Il est probable que son contenu ne soit plus à jour.
Partager la publication "Interview d'Antoine Fonteneau : décrypter son bulletin de salaire"
Après des études juridiques et une expérience d’un an pendant laquelle il a découvert la pédagogie et la transmission des savoirs, Antoine Fonteneau, l’un des experts de GERESO, s’est tourné vers le domaine complexe de la paie. Depuis 22 ans maintenant, il anime de nombreuses sessions de formation pour GERESO, apporte son expertise aux entreprises en réalisant des audits de paie et écrit des ouvrages sur ce domaine. Antoine Fonteneau nous propose aujourd’hui de faire le point sur ce document au coeur de la relation entre l’employeur et l’employé : le bulletin de paye.
En général, les salariés ont-ils des difficultés à déchiffrer leur bulletin de salaire ? Et si oui, pourquoi ?
De nombreux salariés ont en effet des difficultés pour comprendre leur bulletin de salaire. Et ce n’est pas étonnant : le Code du travail et le Code de la sécurité sociale rendent complexe l’établissement de ce document incontournable en entreprise.
Mais la difficulté ne concerne pas seulement les salariés. Pour les employeurs aussi, établir un bulletin de salaire n’est pas simple. Il faut savoir que la réglementation évolue régulièrement. Ces derniers doivent par conséquent tenir compte de ces modifications pour que les bulletins de paie remis aux salariés respectent ces évolutions règlementaires. Le bulletin de paie est aussi un document qui répond à une véritable obligation d’information vis à vis du salarié : ce document peut être source de contentieux avec les salariés.
Pourtant, la production des bulletins de salaire n’est elle pas automatisée ?
Oui, elle l’est, dans les grandes entreprises mais cela n’évite pas pour autant les éventuelles anomalies et le contrôle qui doit être effectué par les gestionnaires de paye. L’automatisation permet surtout à l’entreprise d’optimiser le processus de production des payes en assurant notamment une harmonisation des pratiques et un traitement « en volume » de certaines paies, ce qui permet théoriquement d’effectuer des économies sur les frais de gestion administrative du personnel. Au final, on peut dire que l’automatisation est d’une grande aide pour les entreprises, mais que le système n’est pas toujours totalement efficient.
Pourquoi l’établissement d’un bulletin de salaire est-il si important ?
Le paiement du salaire est l’un des principaux éléments de la relation de travail. La remise du bulletin de paye doit nécessairement accompagner ce paiement en permettant notamment au salarié d’avoir une information sur ce paiement et aux organismes tiers (URSSAF…) de valider la bonne application des règles. C’est pourquoi son établissement doit suivre certaines règles et qu’il est important pour le salarié de savoir le comprendre.
Pour faire simple, du côté du salarié, il s’agit de mesurer si les sommes versées correspondent bien à ce qui lui est dû. Du côté de l’employeur, il s’agit de répondre aux obligations législatives et d’identifier les éventuelles erreurs.
Quelles sont les mentions obligatoires du bulletin de paie ?
Dans un premier temps rappelons qu’il n’existe pas d’obligations quant à la forme du bulletin de paye, celui-ci pouvant varier d’une entreprise à une autre. Par contre, l’article R 3243-1 du Code du travail fixe un certains nombre de mentions devant y figurer. L’absence d’une ou plusieurs mentions peut donner lieu à une amende prévue pour les contraventions de 3e classe.
Parmi les mentions obligatoires figurent notamment :
- le nom et l’adresse de l’employeur,
- le nom et l’emploi du salarié
- sa position dans la classification conventionnelle qui lui est applicable
- la référence de l’organisme auquel l’employeur verse les cotisations de sécurité sociale
- la période et le nombre d’heures de travail auxquels se rapporte le salaire
- la nature et le montant des accessoires de salaire soumis aux cotisations salariales et patronales
- le montant de la rémunération brute du salarié,
- la nature et le montant des ajouts et retenues réalisés sur la rémunération brute,
- le montant de la somme effectivement reçue par le salarié (net à payer),
- la date de paiement de cette somme,
- les dates de congé et le montant de l’indemnité correspondante, lorsqu’une période de congé annuel est comprise dans la période de paie considérée…
Quelles sont les mentions interdites ?
Elles sont au nombre de deux : il est interdit de faire mention sur le bulletin de paie des heures de grève ainsi que des heures de délégation pour les représentants du personnel. S’agissant des heures de grèves, l’absence peut figurer sur le bulletin de salaire, mais pas son origine (art. R 3243-4 du Code du travail).
Qu’en est-il des mentions sur le salaire brut et le salaire imposable ?
3 mentions du bulletin de paye ont trait au salaire :
- le salaire brut,
- le net à payer
- le net imposable.
Le salaire brut, c’est l’ensemble des éléments versés ou remis (avantage en nature) au salarié et soumis à cotisation. On part de ce dernier pour établir le salaire net qui peut se définir comme le salaire brut en espèce sous déduction des cotisations et contributions salariales et des autres retenues. Le salaire net à payer doit obligatoirement apparaître sur le bulletin. Enfin, le net imposable, qui n’est pas une mention obligatoire, est la somme qui va être communiquée à l’administration fiscale et qui servira de base pour le calcul de l’impôt sur le revenu.
Combien de temps faut-il conserver son bulletin de salaire ?
L’employeur doit le conserver pendant 5 ans (art. L 3243-4 du Code du travail) et le salarié, sans limitation de durée. A savoir : la version papier n’est plus la seule possible. L’employeur peut aussi fournir une version numérique du bulletin de salaire au salarié. S’il ne veut lui délivrer qu’en version numérique, c’est possible, mais le salarié doit donner son accord au préalable.
Nous allons vers une simplification de la fiche de paie. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ?
Actuellement, le gouvernement souhaite simplifier les démarches administratives des entreprises, le bulletin de paye faisant partie de cette volonté. En effet, personne ne peut nier, qu’actuellement, il est difficile de déchiffrer et de comprendre un bulletin de salaire. L’objectif est de le rendre plus lisible en regroupant les cotisations sociales et en simplifiant l’architecture des prélèvements sociaux.