement devraient être définies par décret, sachant que ces lieux devraient être distincts des actuels fumoirs. Néanmoins, compte tenu de l’absence de « vapotage passif avéré », l’aménagement se limiterait à une délimitation des espaces et ne contiendrait pas de contraintes en terme d’espace et de ventilation.

 

Quel est le sort des jours de RTT non pris ?         

 En l’absence de dispositions légale ou réglementaire précisant le sort des jours de RTT non pris, la Cour de cassation estime qu’il y a lieu de verser une indemnisation de ces jours :

  • soit, si l’accord le prévoit
  • soit, si le salarié n’a pas été en mesure de les prendre du fait de l’employeur.

Il appartient donc aux juges de reprendre les dispositions de l’accord collectif et/ou de s’assurer que la situation de non prise des jours est imputable à l’employeur. En revanche, en cas de préavis non effectué à la demande de l’employeur, le salarié ne peut être privé des jours de RTT dont le salarié aurait bénéficié, s’il avait travaillé durant le préavis. (Cass. soc. 18 mars 2015, 13-16369)

 

Suppression de l’autorisation préalable de l’inspection du travail pour faire effectuer des travaux dangereux à des mineurs. 

Depuis le 2 mai, l’employeur qui souhaite faire effectuer à des jeunes, de plus de 15 ans et de moins de 18 ans, des travaux dangereux, listés à l’article R. 4153-40 du Code du travail, ne doit plus obtenir une autorisation préalable mais envoyer une déclaration préalable de dérogation à l’inspection du travail qu’il doit renouveler tous les trois ans. Néanmoins, le  travail en hauteur fait toujours l’objet d’une interdiction mais avec deux dérogations possibles visées à l’article D. 4153-30 du Code du travail. Préalablement à l’exécution de ces travaux reconnus comme dangereux, l’employeur doit avoir procédé à l’évaluation des risques professionnels, mis en œuvre les actions de prévention, avoir informé le jeune des risques et lui avoir dispensé une formation à la sécurité.  Cette déclaration doit préciser :

  • le secteur d’activité de l’entreprise ;
  • les formations professionnelles assurées et les lieux de dispense ;
  • les travaux interdits nécessaires à la formation et les machines dont l’utilisation est requise ;
  • la qualité de la ou des personnes chargées d’encadrer le jeune.

Parallèlement, l’employeur doit établir et conserver à la disposition de l’inspecteur du travail les informations relatives à l’état civil de jeune, la formation suivie, son avis d’aptitude médical, la preuve de l’information et de la formation délivrée à l’intéressé et les références de la ou des personnes l’encadrant. (décrets no 2015-443 et 444 du 17 avril 2015)

 

Le développement de l’emploi dans les quartiers prioritaires.

Il est prévu que les contrats d’insertion conclus dans le secteur marchand puissent bénéficier d’une aide de 45 % du montant brut du smic, au lieu de 30,7 %, lorsqu’ils sont conclus avec des jeunes de moins de 30 ans en difficulté d’insertion qui présentent l’une des conditions suivantes :

  • résider dans un quartier prioritaire de la politique de la ville ;
  • bénéficier du RSA ;
  • être chômeur de longue durée ;
  • être en situation de handicap ;
  • avoir été suivi dans le cadre d’un dispositif de deuxième chance ;
  • avoir bénéficié d’un emploi d’avenir dans le secteur non marchand.

Par ailleurs, il est prévu de développer l’apprentissage par le biais de deux dispositifs :

  • celui dit de «réussite apprentissage » qui prévoit un accompagnement renforcé de l’apprenti pendant les premières semaines, sachant que sur les 10 000 jeunes concernés, 4 000 devront être issus des quartiers prioritaires de la ville ;
  • celui dit de l’apprentissage « zéro coût », expérimenté sur trois territoires et axé sur les jeunes décrocheurs de moins de 18 ans dont les employeurs seront exonérés de charges pendant la première année du contrat.

Enfin, il est fixé un pourcentage des emplois d’avenir (30%) et des contrats d’insertion (13%) qui doit bénéficier aux résidents des quartiers prioritaires. (circulaire interministérielle du 25 mars 2015 NOR : ETSD1507044C)

 

Modification du seuil d’exigence de remise d’une attestation de vigilance en cas de prestation de services.

Lorsqu’une entreprise conclut un contrat d’au moins 5 000 €, et non plus de 3 000 €, en vue de l’exécution d’un travail, d’une prestation de service ou d’un acte de commerce, elle doit s’assurer, au moment de la conclusion du contrat puis tous les 6 mois, que le sous-traitant respecte bien ses obligations en matière sociale en lui demandant de fournir une attestation de vigilance. Cette attestation est délivrée par l’organisme de recouvrement dont relève l’intéressé (Urssaf, RSI, MSA) et doit mentionner :

  • l’identification de l’entreprise avec sa dénomination sociale, son adresse, le numéro Siret ;
  • le fait que la personne soit à jour de ses obligations sociales à la date d’exigibilité de la dernière période traitée ;
  • si le cocontractant emploie des salariés, leur nombre, le montant total des rémunérations déclarées et de cotisations acquittées ;
  • un numéro de sécurité, afin que le donneur d’ordre puisse se rendre sur le site de l’organisme de recouvrement et s’assurer, ainsi, de l’authenticité des informations fournies.

