Actualités du droit du travail – Mars 2011

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Décisions de la cour de Cassation, propositions de lois… : retrouvez dans ce dossier toute l’actualité du droit du travail de mars 2011, compilée par Amandine Lecomte, consultante en paie et droit du travail chez GERESO.

Reçu pour solde de tout compte

Vidéosurveillance et licenciement

Conditions de mise en place d’un système de vidéosurveillance

Convocation à l’entretien préalable au licenciement

Congés payés et jours fériés

Licenciement économique et légèreté blâmable de l’employeur

CDD et démission

Rupture du contrat de travail et transaction

Licenciement économique et réalité des difficultés

Inaptitude et reclassement

Représentant du personnel et chômage partiel

Changement d’organisation et rupture du contrat

Licenciement économique et PSE

 

Reçu pour solde de tout compte

La signature du reçu pour solde de tout compte ne vaut en aucun cas renoncement du salarié à contester son licenciement, ni même les sommes portées sur le document. C’est ce que rappelle la Cour de cassation. Le reçu pour solde de tout compte même signé n’est pas une transaction empêchant les contestations ultérieures. 

Source : Cass. soc. 2 février 2011, n° 09-40453 D

Vidéosurveillance et licenciement

Dans cette affaire, le barman d’un casino avait été licencié pour faute grave après que le système de vidéosurveillance de l’établissement eut révélé qu’il omettait d’encaisser de nombreuses consommations. L’intéressé soutenait que ces vidéosurveillances étaient illicites et que l’employeur ne pouvait les utiliser contre lui. Faux répond la Cour de cassation. Du moment que l’ensemble du personnel est informé de la présence de ces caméras et de leur fonctionnement permanent, l’employeur a respecté son obligation d’information. Ainsi, les enregistrements recueillis par ces caméras constituent un moyen de preuve licite.

Source : Cass. soc. 2 février 2011, n° 10-14263 D

Conditions de mise en place d’un système de vidéosurveillance

L’employeur peut mettre en place un système de vidéosurveillance dans l’entreprise s’il respecte certaines conditions (intérêt légitime, respect de la vie privée, consultations des représentants du personnel, information des salariés, déclaration à la CNIL). Mais l’installation d’un tel dispositif ne doit pas conduire à une mise sous surveillance généralisée et permanente du personnel (délib. CNIL 2009-201 du 16 avril 2009) sauf contraintes spécifiques (voir arrêt précdent sur le barman d’un casino). La CNIL peut mettre en demeure un employeur, dans un délai donné, de modifier son dispositif lorsque celui-ci ne respecte pas les exigences requises. C’est ce qu’elle vient d’exiger d’une société de fret international dont le dispositif filme les salariés dans des espaces de repos et de détente, non ouverts au public. La CNIL rappelle que dans ce contexte un tel système doit être strictement limité à l’objectif de protection des personnes, des biens et de prévention des actes terroristes, et ne doit pas conduire à filmer les salariés dans des espaces de repos et de détente.

Source : CNIL (formation contentieuse), décision du 18 janvier 2011, www.cnil.fr

Convocation à l’entretien préalable au licenciement

L’employeur qui envisage de licencier un salarié doit, avant toute décision, convoquer l’intéressé à un entretien préalable. Le code du travail dispose que cette convocation est faite par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre récépissé (c. trav. art. L. 1232-2). Cet article a pour but de prévenir toute contestation concernant la date de réception de la convocation. Aussi, c’est tout naturellement que la Cour de cassation a admis que cette convocation pouvait aussi être envoyée par Chronopost puisqu’une date certaine de réception et d’envoi pouvait être établie. 

Source : Cass. soc. 8 février 2011, n° 09-40027 FSPB

Congés payés et jours fériés

Les jours fériés ne sont ni des jours ouvrables, ni des jours ouvrés. C’est ce que rappelle en substance la Cour de cassation. En l’espèce, un employeur avait décompté des congés payés de l’un de ses salariés plusieurs jours fériés au motif que ces jours pouvaient être des jours travaillés du fait de l’organisation du travail. De plus, rien n’interdit en pratique de faire travailler ses salariés pendant les jours fériés (à l’exception du 1er mai). Toutefois, la convention collective prévoyait que les salariés appelés à travailler un jour férié légal devaient bénéficier d’un repos d’égale durée. Aussi, selon la Cour de cassation, il était impossible de décompter ces jours fériés et le salarié a obtenu un rappel de salaire au titre de ces jours injustement déduits.

