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Partager la publication "Sommes à verser en cas de licenciement pour inaptitude : quand la chambre sociale de la Cour de cassation joue sur les mots !"
L’inaptitude n’en finit pas de susciter l’intérêt de la Cour de cassation. Tous les moyens sont bons pour rendre des décisions dans ce domaine. L’arrêt n°10-18.904 rendu le 12 octobre dernier n’échappe pas à la règle. Il n’a fait l’objet d’aucune publication tant il est jugé secondaire, pourtant il n’en demeure pas moins intéressant.
Quels sont les faits ? Un salarié a été licencié à la suite d’une inaptitude d’origine professionnelle c’est-à-dire faisant suite à un accident du travail ou à une maladie professionnelle.
Dans ce cas de figure, le Code du travail nous indique que le salarié licencié a droit à une indemnité compensatrice d’un montant égal à l’indemnité légale de préavis due en cas de licenciement (c. trav. art. L. 1226-14).
Le salarié a donc droit à une indemnité compensatrice de préavis qui n’en est pas une. Les juges nous rappellent que cette indemnité n’a pas la nature d’une indemnité de préavis même si son montant y correspond. Nous pourrions croire que la Cour joue sur les mots : il n’en est rien. Pour la Cour de cassation, cette indemnité compensatrice qui n’est pas « de préavis » ne peut, dès lors, ouvrir droit pour le salarié licencié à une indemnité de congés payés sur préavis. Cela paraît logique et pourtant …
L’indemnité de congés payés sur préavis est due dès lors que ce dernier est effectué ou à partir du moment où l’employeur dispense le salarié d’effectuer ce préavis. Il apparait que ce n’est pas le cas ici. Malgré tout, cette indemnité compensatrice que nous appellerons de « non préavis » n’est due qu’en cas de licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle. Tel n’est pas le cas lorsque l’inaptitude est indépendante du travail.
Il convient de se demander pourquoi une telle différence ? Pourquoi cette indemnité compensatrice de « non préavis » n’est due qu’en cas de licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle ? La raison est très simple.
Le législateur considère que l’employeur est fautif lorsque survient un accident du travail ou une maladie professionnelle. Cette présomption de faute justifie le fait que la cotisation « accident du travail » soit à la charge exclusive de l’employeur. Le licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle est donc initialement fondé sur une faute de l’employeur qui a manqué à son obligation de sécurité de résultat. Cette faute est donc sanctionnée par le versement d’une indemnité compensatrice de « non préavis ».
Mais pourquoi le salarié n’effectue t-il pas son préavis ?
Parce que du fait du manquement de son employeur à son obligation de sécurité de résultat, ce dernier ne l’a pas mis en mesure d’effectuer ce préavis. Ce n’est donc pas le salarié qui est fautif dans cette affaire mais bien l’employeur. Aussi, nous précise la Cour de cassation, l’inexécution du préavis par le salarié, résultant d’une faute de l’employeur, ne donne pas droit au versement d’une
indemnité compensatrice de congés payés sur préavis.
Etonnant de constater qu’une faute de l’employeur peut l’exonérer de ses propres obligations ! Il y a fort à parier que le développement de cette jurisprudence ravira nombre d’employeurs peu diligents : une sorte de « prime à la mauvaise foi » ou contrairement à un grand principe du droit, l’employeur peut aussi se prévaloir de sa propre turpitude. Espérons que cet arrêt demeure un arrêt d’espèce vite jugé, vite oublié.