(décret no 2015-364 du 30 mars 2015)

 

Expérimentation d’une modularisation du bilan de compétences.

Le Comité paritaire interprofessionnel national pour l’emploi et la formation a décidé d’expérimenter une modularisation du bilan de compétence pour permettre un séquençage de sa durée selon le degré d’autonomie du salarié et le niveau de maturité de son projet. Le bilan pourrait donc durer entre 10 et 24 heures pour un tarif horaire variant entre 70 et 80 €. Il ne serait donc plus systématiquement de 24 heures et son coût ne serait plus forfaitaire. Par ailleurs, un cahier des charges spécifique devrait définir l’articulation entre les prestations à distance et en présentielles.

 

Nouvelles obligations de l’entreprise étrangères détachant des salariés en France et de l’entreprise française les recevant.

Neuf mois après la parution de la loi dite « Savary », son décret d’application a été publié complétant ainsi les mentions figurant sur la déclaration de détachement, listant les nouveaux documents à mettre à la disposition de l’inspecteur du travail, formalisant les modalités de désignation du représentant en France de l’entreprise étrangère, employeur des salariés détachés, indiquant les pièces que le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre doit demander et conserver, la procédure de mise en œuvre de la responsabilité solidaire du donneur d’ordre ou du maître d’ouvrage en ce qui concerne les conditions de travail et d’hébergement.  Ainsi, le donneur d’ordre ou maître d’ouvrage qui a recours à un prestataire de services devra s’assurer que celui-ci accomplit les formalités déclaratives sous peine d’amende (2.000 euros par salarié détaché, plafonnée à 10.000 euros). Depuis le 1er avril 2015, la déclaration de détachement comporte de nouvelles mentions relatives tant à l’entreprise qui détache (forme juridique, numéro d’immatriculation, état civil des dirigeants, organisme de recouvrement des cotisations sociales) qu’aux conditions de travail des salariés détachés (utilisation de matériel dangereux, durée du travail, lieux d’hébergement, modalités de prise en charge des frais de transport, d’hébergement et de repas). Une copie de cette déclaration doit être annexée au registre unique du personnel de l’entreprise d’accueil, sachant que le nombre de salariés détachés doit aussi figurer dans le bilan social.  (Décret no 2015-364 du 30 mars 2015)

Par ailleurs, l’ensemble des agents de contrôle (et non plus seulement les inspecteurs du travail) peuvent se faire remettre cette déclaration ainsi que l’ensemble des documents inhérents au détachement qui comprend suite à la publication du décret, outre une attestation des salaires versés et de la régularité sociale de l’entreprise étrangère, tout document établissant le nombre de contrats exécutés et le chiffre d’affaire réalisé dans le pays d’implantation de l’entreprise, un relevé des heures de travail, le contrat de travail ou tout autre document attestant du lieu d’embauche et du droit applicable  En outre, depuis le 1er avril 2015, l’entreprise étrangère qui détache des salariés en France doit désigner un représentant sur le territoire français afin d’assurer la liaison avec l’inspection du travail et les officiers de police, sous peine d’amende (2.000 euros par salarié détaché, plafonnée à 10.000 euros). Ce document, établi en français, indique l’état civil du représentant ainsi que ses coordonnées et fait état de l’acceptation par ce dernier de ce rôle.  Outre la déclaration de détachement, le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre doit être en possession de ce document sous peine d’amende (2.000 euros par salarié détaché, plafonnée à 10.000 euros).     De plus, le maitre d’ouvrage doit s’assurer que le prestataire de services applique à ses salariés un « noyau dur » de droits fondamentaux portant sur la durée du travail, les congés payés et jours fériés, le respect de minima salariaux, l’hygiène et la sécurité, la protection de la maternité et paternité ainsi que les dispositions garantissant la non-discrimination, sachant que le législateur institue, là encore, une responsabilité solidaire en matière de rémunération minimale. Le donneur d’ordre doit également être vigilant sur la qualité de l’hébergement collectif des intéressés de façon à ce qu’il soit compatible avec la dignité humaine.  Enfin, afin de lutter contre le travail illégal, des peines complémentaires peuvent être prononcées, à savoir l’inscription sur une liste, publiée sur internet, des entreprises condamnées en matière de travail illégal ainsi que l’interdiction de percevoir des aides publiques pendant cinq ans.

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