Source  : Cass. soc. 26 janvier 2011, n° 09-68309 FSPB

Licenciement économique et légèreté blâmable de l’employeur

La cessation d’activité causée par une légèreté blâmable de l’employeur fait courir de gros risques.

La fermeture définitive et totale de l’entreprise constitue, en principe, un motif autonome de licenciement économique. Ce n’est cependant pas le cas lorsque cette fermeture est due à la légèreté blâmable de l’employeur. En voici une nouvelle illustration où la Cour de cassation considère que la décision de fermer la filiale d’un groupe dans le seul but de réaliser des économies et d’améliorer la propre rentabilité de ce groupe, et ce, au détriment de la stabilité de l’emploi dans l’entreprise concernée, constitue une légèreté blâmable de l’employeur. Dans ces circonstances, les licenciements pour motifs économique sont sans cause réelle et sérieuse.

Source : Cass. soc. 1er février 2011, n° 10-30045 FPB

CDD et démission

Un salarié ne peut démissionner d’un CDD. Ce dernier ne peut mettre fin à son contrat avant le terme prévu qu’en cas de faute grave ou de force majeure (c. trav. art. L. 1243-1). Il peut aussi rompre le contrat avant terme s’il justifie d’une embauche en CDI (c. trav. art. L. 1242-2). En dehors de ces cas, l’employeur est en droit de
lui réclamer des dommages et intérêts (c. trav. art. L. 1243-3). En l’espèce, un salarié avait démissionné de son CDD en dehors des cas prévus dans le Code du travail. Il a donc été condamné à verser 8 000 € de dommages et intérêts à l’employeur.

Source : Cass. soc. 9 février 2011, n° 09-42485 D

Rupture du contrat de travail et transaction

L’employeur et le salarié peuvent résoudre un différend lié à la rupture du contrat de travail à l’aide d’une transaction. Mais cette transaction n’est valable que si la rupture du contrat de travail est intervenue de manière définitive et si la transaction vient mettre fin, moyennant des concessions réciproques, à une contestation née ou à naître entre l’employeur et le salarié à l’occasion de la rupture du contrat de travail. Lorsque le contrat est rompu par un licenciement, la première condition de validité de la transaction exige que celle-ci soit conclue une fois que le licenciement a été notifié. La lettre de licenciement doit donc avoir été préalablement adressée au salarié par lettre recommandée avec accusé de réception (c. trav. art. L. 1232-6). Si tel n’est pas le cas, la transaction est nulle et le salarié peut parfaitement contester le caractère réel et sérieux du licenciement devant les juges.

Source : Cass. soc. 9 février 2011, n° 09-41585 D

Licenciement économique et réalité des difficultés

La lettre de licenciement doit énoncer à la fois la cause économique ainsi que son incidence sur l’emploi ou le contrat de travail de l’intéressé.  Si la seule baisse du chiffre d’affaires n’induit pas ipso facto une menace sur la compétitivité, le fait d’indiquer une baisse d’activité résultant de la disparition d’un certain nombre de contentieux traités par l’entreprise et de son incidence sur l’emploi de la salariée concernée suffit à établir la réalité des difficultés économiques. Par conséquent, le licenciement prononcé est pourvu de cause réelle et sérieuse.

Source : Cass. soc. 16 février 2011, n° 10-10110 FSPB

Inaptitude et reclassement

Les salariés en contrat à durée déterminée dont l’inaptitude physique vient à être constatée par le médecin du travail font actuellement face à un vide juridique, lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de les reclasser :

  • ils sont, en général, privés de rémunération, puisqu’ils ne travaillent plus ;
  • ils ne perçoivent aucune indemnité de rupture spécifique, dans la mesure où il n’existe pas de procédure de rupture anticipée pour inaptitude.
  • La seule exception est la possibilité, pour l’employeur, de demander la résolution judiciaire du contrat lorsque l’inaptitude est consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle (c. trav. art. L. 1226-20, al. 2). Si la résolution est prononcée, les juges fixent le montant de la compensation financière à verser au salarié. La proposition de loi « de simplification et d’amélioration de la qualité du droit » vise à étendre aux CDD les règles prévues pour les CDI en matière d’inaptitude physique. En cas d’impossibilité de reclassement, l’employeur aurait un mois pour reclasser le salarié et, en cas d’impossibilité de reclassement, rompre le CDD. Le salarié aurait alors droit, en plus de la prime de précarité, à une indemnité de rupture égale à l’indemnité légale de licenciement (sans condition d’un an d’ancienneté), dont le montant serait doublé en cas d’inaptitude d’origine professionnelle. En l’absence de reclassement ou de rupture anticipée pour inaptitude dans le délai d’un mois, l’employeur serait tenu de reprendre le versement du salaire.

    Source : Proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit adoptée en 2e lecture par l’Assemblée nationale le 9 février 2011 (art. 29 nonies)

    Représentant du personnel et chômage partiel

    Si la mise en chômage partiel d’un salarié « ordinaire », pour une période où il est indemnisé, ne constitue pas une modification du contrat de travail, il en est autrement pour un salarié titulaire d’un mandat de représentation du personnel. Aucun changement des conditions de travail ne peut être imposé à un représentant du personnel sans son accord.  En conséquence, si le représentant du personnel refuse d’être mis au chômage partiel, l’employeur doit lui verser la partie du salaire perdue du fait de la mesure de chômage partiel.

    Source : Cass. soc. 19 janvier 2011, n° 09-43194 D

    Changement d’organisation et rupture du contrat

    Le contrat de travail d’une salariée, qui faisait partie de l’équipe dirigeante d’une grande société, prévoyait que « tout changement significatif d’actionnariat entraînant une modification importante de l’équipe de direction » constituait une rupture unilatérale du contrat imputable à l’employeur, avec à la clef le versement d’importantes indemnités. La salariée avait alors fait jouer cette clause à la suite d’une prise de participation dans le capital de la société et du remaniement de l’équipe de direction qui s’en était suivi. Pour les juges, une clause qui permet au salarié de rompre le contrat de travail en imputant cette rupture à l’employeur en cas de changement de contrôle, de fusion-absorption ou de changement significatif d’actionnariat entraînant une modification importante de l’équipe de direction est licite sous deux conditions :

  • elle est justifiée par les fonctions du salarié au sein de l’entreprise ;
  • et elle ne fait pas échec à la faculté de résiliation unilatérale du contrat par l’une ou l’autre des parties.
  • Dans cette affaire, ces deux conditions étaient respectées, puisque, d’une part, la salariée occupait un poste clef dans l’équipe de direction et que, d’autre part, elle pouvait toujours démissionner tandis que l’employeur conservait la faculté de la licencier. L’entreprise a donc dû finalement acquitter l’indemnité contractuelle de rupture, dont le montant s’élevait à plus d’un million d’euros.

    Source : Cass. soc. 26 janvier 2011, n° 09-71271 FSPB

    Licenciement économique et PSE

    Les entreprises cherchent souvent à éviter la mise en place d’un Plan de Sauvegarde de l’Emploi (PSE) lorsqu’elles rencontrent des difficultés économiques. Pour ce faire, elles utilisent d’autres modes de rupture que le licenciement. Pour rappel, dans les entreprises employant au moins 50 salariés, lorsque le nombre de licenciements est au moins égal à 10 dans une même période de 30 jours, l’employeur est tenu d’élaborer un PSE destiné à éviter les licenciements ou à en limiter le nombre ainsi qu’à faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité (c. trav. art. L. 1233-61). Pour la Cour de
    cassation, ce texte est plus large que les seuls licenciements. En effet, elle indique que lorsqu’elles entraînent la rupture du contrat de travail, les préretraites mises en œuvre en raison de difficultés économiques doivent être prises en compte pour déterminer si un plan de sauvegarde est ou non obligatoire.

    Source : Cass. soc. 1er février 2011, n° 09-70121 D

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